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RECUEIL DES LETTRES
LETTRE L X X I.
A M. LE COMTE D’ARGENTAL.
22 de juillet.
JVÏon cher ange, sur votre lettre du 13, je vous
renvoie à madame Denis. Je lui ai confié une partie
du mystère d’iniquité ; je ne l’ai su que par elle. En
vérité , tout est un jeu de hasard dans ce monde , ou
peu s’en faut.
La Duchéfrne, bonne imbécille, consulte madame
Denis sur un recueil de mes lettres qu’on lui a vendu
et qu’elle veut imprimer. Je ne reçois ce beau recueil
par madame Denis que le 19 du mois. Je vois alors
qu’on m’a volé beaucoup de manuscrits, et entre
autres ces lettres peu faites assurément pour voir le
jour, et un gros manuscrit de recherches sur I histoire,
par ordre alphabétique.La lettre P étaitfort ample(*).
On s’en est servi, on a suppléé , on a ajouté , on a
broché, brodé comme on a pu , on a vendu le tout.
L’auteur de toute cette manœuvre m’est assez
connu, mais je dois absolument me taire. On me
dirait: Vous avouez qu on vous a volé ces lettres, donc
elles front de vous ; vous avouez quon vous a volé
le recueil P, donc il eft de vous. De plus, que de
noirceurs nouvelles on ajouterait à la première! on
ne s’arrête pas dans le chemin du crime. Cette affaire
deviendrait un labyrinthe horrible dont je ne pour-
rais me tirer. Je n’ai que la certitude entière qu’on
(*) L’Histoire du parlement de Paris.
RECUEIL DES LETTRES
LETTRE L X X I.
A M. LE COMTE D’ARGENTAL.
22 de juillet.
JVÏon cher ange, sur votre lettre du 13, je vous
renvoie à madame Denis. Je lui ai confié une partie
du mystère d’iniquité ; je ne l’ai su que par elle. En
vérité , tout est un jeu de hasard dans ce monde , ou
peu s’en faut.
La Duchéfrne, bonne imbécille, consulte madame
Denis sur un recueil de mes lettres qu’on lui a vendu
et qu’elle veut imprimer. Je ne reçois ce beau recueil
par madame Denis que le 19 du mois. Je vois alors
qu’on m’a volé beaucoup de manuscrits, et entre
autres ces lettres peu faites assurément pour voir le
jour, et un gros manuscrit de recherches sur I histoire,
par ordre alphabétique.La lettre P étaitfort ample(*).
On s’en est servi, on a suppléé , on a ajouté , on a
broché, brodé comme on a pu , on a vendu le tout.
L’auteur de toute cette manœuvre m’est assez
connu, mais je dois absolument me taire. On me
dirait: Vous avouez qu on vous a volé ces lettres, donc
elles front de vous ; vous avouez quon vous a volé
le recueil P, donc il eft de vous. De plus, que de
noirceurs nouvelles on ajouterait à la première! on
ne s’arrête pas dans le chemin du crime. Cette affaire
deviendrait un labyrinthe horrible dont je ne pour-
rais me tirer. Je n’ai que la certitude entière qu’on
(*) L’Histoire du parlement de Paris.