GAZETTE DES BEAUX-ARTS. 13
exploitèrent avec,un égal succès, sinon par des procédés semblables, la
peinture des Madones et des Têtes de dévotion. La Vierge au lis de Carlo
DoLcr, tableau signé et daté, Carolus Dolcius, fac. J642, gravé dans la
galerie Dusseldorf, a toute la finesse de couleur et toute la douceur de sen-
timent que prisent ses admirateurs. La Sainte Apolline de Sassoferrato,
tenant sa dent entre des tenailles, la tête penchée sur un cou perpendi-
culaire est pleine de ce caractère extatique que le maître puisait dans
l'imitation des anciennes figures, et peinte avec une tranquillité qui a son
charme. Ces tableaux, ainsi que d'autres, sont contestés, il est vrai, par
quelques-uns des amateurs qui visitent le musée; pour Carlo Dolci princi-
palement, on cite un original de la Vierge au lis qui se trouve au palais
Corsini à Rome. Mais à Montpellier on ne veut accepter que les attribu-
tions données par M. Fabre, avec toute l'autorité qui lui appartenait.
L'école française du xvne siècle, contemporaine des maîtres que je
viens de citer, et particulièrement Poussin, son plus illustre interprète,
qui eut avec eux de grands rapports, a ici plusieurs ouvrages importants,
sujets d'histoire et de mythologie, paysages, esquisses et portraits, d'une
valeur inégale sans doute, mais où l'on pourra suivre les diversités de sa
peinture et mesurer la science de composition, le dessin antique, la force
d'expression qu'il sut obtenir. La Mort de sainte Cécile, tableau gravé en
1761, comme faisant partie du cabinet de M. le bailli de Breteuil, ambas-
sadeur de Malte à Rome, offre un intérêt tout particulier et peut soulever
bien des questions par la différence qu'il présente avec tous les autres
tableaux de Poussin. M. Clément, dans une notice publiée par la Revue
des Deux Mondes, a avancé que c'était le seul tableau authentique qu'on
pût attribuera sa première manière, antérieure au voyage de Rome qu'il fit
en 1624 : il y trouve quelque chose de presque gothique, sentant plus
Jean Cousin que Raphaël. Une telle opinion me paraît prise à distance.
Bien que la peinture française, contemporaine de la jeunesse de Poussin,
soit peu connue, il est permis de s'assurer que les tableaux de Jean Cousin,
mort avant la naissance de Poussin, et ceux de Quentin Varin, de Ferdi-
nand Helle et de Lallemand, chez lesquels il travailla, n'ont pu lui inspi-
rer rien de semblable à la Sainte Cécile;]'y retrouverais plutôt l'influence
des Vénitiens qu'il accosta un moment, et surtout la manière du Domini-
quin, qu'il aima toujours de préférence. Le maître de Bologne avait fait
sur le même sujet, traité en grand, mais d'une façon analogue, un tableau
qui a été gravé par Pasqualini, en 1622, et par Frédéric Greuter. On sera
plus édifié sur le style propre à Poussin, en regardant le Baptême du
Christ, Eliézer et Rébecca, le Portrait du cardinal Rospigliosi, et un
de ces paysages où la campagne de Rome revêt tant de grandeur.
exploitèrent avec,un égal succès, sinon par des procédés semblables, la
peinture des Madones et des Têtes de dévotion. La Vierge au lis de Carlo
DoLcr, tableau signé et daté, Carolus Dolcius, fac. J642, gravé dans la
galerie Dusseldorf, a toute la finesse de couleur et toute la douceur de sen-
timent que prisent ses admirateurs. La Sainte Apolline de Sassoferrato,
tenant sa dent entre des tenailles, la tête penchée sur un cou perpendi-
culaire est pleine de ce caractère extatique que le maître puisait dans
l'imitation des anciennes figures, et peinte avec une tranquillité qui a son
charme. Ces tableaux, ainsi que d'autres, sont contestés, il est vrai, par
quelques-uns des amateurs qui visitent le musée; pour Carlo Dolci princi-
palement, on cite un original de la Vierge au lis qui se trouve au palais
Corsini à Rome. Mais à Montpellier on ne veut accepter que les attribu-
tions données par M. Fabre, avec toute l'autorité qui lui appartenait.
L'école française du xvne siècle, contemporaine des maîtres que je
viens de citer, et particulièrement Poussin, son plus illustre interprète,
qui eut avec eux de grands rapports, a ici plusieurs ouvrages importants,
sujets d'histoire et de mythologie, paysages, esquisses et portraits, d'une
valeur inégale sans doute, mais où l'on pourra suivre les diversités de sa
peinture et mesurer la science de composition, le dessin antique, la force
d'expression qu'il sut obtenir. La Mort de sainte Cécile, tableau gravé en
1761, comme faisant partie du cabinet de M. le bailli de Breteuil, ambas-
sadeur de Malte à Rome, offre un intérêt tout particulier et peut soulever
bien des questions par la différence qu'il présente avec tous les autres
tableaux de Poussin. M. Clément, dans une notice publiée par la Revue
des Deux Mondes, a avancé que c'était le seul tableau authentique qu'on
pût attribuera sa première manière, antérieure au voyage de Rome qu'il fit
en 1624 : il y trouve quelque chose de presque gothique, sentant plus
Jean Cousin que Raphaël. Une telle opinion me paraît prise à distance.
Bien que la peinture française, contemporaine de la jeunesse de Poussin,
soit peu connue, il est permis de s'assurer que les tableaux de Jean Cousin,
mort avant la naissance de Poussin, et ceux de Quentin Varin, de Ferdi-
nand Helle et de Lallemand, chez lesquels il travailla, n'ont pu lui inspi-
rer rien de semblable à la Sainte Cécile;]'y retrouverais plutôt l'influence
des Vénitiens qu'il accosta un moment, et surtout la manière du Domini-
quin, qu'il aima toujours de préférence. Le maître de Bologne avait fait
sur le même sujet, traité en grand, mais d'une façon analogue, un tableau
qui a été gravé par Pasqualini, en 1622, et par Frédéric Greuter. On sera
plus édifié sur le style propre à Poussin, en regardant le Baptême du
Christ, Eliézer et Rébecca, le Portrait du cardinal Rospigliosi, et un
de ces paysages où la campagne de Rome revêt tant de grandeur.