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Chatelain, Henri Abraham; Gueudeville, Nicolas [Hrsg.]
Atlas Historique, Ou Nouvelle Introduction A l'Histoire, à la Chronologie & à la Géographie Ancienne & Moderne: Représentée dans de Nouvelles Cartes, Où l'on remarque l'établissement des Etats & empires du Monde, leur durée, leur chûte, & leurs differens Gouvernemens ... (Band 1): Contenant la Grèce, l'Histoire Romaine, Rome Moderne, Naples, la France, l'Espagne, & les Provinces Unies — Amsterdam, 1739

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https://doi.org/10.11588/diglit.9886#0034

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D I S S E R T A T I O N
SUR
L'HISTOIRE UNIVERSELLE.

L'HOMME a naturellement du panchant
pour connoître fon femblable, & il eft auffi
alerte là-deffus qu'il eft indiffèrent pour fe
connoître foi-même. D'où vient donc cet-
te bizarrerie ? L'homme a-t-il un démêlé? il prend
feu d'abord pour fon intérêt ; sa partie l'incommo-
de; il ne la fouffre qu]avec chagrin parmi les vivans,
& souvent il va julqu'à la fureur de l'envoyer avec
les morts. Encore un coup, donc, pourquoi nous
qui, à parler juste, ne sommes proprement touchez
que de nous-mêmes , avons-nous tant d'empresse-
ment pour {avoir ce que sont les autres? Avouons-
le à notre consusïon ; c'est que nous cherchons à
cacher nos désauts dans les soibleffes de nos fembla-
bles,& par un ressort machinal,mais sin,deramour-
propre,nous déguifons nos vices en louant & en
relevant leurs vertus.
On peut regarder cette avidité d'étudier l'hom-
me hors de foi-même, (bit par raport au paffé, soit
par raport au présent. Nous nous fentons une envie
iècrete d'être inftruits de ce que font nos contem-
porains ; de-là vient cette ardeur prefque générale
pour la Relation d'un Voyageur ; plus il vient de
loin , plus fon récit nous, amufe agréablement :
charmez d'aprendre les mœurs & les coutumes de
gens, qui font féparez de nous par un immenfè tra-
jet,nous comparons leur génie,leurs manieres,leurs
inclinations avec les nôtres ; nous nous plaignons,
ou nous les plaignons eux-mêmes, à mefure qu'ils
nous paroiffent plus ou moins heureux que nous ;
& cette occupation eft fi engageante, quon fouhai-
teroit qu'il n'y eût pas un endroit habité fur la Ter-
re , dont on ne fut parsaitement informé. 11 en va
de notre curiofité à l'égard des hommes qui ne
font plus, comme à l'égard des hommes qui sont.
11 eft facile de montrer que cette proportion n' est
point tirée, & qu'elle ne doit fon évidence qu'à la
Haifon de fes termes. Pour en venir à bout, sor-
mons-nous de tout le passé une idée à peu près sem-
blable à celle que nous nous sormons de toute la
Terre. Oui, ce passé est aussi-bien que la Terre
une vafte& immense étendue de païs: les fiecles,
les années, les mois, les semaines & les jours sont
comme les Royaumes, les Provinces, les Villes,
les Bourgs, &les Maisonsde ce grand Continent.
M 'en demanderez-vous la Mer ? c'eft l'Histoire.
En esset, THistoire n'est-elle pas comme un Océan,
*ur lequel nous nous embarquons pour voyager
d'âge en àge,pour aborder chez nosVoifins,je veux
<ure, aux Epoques les plus proches, pour aller
jusqu'aux extrémitez de ce Monde, j'entens pour
pénétrer jufqu'aux tems les plus anciens & les plus
reculez ? Ne vous imaginez pas que cette Mer fqit
mutile, & qu'elle ne ferve de rien pour le trafic.
C'eft par le moyen de l'Hiftoire que nous négocions
avec les morts. Ils nous envoyent leur f igeffe &

leur solie, leur {avoir & leur ignorance, leur poli-
teffe & leur groflief été, leur fcéiérateffe & leur pro-
bité , leurs bons & leurs mauvais exemples. Si nous
ne faifons pas un gros profit fur ces marchandifes ,
c'eft notre faute ; suir la perilleuse route que les
mauvais nous ont indiquée, & marcher fur les tra-
ces des vertueux, voilà des richesses qui, sélon les
principes de la saine Philofophie, & encore plus
îiùvant les règles du CJiristianisme, valent mieux
que tous les biens de la fortune. Le Commerce
est-il réciproque, dira-t-on, entre nous & les morts?
Sans doute.Ne leur renvoyons-nous pas la louange
& le blâme, Tcftime & le mépris ? rauvre & inu-
tile retour ! D'accord. C'eft encore moins que d'é-
changer quelques minuties de l'Europe, contre les
trésors de l'Inde ; mais pourquoi les morts sont-ils
plus délicats & plus dissiciles que les vivans ? Nos
Héros animez n'expofent-ils pas tous les jours leur
vie pour ce même phantôme de gloire, que l'on
sait sumer sur les tombeaux des llluftres désunts,
& dont on couronne les Maufolées des Grands-
hommes ?
Mais pouffons plus loin la métaphore & sallu-
sion du Passé avec la Terre. Tous les Géomètres
conviennent que la Terre a des bornes ; sa sigure
ronde & sphérique le veut ainsi : &de plus il eft
moralement conftant,que desNavigateurs ayant eu
affez de courage pour entreprendre de faire le tour
du Globe, ont eu le bonheur d'y réusfir. De mê-
me le Paffé ne remonte pas jufqu'à l'infini, nous
avons une Epoque fixe, la première & la mefure de
toutes les autres. C'eft cet admirable point, où,
après une révolution éternelle, il a plu au Souve-
rain Orginal de tirer tous les Etres du fein du
Néant,& les copier fur soi-même dans la perfonne
raifonnable de l'nommc.Mais il faut remarquer que,
quoique la Terre avec fon atmolphere soit conte-
nue dans un efpace limité de matière étherée, ce
Globe n'eft pourtant pas connu dans toutes ses par-
ties , ni dans tous ses endroits. Il y a beaucoup de
lieux jufqu'à préfent inabordables. Il reste à décou-
vrir pluueurs païs jufqu'oùpeut-être la curiosité,
l'inquiétude & l'avarice des hommes n'arriveront
jamais. C'eft la dernière convenance que j'allégue-
rai entre le Paffé & la Terre, & c'est ausfi celle qui
sait le plus à mon sujet.
Dans ce grand efpace de tems,qui a coulé depuis
la sondation du Monde jufqu'à nous,il y a des sie-
cles que l'Histoire nous rend comme présèns. On
voyage dans ces ficelés comme dans des païs bien
habitez ; à chaque pas qu'on avance, l'on découvre
de nouveaux objets : ce sont des terres bien culti-
vées , à peine y trouvez-vous quelques landes : les
routes y font également fïïres, droites & bien apla-
nies ; le Voyageur sait par-tout où il eft > & il n'a.
prehende point de s'égarer. C'eft dans ces siecîes
A. 2 êclsi^
 
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