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OBJETS DES PREMIÈRES ÉPOQUES ARCHAÏQUES
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incisées indiquent les rayons de la nageoire dorsale,
qui est très basse; sa partie antérieure est pourtant
parfaitement lisse et un peu plus élevée que le reste.
Le résonateur de la lyre, dont les cordes ne sont pas
indiquées, est peint en rouge.
*1821 CA. Partie antérieure d’une statuette sem-
blable. Manquent l’arrière-train avec la queue, la
plinthe, la pointe de la barbe et la plus grande partie
des bras avec la lyre. H 0.063. Les cheveux tombent
en large masse sur le dos; la barbe est très longue.
Des traces de couleur noire sont conservées aux
cheveux, aux yeux et à la barbe. Le corps est pointillé
en rouge. En haut, reste d’une nageoire dorsale.
1822 GD. Milieu du corps d’une statuette sem-
blable, avec une petite nageoire dorsale, placée plus
en arrière, près de la queue. Manquent la tête, la
queue, la plinthe et les bras qui ont probablement
tenu une lyre. H 0.037.
*1823. Tête à la barbe et aux cheveux longs.
H 0.042. Elle paraît avoir fait partie d’une figurine
analogue aux nos 1820 — 1822.
*1824. Monstre marin d’un type différent, com-
posé du corps d’un calmar avec les bras et la tête
d’un homme barbu. Manquent les bras et la partie
antérieure de la plinthe. H 0.073. Les cheveux
tombent en large masse sur le dos. Le corps est
large et plat, légèrement bombé par dessus, s’amin-
cissant vers les bords, et se terminant en une petite
queue; pas de nageoires. L’attribut qu’ont tenu,
probablement, les mains du démon n’a pas laissé de
traces; si ç’a été une lyre, l’instrument n’a pas touché
à la poitrine. Un autre fragment peu important et
mal conservé paraît avoir fait partie d'une figurine
semblable; ce fragment fut trouvé sur le versant
occidental de l’acropole (Kopria). Pour l’expli-
cation de la forme du corps de cet homme de mer je
me suis adressé à la bonté de MM. Herluf Winge et
Adolph Jensen, au Musée Zoologique de Copen-
hague. Tous les deux m’ont exprimé l’idée que l’arri-
ère-train du corps composite est emprunté à quelque
espèce de céphalopode. Le professeur Adolph Jensen
est d’opinion que c’est la partie postérieure d’un
Loligo Forbesii qui est rendue dans notre figurine;
la ressemblance est en effet surprenante (v. Fauna
und Flora des Golfes von Neapel, 23. Monographie
1896: Cejalof)odi, di Guiseppe Jatta, pl. 8, fig. 5).
Je ne connais pas d’autres exemples d’une pareille
composition, mais elle est, après tout, aussi naturelle
que la combinaison d’un poisson avec la partie supéri-
eure d’un corps humain (nos 1820 — 1822): pour les
Grecs, les céphalopodes ne jouaient pas un rôle moins
important que les poissons. Un exemplaire moyen
de l’espèce Loligo Forbesii atteint, selon l’ouvrage
cité, la grandeur d’un demi-mètre, et il y en a qui
deviennent beaucoup plus grands. Citons enfin le
fait curieux qu’un céphalopode de grandeur extra-
ordinaire, pris dans le Sund vers 1550, a été, en effet,
regardé comme un homme de mer, et qu’on le fit
ensevelir; c’est au naturaliste danois Japetus Steen-
strup qu’on doit l’explication de la véritable nature
de ce monstre marin, qui avait fait une forte impression
sur les contemporains superstitieux (v. Dansk
Maanedsskrift I, 1855, p. 63 sq.). Quant aux parages
grecs, je crois que les traditions localisant le rapt de
Thétis au cap Sépias (en Thessalie) conservent des
réminiscences d’une ancienne divinité marine qu’on
se figurait sous une forme analogue à la figurine n°
, 1824 (v. surtout Schol. Apoll. Rhod. 1, 582; Eustath.
1152, 11).
Lions.
