DE M. DE VOLTAIRE. Ï2T
LETTRE L X L
A M. L’ A B B É R O U B A U D,
AUTEUR DES REPRESENTATIONS, etc, AUX
MAGISTRATS.
Ferney, ce i de juillet.
OTRE livre, Monsreur, me paraît éloquent,
profond et utile. Je suis bienpersuadé avec vous que I769«
le pays où le commerce est le plus libre , sera
toujours le plus riche et le plus ssorissant, propor-
tion gardée. Le premier commerce est, sans con-
tredit, celui des blés. La méthode anglaise, adoptée
enfin par noire sage gouvernement, est la meilleure ;
mais ce n’est pas assez de favoriser l’exportation , si
on n’encourage pas l’agriculture. Je parle en labou-
reur qui a défriché des -terres ingrates.
Je ne sais comment il se peut faire que la France
étant , après l’Allemagne , le pays le plus peuplé
de l’Europe , il nous manque pourtant des bras pour
cultiver nos terres. Il me paraît évident que le
ministère en est instruit, et qu’il fait tout ce qu’il
peut pour y remédier. On diminue un peu le nom-
bre des moines , et par-là on rend les hommes à
la terre. On a donné des édits pour extirper l’in-
fame profession de mendians, profession si réelle,
et qui se soutient malgré les lois, au point que l’on
compte deux cents mille mendians vagabonds dans le
royaume. Us échappent tous aux châtimens décernés
LETTRE L X L
A M. L’ A B B É R O U B A U D,
AUTEUR DES REPRESENTATIONS, etc, AUX
MAGISTRATS.
Ferney, ce i de juillet.
OTRE livre, Monsreur, me paraît éloquent,
profond et utile. Je suis bienpersuadé avec vous que I769«
le pays où le commerce est le plus libre , sera
toujours le plus riche et le plus ssorissant, propor-
tion gardée. Le premier commerce est, sans con-
tredit, celui des blés. La méthode anglaise, adoptée
enfin par noire sage gouvernement, est la meilleure ;
mais ce n’est pas assez de favoriser l’exportation , si
on n’encourage pas l’agriculture. Je parle en labou-
reur qui a défriché des -terres ingrates.
Je ne sais comment il se peut faire que la France
étant , après l’Allemagne , le pays le plus peuplé
de l’Europe , il nous manque pourtant des bras pour
cultiver nos terres. Il me paraît évident que le
ministère en est instruit, et qu’il fait tout ce qu’il
peut pour y remédier. On diminue un peu le nom-
bre des moines , et par-là on rend les hommes à
la terre. On a donné des édits pour extirper l’in-
fame profession de mendians, profession si réelle,
et qui se soutient malgré les lois, au point que l’on
compte deux cents mille mendians vagabonds dans le
royaume. Us échappent tous aux châtimens décernés