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Chatelain, Henri Abraham; Gueudeville, Nicolas [Hrsg.]
Atlas Historique, Ou Nouvelle Introduction A l'Histoire, à la Chronologie & à la Géographie Ancienne & Moderne: Représentée dans de Nouvelles Cartes, Où l'on remarque l'établissement des Etats & empires du Monde, leur durée, leur chûte, & leurs differens Gouvernemens ... (Band 1): Contenant la Grèce, l'Histoire Romaine, Rome Moderne, Naples, la France, l'Espagne, & les Provinces Unies — Amsterdam, 1739

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https://doi.org/10.11588/diglit.9886#0210

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EXPLICATION DES CARTES D'ESPAGNE.

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étoît durant sa liberté. En esset, tous ces petits Royaumes ,&
toutes ces petites Principautez repréfentoient aflez bien la pre-
mière diltribution de cette contrée. Il efl allez difsicile de conce-
voir comment tant de Maîtres amoitieux, & toujours armez,
ont pu fe maintenir fi long-tems, comment ils ne fe font pas
abforbez plutôt? Cela fait naitre un grand préjugé en faveur
des Efpagnols. Chaque Province aimoit Ion gouvernement,
chaque Peuple étoit attaché à l'on Souverain, duquel il défen-
doit vaillamment les intérêts. Mais il femble aulfi que toute
la Nation fe plaifoit dans cette Puilfance diverlifiée, comme
li elle y eût trouvé encore une ombre, & un relie de son an-
cienne liberté. Le teins a privé l'Elpagne de cette foible dou-
ceur. Séparée en deux Etats elle n'obéit plus qu'à deux Rois.
Il n'y a pas fort long-tems qu'elle n'en avoit qu'un. Le Por-
tugal, que le torrent avoit entraîné, a eu le bonheur de fe dé-
tacher de la maffe, & de fe rendre à foi-même. Tirons la con-
clulion de tout ceci. C'efl que depuis que les Société?, le font a-
visées de fe livrer, chacune à un feul Maître, j'en ignore la
première époque, le pouvoir des Souverains s'eit toujours ac-
cru , & les fujets se sont ensoncer de plus en plus dans la dé-
pendance & dans la soumililon. Puissent les Républiques, «Se
les Etats libres prendre leurs mesures là-delsus!
La féconde Carte est une chaîne Chronologique de tous les
Princes qui ont régné en Espagne depuis la décadence de l'Em-
pire Romain. Cette Table donne quelque agrément à l'œil par
les portraits,mais elle doit causer un plaifir solide & utile à
l'elprit. Elle a dû coûter beaucoup de tems& de travail à l'Au-
teur. Ce n'a pu être qu'avec une application très assidue qu'on
a débrouillé ce cahos d'bistoire,& qu'on lui a donné une li belle
sorme. Il n'y apoint de Chronologie plus embrouillée que celle-
ci. C'était un champ de ronces & d'épines à désricher, c'étoit
lin chemin seabrenx, & disficile à tenir par ses coupures &par
les détours. S'il y a de la peine à déterrer les anciens Monar-
ques d'une seule Couronne, & d'une feule succession ; li l'on
rencontre dans cette recherché des espaces à remplir, & des op-
politions difficiles à concilier, combien plussefera-t-ontrouvé
