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Blinkenberg, Christian [Hrsg.]; Dyggve, Ejnar [Hrsg.]; Carlsbergfondet [Hrsg.]
Lindos: fouilles et recherches 1902 - 1914 et 1952;; fouilles de l'acropole (1,Texte): Les petits objets — Berlin: De Gruyter, 1931

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https://doi.org/10.11588/diglit.52556#0315
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PROTOMES EN TERRE CUITE

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plique très naturellement. Les protomes ne consti-
tuent qu’une forme abrégée des statuettes représen-
tant les personnes qui s’étaient adressées à la divi-
nité. On comprend bien que dans le mobilier votif
une telle substitution ne fait son apparition qu’à une
époque relativement avancée.
L’emploi de protomes ou de masques votifs a pris
sans doute son origine dans les sanctuaires chypriotes,
mais c’est dans la partie ionienne du monde grec
qu’il est devenu commun; delà, il s’est répandu très
vite à la Grèce propre, à l’Italie méridionale et aux
autres contrées occupées par les Grecs; beaucoup de
spécimens de travail ionien ont été trouvés encore
en Palestine, v. Bliss-Macalister, Excavations in
Palestine, p. 39 (Tell es Sâfi). Ce n’est pas seulement
dans les sanctuaires des dieux que les protomes ont
remplacé en partie les statuettes votives: on les
déposait aussi souvent dans les tombeaux, où leur
présence doit être expliquée de la même manière que
dans les sanctuaires. Je cite, à titre d’exemples,
seulement quelques trouvailles funéraires de Megara
Hyblaea, conservées au Musée de Syracuse, à savoir
les tombeaux nos 167, 333, 348, 372, 475, 746, 768, qui
offrent encore un intérêt particulier en ce qu’ils con-
firment la définition chronologique donnée ci-dessus:
dans ces sépultures les protomes ont été trouvées
avec des vases corinthiens d’époque tardive, des
lécythes et des kylikes attiques à figures noires de
style avancé, des figurines en terre cuite de facture
ionienne et d’autres objets datant de la 2e moitié du
6e siècle.
La dédicace de protomes une fois introduite dura
aussi longtemps que celle de statuettes votives com-
plètes. A Lindos, le petit dépôt d’ex-voto montre la
coutume d’en offrir en pleine vigueur au 3e siècle av.
J.-C. Il est fort probable qu’elle était plus usitée, ou
qu’elle se maintenait plus longtemps, dans certains
cultes que dans d’autres. Dans les inventaires de
divers sanctuaires, datant d’époques différentes, on
voit assez souvent des masques ou protomes figurer
parmi les ex-voto, mais naturellement il n’est ici
question que de protomes en métal précieux, v. IG,
I, ed. minor (1924), n° 276, 1. 6 (trésor d’Athéna
et des autres dieux, an 434—433 av. J.-C.: πρόσωπον
ύπάργυρον κατάχρυσον) ; IG, II, n° 766, 1. 4 (temple
athénien d’Asklépios, an 341 — 340 av. J.-C. : πρόσωπον
μικρόν ev καλιάδι προς τώι τοίχωι); IG, VII, η° 3°3>
1. 67—68 (sanctuaire d’Amphiaraos, près Oropos, vers
240 av. J.-C.: Μέλανος προσώπων ..., Βοίσκου πρόσ-
ωπον ...); IG, VII, η° 2424 (sanctuaire thébain,
vers l’an 100 av. J.-C.: Φερενίκα Άσκώνδου πρόσωπα
δύο ...). La littérature ancienne ne parle que très
rarement, et pour ainsi dire par hasard, de ce genre
d’ex-voto. Il faut se garder d’attacher trop d’impor-

tance à ces témoignages accidentels 1 et d’en tirer
des conclusions générales. C’est également à tort
que certains savants modernes ont voulu rapporter
les protomes en général aux divinités chthoniennes.
Cette manière de voir, sans doute erronée, se base soit
sur l’existence de trouvailles funéraires du genre
mentionné ci-dessus, soit sur le fait que certaines proto-
mes représentent des héros prenant part à un banquet.
Nous avons expliqué plus haut les protomes
lindiennes comme la représentation abrégée d’une
personne humaine équivalant à une image entière.
Cette interprétation se trouve confirmée par un
parallèle fourni par les documents épigraphiques.
Les républiques grecques honoraient souvent des
personnages de mérite par l’érection d’une statue,
placée dans quelque sanctuaire. C’était une cou-
tume parfaitement analogue à l’habitude qu’avaient
les particuliers de dédier des figurines représentant
leur personne. Or, dans certains cas l’État s’est
contenté de la dédicace de protomes ou de masques
en argent, qui constituait probablement un degré
d’honneur moins haut que l’érection d’une statue.
Dans l’île de Rhodes, on voit quelquefois les inscrip-
tions honorifiques mentionner προσώπων άργυρέων
άνάθεσις et ανδριάντων άνάθεσις l’une après l’autre,
v. IG, XII, 1, nos 58 et 77; AM 1900, p. 107, n° 106
(commencement du 2e siècle av. J.-C.); Maiuri,
Nuova silloge eiEgrafica di Rodi e Cos (1925), p. 40,
n° 26. De même que ces masques de métal précieux
tenaient lieu de statues, de même la dédicace des
modestes protomes en terre cuite a dû équivaloir à
des figurines représentant le personnage entier.
Le grand nombre de protomes conservées à Lindos
nous paraissent autant de témoignages de l’adoration
journalière de la déesse. De règle, elles sont percées
en haut d’un ou de deux petits trous. Nous croyons
donc qu’en implorant la protection divine pour leur
personne, les femmes les ont laissées dans le sanc-
tuaire, suspendues contre une paroi. De cette façon,
les protomes constituaient, aussi bien que les figurines,
un moyen pour perpétuer le contact entre l’adorante
et la divinité. Dans cet ordre d’idées, il faut men-
tionner encore un trait particulier. Le voile, qui dans
les protomes est encore plus prédominant que dans les
figurines, caractérise sans doute la personne représen-
tée comme femme mariée. Dans les peintures des
vases représentant le jugement de Paris, un tel voile
est attribué presque constamment à Héra ; cf. les
représentations d’Andromaché, épouse d’Hektor
(Furtwaengler-Reichhold, Griechische V asen-
1 Voir p. e. Lactantius Placidus ad Stat. Theb., XI, 644: ut
placaretur extincta (c’est-à-dire Érigoné, qui s’était pendue dans
un arbre), ora in humanam speciem formata in eadem arbore
suspendebant.
 
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