GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
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sections des surfaces courbes, — de la grandeur des figures dans le tableau, — la théorie
des ombres au flambeau et au soleil, et celle de la réflexion dans l'eau. Ce sont là des
connaissances élémentaires, d'un usage journalier, d'une compréhension facile,pour les-
quelles il paraît incroyable que l'on puisse avoir recours au perspecteur, tant il est aisé
de se les donner soi-même.
La perspective des plafonds et la décoration théâtrale ont fourni à M. Sutter des
observations curieuses. On sait à quel point de perfection ces deux arts ont été poussés
en Italie. C'est aussi en Italie que M. Sutter les a étudiés. Mais si pour la décoration
théâtrale la France aujourd'hui n'a plus rien à envier à ses voisins d'outre-mont, il n'en
est pas de même pour l'art du plafonnement, art si utile cependant à une époque où la
construction de grands édifices prépare de vastes surfaces à la peinture décorative.
Le Traité de perspective de M. Sutter, à l'utilité incontestable de ces sortes d'ou-
vrages, joint le mérite de quelques innovations heureuses, et un luxe typographique
dont les publications d'art ont raison de ne plus vouloir se passer aujourd'hui.
LÉON LAGRANGE.
Biblia pauperum, reproduite en fac-similé sur un des exemplaires du
British Muséum, avec une introduction historique et bibliographique,
par J. Ph. Bergeau. — London, G. R. Smith, royal hto, 1859.
L'intérêt qui s'attache à la plus grande découverte du temps moderne, à celle qui a
inauguré toutes les autres, à la découverte de l'imprimerie enfin, a toujours fait recher-
cher avec avidité par les bibliographes les livres d'images ou livres xylographiques
gravés pendant les cinquante années qui ont précédé l'invention de Gutenberg et de ses
élèves. Une ville de Hollande, Haarlem, dispute à Mayence et à Strasbourg l'honneur,
non d'avoir donné naissance à Gutenberg, mais d'avoir vu tenter les premiers essais
d'imprimerie en caractères mobiles ; et ces essais tentés par Laurent Coster auraient,
suivant les Hollandais, précédé de vingt ans les travaux de Gutenberg. C'est là une
question trop complexe pour qu'il soit possible delà débattre ici, mais nous ne pouvons
moins faire que de l'énoncer à l'occasion du fac-similé de la Bible des Pauvres que
M. Berjeau vient de reproduire en son entier pour la première fois. Ce livre xylogra-
phique extrêmement rare, fort curieux et souvent mentionné par les bibliographes
depuis la fin du siècle dernier, était si peu connu en réalité que sa reproduction com-
plète était devenue nécessaire à l'histoire de l'imprimerie aussi bien qu'à celle de la
gravure. Dans l'introduction anglaise qui précède les fac-similé des 40 gravures in-folio
dont se compose ce livre, M. Berjeau rectifie les erreurs historiques et bibliographiques
commises par Heinecken et adoptées, pour la plupart, par Ottley et M. Sotheby, dans
ses Principia Ttjpographica; il rend au livre son titre de Biblia Pauperum qu'on a contesté,
allongé, dénaturé; il réduit à deux éditions les cinq mentionnées par Heinecken, et
portées à huit au moins par M. Sotheby; il indique Jean Van Eyck comme l'auteur de
la plupart des dessins et Laurent Coster très-probablement comme le graveur; il donne
pour la première fois en Angleterre, le résumé des opinions des bibliographes allemands
et hollandais sur les livres xylographiques en général et la Biblia Pauperum en parti-
culier; il nomme Wohlgemuth, le maître d'Albert Durer, comme l'auteur des dessins
de la 2e édition de la Biblia Pauperum, dont on ne connaît qu'un seul exemplaire apporté
de Wolfenbuttel à la Bibliothèque nationale de Paris, et qui comprend 50 planches au
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sections des surfaces courbes, — de la grandeur des figures dans le tableau, — la théorie
des ombres au flambeau et au soleil, et celle de la réflexion dans l'eau. Ce sont là des
connaissances élémentaires, d'un usage journalier, d'une compréhension facile,pour les-
quelles il paraît incroyable que l'on puisse avoir recours au perspecteur, tant il est aisé
de se les donner soi-même.
La perspective des plafonds et la décoration théâtrale ont fourni à M. Sutter des
observations curieuses. On sait à quel point de perfection ces deux arts ont été poussés
en Italie. C'est aussi en Italie que M. Sutter les a étudiés. Mais si pour la décoration
théâtrale la France aujourd'hui n'a plus rien à envier à ses voisins d'outre-mont, il n'en
est pas de même pour l'art du plafonnement, art si utile cependant à une époque où la
construction de grands édifices prépare de vastes surfaces à la peinture décorative.
Le Traité de perspective de M. Sutter, à l'utilité incontestable de ces sortes d'ou-
vrages, joint le mérite de quelques innovations heureuses, et un luxe typographique
dont les publications d'art ont raison de ne plus vouloir se passer aujourd'hui.
LÉON LAGRANGE.
Biblia pauperum, reproduite en fac-similé sur un des exemplaires du
British Muséum, avec une introduction historique et bibliographique,
par J. Ph. Bergeau. — London, G. R. Smith, royal hto, 1859.
L'intérêt qui s'attache à la plus grande découverte du temps moderne, à celle qui a
inauguré toutes les autres, à la découverte de l'imprimerie enfin, a toujours fait recher-
cher avec avidité par les bibliographes les livres d'images ou livres xylographiques
gravés pendant les cinquante années qui ont précédé l'invention de Gutenberg et de ses
élèves. Une ville de Hollande, Haarlem, dispute à Mayence et à Strasbourg l'honneur,
non d'avoir donné naissance à Gutenberg, mais d'avoir vu tenter les premiers essais
d'imprimerie en caractères mobiles ; et ces essais tentés par Laurent Coster auraient,
suivant les Hollandais, précédé de vingt ans les travaux de Gutenberg. C'est là une
question trop complexe pour qu'il soit possible delà débattre ici, mais nous ne pouvons
moins faire que de l'énoncer à l'occasion du fac-similé de la Bible des Pauvres que
M. Berjeau vient de reproduire en son entier pour la première fois. Ce livre xylogra-
phique extrêmement rare, fort curieux et souvent mentionné par les bibliographes
depuis la fin du siècle dernier, était si peu connu en réalité que sa reproduction com-
plète était devenue nécessaire à l'histoire de l'imprimerie aussi bien qu'à celle de la
gravure. Dans l'introduction anglaise qui précède les fac-similé des 40 gravures in-folio
dont se compose ce livre, M. Berjeau rectifie les erreurs historiques et bibliographiques
commises par Heinecken et adoptées, pour la plupart, par Ottley et M. Sotheby, dans
ses Principia Ttjpographica; il rend au livre son titre de Biblia Pauperum qu'on a contesté,
allongé, dénaturé; il réduit à deux éditions les cinq mentionnées par Heinecken, et
portées à huit au moins par M. Sotheby; il indique Jean Van Eyck comme l'auteur de
la plupart des dessins et Laurent Coster très-probablement comme le graveur; il donne
pour la première fois en Angleterre, le résumé des opinions des bibliographes allemands
et hollandais sur les livres xylographiques en général et la Biblia Pauperum en parti-
culier; il nomme Wohlgemuth, le maître d'Albert Durer, comme l'auteur des dessins
de la 2e édition de la Biblia Pauperum, dont on ne connaît qu'un seul exemplaire apporté
de Wolfenbuttel à la Bibliothèque nationale de Paris, et qui comprend 50 planches au