PREFACE.
on tombe sur l'endroit où Alexandre avec une poignée de foldats désait pour la troifîe-
nie sois la nombreufe Armée de Darius • puilTant attrait pour vouloir connoitre à sond
un personnage aussi rare qu'Alexandre, & pour lire fon Quinte-Curce de bon appétit.
Allons plus loin. Ne fera-ce pas un doux amufement pour les amateurs des bonnes
chofes, de voler d'un coup d'œil en tel endroit de la Terre qu'il leur plaira, de voir ce
qui s'eft pane de plus conlîderablc en cet endroit depuis la fondation du Monde? Il en:
bien doux de pouvoir, en même tems, faire pafter les morts en revue devant fon efprit,
citer les fiecles & les païs les plus reculez à comparoître fur la table de son cabinet,
taire le tour du Monde à fi peu de frais. Mais fi l'inftruction est le grand point de vue
de cet Ouvrage, peut-être ne fera-t-il pas moins bien reçu pour le plaifir des yeux»
Nous nous lommes attachez à bien peindre l'ordre, & à donner, pour ainfi dire, un
beau coloris à l'arrangement. Je fouhaiterois que l'on trouvât à l'ouverture de nos Car-
tes ce certain air qui srappe par un charme fecret, 8c que chacun conçoit bien fans qu'on
le puilTe exprimer. Telle eft l'aimable impreffion que caufe l'afpeft d'un édifice habile-
ment conduit j toutes les parties,' & tous les ornemens qui le compofent font par une
délicatelfe de lymmetrie & de proportion, une unité viable qu'on ne fe lafle point de
contempler. Telle eft encore, fi l'on veut, la vue d'un parterre dont le deflein fine-
ment inventé, & exécuté heureusement, donne je ne fai quel luftre, & quel relief à la
brillante variété des sseurs.
Quelque bien que l'on dife ici de ce travail, on n'a pas la témérité de le proposer
comme un ches-d'œuvre. 11 en est de ces matières comme des Sciences abftraites; plus
on creuse, plus on trouve j ce sont des mines qui ne s'épuisent jamais. Ce que nous
pouvons dire sans enfraindre les Loix de la modestie ,< c'eft qu'on n'a épargné ni sa
peine, ni son loisir à cette production. Comme le plan ést vaste, 8c que, d'une mê-
me enceinte, il cmbralfe trois grands sujets, il a fallu beaucoup d'application & d'assi-
duité pour le remplir. Le seul burin mssisoit pour occuper son homme, pas le moin-
dre trait qui ne nous ait parlé par les mains: ce n'a pas été là, néanmoins,le plus pé-
nible travail. On a été obligé de seuilleter tout ce qu'on a pu de Chronologues 8c
d'Hiftoriens, de les concilier dans leurs variations ; c'est ce qui ne se sait pas aisément,
encore bien heureux quand on n'y perd pas ses heures &ses jours. Les Auteurs anciens
nous ont plus embarrasse que les modernes. Ceux-là fe contredisent souvent à ne pou-
voir les mettre d'accord : il faut avec eux plus de combinaifons, plus de conjectures,
& après cela vous avez le chagrin de ne les raprocher que de loin. Les modernes font
plus unisormes, mais ils ne laiflent pas d'avoir aussi leurs oppofitions. Ainfi le Leéteur
voudra bien que Ton se décharge par cette raison-là des tranfpofitions, des anachronis-
mes, & des autres fautes qu'il rencontrera dans fon chemin jfaus à paner condamnation
pour celles qui viennent d'inadvertence, ou d'une lumière trop courte.
Après tout ce qu'on vient de dire de l'Ouvrage en général , la coutume voudroit qu'on
traitât séparément des trois parties qui le compofent. Il faudroit difeourir, à toute bride,
fur l'Hiftoire, sur la Chronologie, & fur la Géographie. Tout ce bel étalage préliminaire
ne coûteroit pas de grands efforts. Tant de gens ont écrit, parlons plus jufte, tant d'Au-
teurs fe font copiez les uns les autres fur cette matière ! Une goûte puifée à chacun de ces
canaux ouverts, à chacune de ces fourcespubliques,fuffiroit pour former un petit lac,&
pour composer un jufte volume. Mais on n'oferoit préfenter au Public ce mets devenu inli-
pide à force d'être fervi trop de fois. On quitte donc la route battue, & la taillant aux faiseurs
de longues & fatigantes Préfaces, on finira celle-ci par quelques Obfervations.
Comme nous avons cru que les figures, les empreintes, & les tailles-douces pouvoient
beaucoup contribuer à la beauté de nos Cartes, nous n'avons pas négligé cet agrément.
Prefque toutes les fucceflions chronologiques font exprimées par des portraits. On eft en
cela fondé en raifon,&la voici. La Carte n'a pas été inventée pour étudier en Ange, &pour
aprendre à ne connoitre les objets que par les feules idées. La Carte eft un fecours que l'on
fournit par les yeux à l'imagination, fauf à l'entendement après cela d'en faire fon prosit.