dans l'embarras pour éclaircirune fuite de fiecles toute herilFée
de révolutions, ôc de changemens ? 11 est vrai qu'on a fixé aux
Rois Sueves le premier point de cette enchainure, tout ce qui
est au delà n'étant que ténèbres , & que confulion. Mais auffi
l'on a raffemblé depuis Hermenric le premier de ces Conqué-
rans, tous les Princes qui ont porté la Couronne en Efpagne
jufqu'aux deux jeunes Monarques quise dîfputent aujourd'hui
cette riche Toilbn. Ainlï cette Carte eft un alfemblage, & un
tiflu de tous ces Souverains depuis le commencement du cin-
quième fiecle. Cet aspedt eft d'autant plus agréable que les objets
en sont diversifiez. On ne fe satigue point la vue fur une longue
&ennuyeufe tirade de Princes iflus d'une même tige, ou polies-
lèurs d'un même Etat. On parte dans cette Carte de Royaume eii
Royaume, &deNation en Nation. L'on y voit même des Prin-
ces Mahometaus en parallèle avec les Princes Chrétiens, ce que
je croi lingulier. Il eft bon pourtant d'avertir que la Chrono-
gie des Rois Mores eft fort imparfaite; on ne la commence
qu'au treizième fiecle, & on ne donne que celle de Grenade.
C'ess: qu'il eft impoffible de déveloper le refte, à moins qu'à l'i-
mitation de plulîeurs Ecrivains, on ne donnât au lieu d'histoire ,
des si6tions & des romans sur ces Insidèles. Au relie, notre Au-
teui a pofé au milieu de son édisice deux colonnes de remar-
ques blftariques ; l'une donne une notion générale de toute
P. istoire d'Efpagne, & l'autre une idée de chaque Royaume
en particulier.
La troifieme Carte n'eft pas moins inftrnclive que la précéden-
te elle eft beaucoup plus amusanie. Outre que fon ordre ,
& son arrangement frappent la vue,&engagent l'imagination,
.a matière ci t curieufe, & de celles dont on s'instruit avec quel-
que sorte d'avidité. Lors qu'on pense à la vafte étendue de la
Monarchie d'Espagne , il eft naturel de se démander, comment
cet immense Corps, dont les membres sont lï dispersez, peut
i'ire gouverné par un feul mobile. Effectivement, il est allez
remarquable que la même tête inssue tout à la sois dans les qua-
trë parties du Monde. Commentcommuniquerunmêmeefprit
les Nations, dont les ufages & les mœurs sont ausfi disse-
rens nue les climats ? Cette Carte nous apprend comment cela
se sait. On y voit tous les Conseils du Roi d'Espagne, chacun
ayant sa sigure & son explication. C'est nous peindre ce Monar-
que eu Argus: fes Conseils en si grand nombre, ce font les
yeux de son Gouvernement. H en a tout autour de foi, & par
la lumière de ces yeux il découvre ses Etats, fous quelque clî-
r at qu'ils foient fituez,_& il fait régner fa volonté dans tous
• endroits de fon adminiftration. De tous les curieux qui ver-
it cette Carte, il y en aura peu à qui elle n'imprimed'abord
line haute idée de la domination Espagnole. Qu'il eft glorieux,
i: i-t-on, de donner des Loix à rant de peuples, & de corn-
tander à tant de sortes de fujets! Ce n'eft pas-là ce qui arrête-
le plus les efprits, qui dédupez de la chimère, aiment qu'on
juge des chofes solidement. Ce petit troupeau admirera leren*