Les lions et les faucons forment les classes les plus
nombreuses parmi les statuettes en pierre calcaire
trouvées à Lindos. Sur un nombre total d’environ
700 figurines, il y en a environ 150 lions et 90 faucons
(ou autres oiseaux). Cette proportion ne corres-
pond nullement à celle qu’on observe dans les trou-
vailles de figurines en calcaire faites dans l’île de
Chypre, où les lions sont très rares et les faucons
n’apparaissent point du tout, à ce que je sache. Nous
avons exposé plus haut (p. 404) les conclusions qu’il
faut déduire de ce fait.
Perrot a fait observer avec raison ^Histoire de
l’art, III, p. 596 sq.) que ce n’est pas l’étude artistique
des mouvements et des formes du roi des animaux
qui ait intéressé les sculpteurs chypriotes: ils l’ont
représenté seulement soit comme ornement, soit
comme symbole religieux. Ils n’ont pas non plus eu
l’occasion de l’étudier sur le vif. Toutes les représen-
tations chypriotes du lion sont copiées sur des em-
prunts faits aux arts assyrien (ou hittite) et égyptien.
Les sculpteurs de l’île se sont bornés à reproduire un
choix des poses typiques, et pour ainsi dire héraldiques,
qu’avait développées la sculpture monumentale et
religieuse des pays cités. Dans les travaux chypriotes
on ne retrouve jamais les mouvements fiers et beaux
dont les bas-reliefs assyriens présentent des exemples
classiques. Le lion est toujours figuré en repos, assis
ou couché comme un chien, et pour ainsi dire réduit
en symbole d’une puissante force protectrice, défen-
dant la tranquillité des lieux ou des personnages
commis à sa surveillance et en détournant tout mal.
C’est ainsi qu’il apparaît aux angles du beau sarco-
phage archaïque d’Athiénau (v. Atl. Cesnola Coll.,
I, pl. 74) et au sommet des stèles funéraires (0^. c.,
pl. 95; 121 ; 122).
Aussi, les figurines de lions trouvées à Lindos se
OBJETS DES PREMIÈRES ÉPOQUES ARCHAÏQUES
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incisées indiquent les rayons de la nageoire dorsale,
qui est très basse; sa partie antérieure est pourtant
parfaitement lisse et un peu plus élevée que le reste.
Le résonateur de la lyre, dont les cordes ne sont pas
indiquées, est peint en rouge.
*1821 CA. Partie antérieure d’une statuette sem-
blable. Manquent l’arrière-train avec la queue, la
plinthe, la pointe de la barbe et la plus grande partie
des bras avec la lyre. H 0.063. Les cheveux tombent
en large masse sur le dos; la barbe est très longue.
Des traces de couleur noire sont conservées aux
cheveux, aux yeux et à la barbe. Le corps est pointillé
en rouge. En haut, reste d’une nageoire dorsale.
1822 GD. Milieu du corps d’une statuette sem-
blable, avec une petite nageoire dorsale, placée plus
en arrière, près de la queue. Manquent la tête, la
queue, la plinthe et les bras qui ont probablement
tenu une lyre. H 0.037.
*1823. Tête à la barbe et aux cheveux longs.
H 0.042. Elle paraît avoir fait partie d’une figurine
analogue aux nos 1820 — 1822.
*1824. Monstre marin d’un type différent, com-
posé du corps d’un calmar avec les bras et la tête
d’un homme barbu. Manquent les bras et la partie
antérieure de la plinthe. H 0.073. Les cheveux
tombent en large masse sur le dos. Le corps est
large et plat, légèrement bombé par dessus, s’amin-
cissant vers les bords, et se terminant en une petite
queue; pas de nageoires. L’attribut qu’ont tenu,
probablement, les mains du démon n’a pas laissé de
traces; si ç’a été une lyre, l’instrument n’a pas touché
à la poitrine. Un autre fragment peu important et
mal conservé paraît avoir fait partie d'une figurine
semblable; ce fragment fut trouvé sur le versant
occidental de l’acropole (Kopria). Pour l’expli-
cation de la forme du corps de cet homme de mer je
me suis adressé à la bonté de MM. Herluf Winge et
Adolph Jensen, au Musée Zoologique de Copen-
hague. Tous les deux m’ont exprimé l’idée que l’arri-
ère-train du corps composite est emprunté à quelque
espèce de céphalopode. Le professeur Adolph Jensen
est d’opinion que c’est la partie postérieure d’un
Loligo Forbesii qui est rendue dans notre figurine;
la ressemblance est en effet surprenante (v. Fauna
und Flora des Golfes von Neapel, 23. Monographie
1896: Cejalof)odi, di Guiseppe Jatta, pl. 8, fig. 5).
