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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 5.1860

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Nr. 3
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Viardot, Louis: De l' école hollandaise
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https://doi.org/10.11588/diglit.16990#0154

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DE L'ÉCOLE HOLLANDAISE

« L'art, a dit le grand chancelier Bacon, c'est l'homme ajouté à la
nature, ars est liomo additus naturœ1. Il est impossible de mieux définir
l'art panthéiste de la Hollande» Tous les peintres, dans cette patrie de
Spinosa, semblent s'être bornés à voir la nature, à l'aimer, à la com-
prendre et à la traduire, chacun avec son sentiment et son goût, en .s'y
ajoutant. Ceux mêmes d'entre eux qui ont étendu jusqu'à l'Italie le cercle
de leurs études, Both, Berghem, Pynacker, Karel-Dujardin, n'ont fait,
au retour, que mêler et fondre le souvenir des contrées méridionales avec
les vues réelles qu'ils retrouvaient sous leurs yeux. Mais cette espèce de
règle commune est plus frappante encore chez les peintres hollandais qui
n'ont point cherché hors de leur pays des inspirations et des modèles.
Pour en trouver une preuve manifeste et palpable, il suffît de traverser,
par divers temps et à diverses heures quelques fêtes de la Hollande.

Rencontrez-vous, par une journée sombre, un paysage austère où la
nature du Nord étale ses duretés et ses tristesses, avec un ravin, une
cascade, un vieil arbre abattu, sans troupeaux , sans bergers, montrant à
peine, au lointain, quelque chétive cabane, isolée, solitaire, où l'on aurait
regret à vivre? Vous dites aussitôt : « Ah ! voici l'amant de la mélancolie,
Jacques Ruysdaël. » Vous trouvez-vous, peu après l'aurore, sur les bords
d'un fleuve ou d'un canal où glisse une voile blanche ; au delà, s'élèvent
l'église et les maisons d'une petite ville; en deçà, de grosses vaches
paresseuses ruminent dans l'herbe grasse des prairies, tandis qu'à tra-
vers des lambeaux de nuages déchirés, les rayons du splendide soleil
matinal inondent tous les objets de leurs feux? Vous vous écriez: «Voici le
créateur de la lumière, Albert Cuyp. » Un peu plus tard, pendant le repos
de midi, vous apercevrez un verger paisible et verdoyant où chaque arbre
étend son ombre sur la pelouse, où, sous chaque ombre repose une
vache, un cheval, un âne, une chèvre, un mouton, dans leurs attitudes

1. A cette heureuse définition, je voudrais faire un léger amendement et dire :
« L'art c'est l'homme s'ajoutant à la nature. »
 
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