GAZETTE DES BEAUX-ARTS. 15
de ces étoffes blanches où excellait le maître ; et une jeune fille défilant au
fond de son cadre, mince, souple et brunie, avec l'expression d'un séra-
phin, l'attitude et l'ajustement d'une infante.
L'Adoration des bergers, de Francisco Rizi, est une immense compo-
sition peinte avec éclat, où percent encore, quoique dégénérés, les mérites
de la peinture espagnole, les lumières argentines, les draperies abon-
dantes. C'est toutefois une œuvre moins sérieuse et moins bonne à don-
ner pour modèle à des élèves que la Vierge acquise aussi de la galerie
Soult. Elle est attribuée à Sarabta, peintre de Séville, connu pour l'habi-
leté de ses pastiches. Mais cela ne peut pas nous tenir lieu des'\'élasquez
et des Murillo qui nous manquent.
Passons maintenant dans les Pays-Bas, et voyons les écoles qui, au
xvne siècle, y poussèrent l'art dans des voies nouvelles, et produisirent,
dans des genres différents, des œuvres auxquelles l'Italie ne pouvait plus
rien opposer. Rubens, d'abord, qui raviva la peinture historique en lui
donnant pour idéal l'imitation d'une nature exubérante, se fait reconnaître
dans un Crucifix d'une expression de douleur intense, aux p'ieds duquel
gémit une Madeleine dont les pleurs n'ont point amaigri les traits. On
rapporte que Fabre a fait lui-même la découverte de cette figure, cachée
autrefois sous un énorme repeint ; on peut juger de l'habileté avec laquelle
il l'a restaurée. Mais voici trois autres morceaux du maître : le Portrait
du, peintre Franck, exécuté dans cette manière libre et vigoureuse, en
même temps que soignée, dont les portraits de son pays ne lui avaient
pas donné l'exemple ; un paysage empreint de la chaleur, sinon de la no-
blesse, des sites italiens une esquisse, allégorie d'une guerre religieuse,
qui, mieux que beaucoup de toiles plus travaillées, révèle la fougue de
son génie.
A côté, il faut examiner Van-Dyck, le plus grand de ses élèves, qui
avait su ennoblir et spiritualiser le style .de son maître dans une étude
plus complète de l'Italie et par un contact avec l'Angleterre. La Vierge
et l'Enfant Jésus, aux pieds duquel s'incline Madeleine en présence de
David et de saint Jean-Baptiste, est un exemple remarquable de l'expres-
sion plus tendre, de la couleur plus vénitienne et des formes plus déli-
cates dans leur mollesse, qui furent dans sa manière. C'est une répétition,
de même grandeur, du tableau du Louvre où la tradition voyait les por-
traits de l'artiste et de sa maîtresse; il en existe d'autres répétitions à
Berlin et ailleurs. On peut juger encore de la souplesse de ses muscles
et de la moiteur de ses chairs dans une petite Madone sur cuivre, et dans
une main, fragment d'un tableau détruit, que Fabre gardait sans doute
comme modèle.
de ces étoffes blanches où excellait le maître ; et une jeune fille défilant au
fond de son cadre, mince, souple et brunie, avec l'expression d'un séra-
phin, l'attitude et l'ajustement d'une infante.
L'Adoration des bergers, de Francisco Rizi, est une immense compo-
sition peinte avec éclat, où percent encore, quoique dégénérés, les mérites
de la peinture espagnole, les lumières argentines, les draperies abon-
dantes. C'est toutefois une œuvre moins sérieuse et moins bonne à don-
ner pour modèle à des élèves que la Vierge acquise aussi de la galerie
Soult. Elle est attribuée à Sarabta, peintre de Séville, connu pour l'habi-
leté de ses pastiches. Mais cela ne peut pas nous tenir lieu des'\'élasquez
et des Murillo qui nous manquent.
Passons maintenant dans les Pays-Bas, et voyons les écoles qui, au
xvne siècle, y poussèrent l'art dans des voies nouvelles, et produisirent,
dans des genres différents, des œuvres auxquelles l'Italie ne pouvait plus
rien opposer. Rubens, d'abord, qui raviva la peinture historique en lui
donnant pour idéal l'imitation d'une nature exubérante, se fait reconnaître
dans un Crucifix d'une expression de douleur intense, aux p'ieds duquel
gémit une Madeleine dont les pleurs n'ont point amaigri les traits. On
rapporte que Fabre a fait lui-même la découverte de cette figure, cachée
autrefois sous un énorme repeint ; on peut juger de l'habileté avec laquelle
il l'a restaurée. Mais voici trois autres morceaux du maître : le Portrait
du, peintre Franck, exécuté dans cette manière libre et vigoureuse, en
même temps que soignée, dont les portraits de son pays ne lui avaient
pas donné l'exemple ; un paysage empreint de la chaleur, sinon de la no-
blesse, des sites italiens une esquisse, allégorie d'une guerre religieuse,
qui, mieux que beaucoup de toiles plus travaillées, révèle la fougue de
son génie.
A côté, il faut examiner Van-Dyck, le plus grand de ses élèves, qui
avait su ennoblir et spiritualiser le style .de son maître dans une étude
plus complète de l'Italie et par un contact avec l'Angleterre. La Vierge
et l'Enfant Jésus, aux pieds duquel s'incline Madeleine en présence de
David et de saint Jean-Baptiste, est un exemple remarquable de l'expres-
sion plus tendre, de la couleur plus vénitienne et des formes plus déli-
cates dans leur mollesse, qui furent dans sa manière. C'est une répétition,
de même grandeur, du tableau du Louvre où la tradition voyait les por-
traits de l'artiste et de sa maîtresse; il en existe d'autres répétitions à
Berlin et ailleurs. On peut juger encore de la souplesse de ses muscles
et de la moiteur de ses chairs dans une petite Madone sur cuivre, et dans
une main, fragment d'un tableau détruit, que Fabre gardait sans doute
comme modèle.