Par les traits gravez fur une Mappemonde nous nous arrangeons dans la tête les quatre par-
ties de la Teire, & par le moyen de cet arrangement un seul cerveau peut contenir dans fon
pedt efpace toute la vafte capacité duGlobe. Cela convient à la Géographie, dira-t-on ;
* z soit.
on tombe sur l'endroit où Alexandre avec une poignée de foldats désait pour la troifîe-
nie sois la nombreufe Armée de Darius • puilTant attrait pour vouloir connoitre à sond
un personnage aussi rare qu'Alexandre, & pour lire fon Quinte-Curce de bon appétit.
Allons plus loin. Ne fera-ce pas un doux amufement pour les amateurs des bonnes
chofes, de voler d'un coup d'œil en tel endroit de la Terre qu'il leur plaira, de voir ce
qui s'eft pane de plus conlîderablc en cet endroit depuis la fondation du Monde? Il en:
bien doux de pouvoir, en même tems, faire pafter les morts en revue devant fon efprit,
citer les fiecles & les païs les plus reculez à comparoître fur la table de son cabinet,
taire le tour du Monde à fi peu de frais. Mais fi l'inftruction est le grand point de vue
de cet Ouvrage, peut-être ne fera-t-il pas moins bien reçu pour le plaifir des yeux»
Nous nous lommes attachez à bien peindre l'ordre, & à donner, pour ainfi dire, un
beau coloris à l'arrangement. Je fouhaiterois que l'on trouvât à l'ouverture de nos Car-
tes ce certain air qui srappe par un charme fecret, 8c que chacun conçoit bien fans qu'on
le puilTe exprimer. Telle eft l'aimable impreffion que caufe l'afpeft d'un édifice habile-
ment conduit j toutes les parties,' & tous les ornemens qui le compofent font par une
délicatelfe de lymmetrie & de proportion, une unité viable qu'on ne fe lafle point de
contempler. Telle eft encore, fi l'on veut, la vue d'un parterre dont le deflein fine-
ment inventé, & exécuté heureusement, donne je ne fai quel luftre, & quel relief à la
brillante variété des sseurs.
Quelque bien que l'on dife ici de ce travail, on n'a pas la témérité de le proposer
comme un ches-d'œuvre. 11 en est de ces matières comme des Sciences abftraites; plus
on creuse, plus on trouve j ce sont des mines qui ne s'épuisent jamais. Ce que nous
pouvons dire sans enfraindre les Loix de la modestie ,< c'eft qu'on n'a épargné ni sa
peine, ni son loisir à cette production. Comme le plan ést vaste, 8c que, d'une mê-
me enceinte, il cmbralfe trois grands sujets, il a fallu beaucoup d'application & d'assi-
duité pour le remplir. Le seul burin mssisoit pour occuper son homme, pas le moin-
dre trait qui ne nous ait parlé par les mains: ce n'a pas été là, néanmoins,le plus pé-
nible travail. On a été obligé de seuilleter tout ce qu'on a pu de Chronologues 8c
d'Hiftoriens, de les concilier dans leurs variations ; c'est ce qui ne se sait pas aisément,
encore bien heureux quand on n'y perd pas ses heures &ses jours. Les Auteurs anciens
nous ont plus embarrasse que les modernes. Ceux-là fe contredisent souvent à ne pou-
voir les mettre d'accord : il faut avec eux plus de combinaifons, plus de conjectures,
& après cela vous avez le chagrin de ne les raprocher que de loin. Les modernes font
plus unisormes, mais ils ne laiflent pas d'avoir aussi leurs oppofitions. Ainfi le Leéteur
voudra bien que Ton se décharge par cette raison-là des tranfpofitions, des anachronis-
mes, & des autres fautes qu'il rencontrera dans fon chemin jfaus à paner condamnation
pour celles qui viennent d'inadvertence, ou d'une lumière trop courte.
Après tout ce qu'on vient de dire de l'Ouvrage en général , la coutume voudroit qu'on
traitât séparément des trois parties qui le compofent. Il faudroit difeourir, à toute bride,
fur l'Hiftoire, sur la Chronologie, & fur la Géographie. Tout ce bel étalage préliminaire
ne coûteroit pas de grands efforts. Tant de gens ont écrit, parlons plus jufte, tant d'Au-
teurs fe font copiez les uns les autres fur cette matière ! Une goûte puifée à chacun de ces
canaux ouverts, à chacune de ces fourcespubliques,fuffiroit pour former un petit lac,&
pour composer un jufte volume. Mais on n'oferoit préfenter au Public ce mets devenu inli-
pide à force d'être fervi trop de fois. On quitte donc la route battue, & la taillant aux faiseurs
de longues & fatigantes Préfaces, on finira celle-ci par quelques Obfervations.
Comme nous avons cru que les figures, les empreintes, & les tailles-douces pouvoient
beaucoup contribuer à la beauté de nos Cartes, nous n'avons pas négligé cet agrément.
Prefque toutes les fucceflions chronologiques font exprimées par des portraits. On eft en
cela fondé en raifon,&la voici. La Carte n'a pas été inventée pour étudier en Ange, &pour
aprendre à ne connoitre les objets que par les feules idées. La Carte eft un fecours que l'on
fournit par les yeux à l'imagination, fauf à l'entendement après cela d'en faire fon prosit.
Par les traits gravez fur une Mappemonde nous nous arrangeons dans la tête les quatre par-
ties de la Teire, & par le moyen de cet arrangement un seul cerveau peut contenir dans fon
pedt efpace toute la vafte capacité duGlobe. Cela convient à la Géographie, dira-t-on ;
* z soit.