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Institut Français d'Archéologie Orientale <al-Qāhira> [Editor]; Mission Archéologique Française <al-Qāhira> [Editor]
Recueil de travaux relatifs à la philologie et à l'archéologie égyptiennes et assyriennes: pour servir de bullletin à la Mission Française du Caire — 31.1909

DOI issue:
Nr. 3-4
DOI article:
Legrain, Georges: Sur un groupe d'Amon et d'Améniritis Ire
DOI Page / Citation link: 
https://doi.org/10.11588/diglit.12678#0155

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SUR UN GROUPE D'AMON ET D'AMÉNIRITIS IIr

fortement comme pour rapprocher plus encore le corps de la femme de celui du dieu.

La malchance veut qu'il ne soit demeuré que peu de l'avant-bras gauche. Ce qui
en reste nous permet de deviner quelle était la pose de l'épouse divine. Elle n'est pas
assise toute raide, hiératique. Les pieds posent encore sagement sur un tabouret qui
lui a permis d'atteindre jusqu'aux genoux du dieu un peu plus grand qu'elle, mais, pour
l'étreinte, le torse s'émancipe, s'assouplit, tourne sur les hanches, et les deux seins
rigides d'Améniritis frôlent les pectoraux d'Amon tandis que la main gauche semble
attirer vers le baiser la tête de l'époux divin.

Je ne puis exprimer, comme je voudrais le savoir faire, la grâce inattendue de ce
petit monument et la beauté de son modelé. Il y a dans ce groupe une intensité de vie qui
en fait presque le chef-d'œuvre d'un art égyptien dont nous ne connaissons encore que
peu d'exemples. Il nous faut remonter jusqu'à l'art atonien pour trouver pareille fougue
et pareil naturel. Parfois les bas-reliefs nous montrent bien les rois embrassant les
dieux, mais ce sont alors de grands gestes compassés, cérémonieux, comme ceux des
héros du répertoire classique; voyez surtout les bas-reliefs de Louqsor et de Déir-el-
Bahari qui nous montrent Amon procréant lui-même Hatshopsouïtou ou Aménôthès III.
Le dieu et la reine sont presque ridicules tant ils sont gravement assis en face l'un de
l'autre, et quiconque n'en est pas averti ne peut se figurer que la reine pourra concevoir
à la suite d'un pareil entretien où, seule, la parole, le Verbe semble jouer un rôle.

Dans notre groupe, au contraire, nous avons tout laisser-aller, toute grâce; ce
sont là deux amoureux : tel Jupiter, Amon ne dédaignait pas les mortelles et savait leur
rendre leurs caresses.

Peut-être, d'ailleurs, dans la différence apportée pour la figuration de cette scène â
plusieurs siècles de distance, devons-nous voir l'indication d'une modification du con-
cept qu'on se faisait de la divinité et de ses faits et gestes. Amon, peu à peu, s'était-il
rapproché des humains, et ceux-là s'en faisaient-ils à cette époque une idée moins
abstraite que jadis?

En tout cas, nous savions déjà que certaines femmes lui étaient consacrées, et notre
groupe n'est, en quelque sorte, que l'illustration d'un passage d'Hérodote, qui, nous
parlant de Jupiter-Belus et de son temple à Babylone, ajoute : « Dans la dernière tour,
» est une grande chapelle, dans cette chapelle un grand lit magnifique, et près de ce
» lit une table d'or. On n'y voit point de statues. Personne n'y passe la nuit, à moins
» que ce ne soit une femme du pays, dont le dieu a fait choix, comme le disent les
o Chaldéens, qui sont les prêtres de ce dieu.

» Ces mêmes prêtres ajoutent que le dieu vient lui-même dans la chapelle, et qu'il
» se repose sur le lit. Cela ne me paraît pas croyable. La même chose arrive à Thèbes
» en Egypte, s'il faut en croire les Égyptiens; car il y couche une femme dans le temple
» de Jupiter thébain, et l'on dit que ces deux femmes n'ont commerce avec aucun
» homme. La même chose s'observe à Patare en Lycie, lorsque le dieu honore cette
» ville de sa présence. Alors on enferme la grande prêtresse la nuit dans le temple1 ;

1. Ainsi que nous l'indique Hérodote, Amon avait son harem ;ï Karnak et à Louqsor, et c'est, je crois, là
 
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