versement des premières institutions. Quand on s eft avisé de
le donner des Maîtres , on ne prévoyoit guère qu'un feul hom-
me difpoferoit louverainement d'un grand nombre d.e Sôcietcz
écartées les unes des autres par de larges efpaces de terre ou; dé
mer. Ces Conventions originales & primitives étoient d'obéir
à condition d'avoir un Protecteur qui tût compatriote ,& qui^
vivant au milieu de fes fujets, veillât inceflamment, & par foi-
même j à leur bonheur, & à leur fûreté. Les fondateurs d'une
Monarchie ou d'unEtat étoient fortéloignez de s'imaginer qu'on
envoyeroit un jour de cinq cens, de mille, de deux mille lieues à
leur polterité, un Gouverneur qui n'ayant ce porte que pour quel-
ques années, le regarde comme une occafion de faire fortune, & fe
propofe pour le principal but de là régence, de bien piller, & de
s'enrichir. Au refte, le Roi d'Efpagne n'a pas une autorité abfolue
sur tous ces Confeils, gravez dans norre Carte. Ceux de la Croi-
sade & de l'Inquifition appartiennent proprement à laCourdeRo-
me, & refibrtisfent au Pape en dernier lieu.Ces deux Confeils font
comme les deux rênes d'une bride pour l'autorité Royale, mais
au malheur & non pas à l'avantage de la Nation. Ce qu'il y a de bi-
zarre,c'cst que ce sont les Monarques eux-mêmes qui ont deman-
dé ce frein; l'ambition le céda pour-lors à un zèlesurieux & barba-
re , & ils ont mieux aimé preferire une borne à leur pouvoir que de
ne pas tourmenter leurs sujets.Ensin,l'on trouveert racourci dans
cette Carte la nature du gouvernement d'Espagne, & la manière
dont on y dispensela Justice.A l'exception de trois Villes,les gou-
vernemens & les charges ne s'y vendent point. Cet usage, comme
l'observe notre Auteur, à ses inconvéniens ; mais je le croi beau-
coup plus juste, & plus équitable, que la vénalité des emplois.
La quatrième Carte montre les principales demeures des Rois
d'Espagne , & mène jusque dans l'intérieur des Palais de ces
Monarques. L'on nous avertit qu'ils nesontpas logezavecune
magnisicence proportionnée à leur grandeur. Ce n'est pas cequ'il
y a de moins louable dans un Souverain. S'il néglige cet article
pour épargner le bien de ses sujets, il eft logé plus glorieuse-
ment dans un édifice commun, que dans le plus fuperbe château.
Fâcheux Gouvernement où le Monarque, par la magnisicence
de fes maifons, par la richefle, & par la fomptuofité de fès
ameublemens , multiplie les hôpitaux dans fon Royaume ' Il est
vrai que le peuple se prend par cet éclat. Il s'admire foi-même
dans ces ches-d'œuvres & dans ces miracles de l'art, qui forment
la demeure & le séjour de fes Rois ; & ne fâchant rien autre part
qui en approche, il fe croit le plus heureux de tous les peuples.
Mais cela ne prouve rien pouf le Monarque. Le peuple eft
un imbeeille qui prodigue le réel & le solide pour l'imaginaire,
qui, ne connoissant point fes intérêts, prodigue jusqu'à son
neceflaire pour un peu de fumée : n'eft-ce pas confeience de le)
tromper ? Notez qu'on nous dit dans cette Carte que l'Efcurial
coûta trente millions à Philippe Second. Combien en falloit-il,
donc, à cet orgueilleux Monarque pour se loger , conformé-
ment à fa grandeur? Notre Carte a raifon pourtant. Philippe
Second ne favoit pas ce que le premier Roî du Monde, tel
qu'il fe croyoit, devoit dépenfer pour fon logement. Trente
millions ? La belle bagatelle ! Ce n'étoitpas seulement de quoi
sournir aux aqueducs, aux canaux, & à tous les ouvrages sou-
terrains d'une maisoti telle qu'il la salloit à un chercheur de
Monarchie universelle. Entrons au dedans du Palais. Le Cé-
rémonial en eft réjouïflant. La liberté domestique en eft tout-
à-sait bannie, & les Rois y obfervent, comme dans une vître,
la règle d'une exacte & indifpcnfable gravité. Le Monarque
parle, fe montre, fort,dépense par étiquette,il n'y a pas juf-
qu'à fes heures conjugales, qui entrent dans les exercices régu*
liers du Royal Couvent. Lesilencemêtne&la folitude régnent
au sond de la demeure, ce qui en rend la majesté plus rcfpec-
table, ce qui vous imprime une vénération presque religieufe
pour cet augufte lieu. Ce qui me paroît plus raisonnable, c'est que
les Gardes se tiennent hors le Palais. Le Roi n'est pas sans celle
environné de gens qui lui reprochent fa crainte, & vivant avec
plus de consiance, on ne lui ôtepas une des plus grandes douceurs
delà liberté. Les Grands y trouvent aussi leur compte. Ilstraver-
sent les appartemens sans rencontrer d'obstacles ,& ils abordent
librement la personne de Sa Majesté. Le privilège de la cles d'or
& celui de se couvrir devant le Maître sont de hautes sortunes
pour ces Seigneurs courtisans; c'eft tout ce qui leur reste de leur
ancienne liberté, peut-être encore ne le conferveront-ils que
difficilement. Le reste de cette même Carte est un dénombre-
ment des riches & sameux Ordres militaires d'Efpagne, avec tou-
tes leurs dépendances; des Archevêchez avec leurs SufFragans ,
& des Etats annexez en Europe à la Monarchie d'Efpagne.
Les deux fuivantes n'en cèdent rien aux autres : L'une pré-
sente en un feul tout,les parties rassemblées de ce vafte Etat,
& l'autre, qui est la'derniere, contient la deseription de l'£s-
pagne Américaine, avec toutes les mftructions néceflairespouf
son gouvernement. J'y renvoie le Lecteur fans paraphrase &
sans préambule; toutes mes glofes neseroiett qu'arrêter fa pa-
tience, & retarder fon utilité.

DISSER-
 
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