Je ne connais pas d’autres exemples d’une pareille
composition, mais elle est, après tout, aussi naturelle
que la combinaison d’un poisson avec la partie supéri-
eure d’un corps humain (nos 1820 — 1822): pour les
Grecs, les céphalopodes ne jouaient pas un rôle moins
important que les poissons. Un exemplaire moyen
de l’espèce Loligo Forbesii atteint, selon l’ouvrage
cité, la grandeur d’un demi-mètre, et il y en a qui
deviennent beaucoup plus grands. Citons enfin le
fait curieux qu’un céphalopode de grandeur extra-
ordinaire, pris dans le Sund vers 1550, a été, en effet,
regardé comme un homme de mer, et qu’on le fit
ensevelir; c’est au naturaliste danois Japetus Steen-
strup qu’on doit l’explication de la véritable nature
de ce monstre marin, qui avait fait une forte impression
sur les contemporains superstitieux (v. Dansk
Maanedsskrift I, 1855, p. 63 sq.). Quant aux parages
grecs, je crois que les traditions localisant le rapt de
Thétis au cap Sépias (en Thessalie) conservent des
réminiscences d’une ancienne divinité marine qu’on
se figurait sous une forme analogue à la figurine n°
, 1824 (v. surtout Schol. Apoll. Rhod. 1, 582; Eustath.
1152, 11).
Lions.
Les lions et les faucons forment les classes les plus
nombreuses parmi les statuettes en pierre calcaire
trouvées à Lindos. Sur un nombre total d’environ
700 figurines, il y en a environ 150 lions et 90 faucons
(ou autres oiseaux). Cette proportion ne corres-
pond nullement à celle qu’on observe dans les trou-
vailles de figurines en calcaire faites dans l’île de
Chypre, où les lions sont très rares et les faucons
n’apparaissent point du tout, à ce que je sache. Nous
avons exposé plus haut (p. 404) les conclusions qu’il
faut déduire de ce fait.
Perrot a fait observer avec raison ^Histoire de
l’art, III, p. 596 sq.) que ce n’est pas l’étude artistique
des mouvements et des formes du roi des animaux
qui ait intéressé les sculpteurs chypriotes: ils l’ont
représenté seulement soit comme ornement, soit
comme symbole religieux. Ils n’ont pas non plus eu
l’occasion de l’étudier sur le vif. Toutes les représen-
tations chypriotes du lion sont copiées sur des em-
prunts faits aux arts assyrien (ou hittite) et égyptien.
Les sculpteurs de l’île se sont bornés à reproduire un
choix des poses typiques, et pour ainsi dire héraldiques,
qu’avait développées la sculpture monumentale et
religieuse des pays cités. Dans les travaux chypriotes
on ne retrouve jamais les mouvements fiers et beaux
dont les bas-reliefs assyriens présentent des exemples
classiques. Le lion est toujours figuré en repos, assis
ou couché comme un chien, et pour ainsi dire réduit
en symbole d’une puissante force protectrice, défen-
dant la tranquillité des lieux ou des personnages
commis à sa surveillance et en détournant tout mal.
C’est ainsi qu’il apparaît aux angles du beau sarco-
phage archaïque d’Athiénau (v. Atl. Cesnola Coll.,
I, pl. 74) et au sommet des stèles funéraires (0^. c.,
pl. 95; 121 ; 122).
Aussi, les figurines de lions trouvées à Lindos se