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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 13.1862

DOI issue:
Nr. 5
DOI article:
Gruyer, François-Anatole: Le triomphe de Galatée
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https://doi.org/10.11588/diglit.17332#0457

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LE TRIOMPHE DE GALATÉE. 435

bras1. Le troisième, du côté opposé, s'acharne après la néréide que le
centaure marin enlève sur sa croupe à travers les ondes2. Enfin, à l'angle
gauche du tableau, le quatrième Amour apparaît au milieu des nuées. On
ne voit que sa tète, le bout de ses ailes et ses deux mains qui portent des
flèches nombreuses. Cette tête, noyée dans le clair-obscur d'une atmo-
sphère transparente, est d'une étonnante beauté. La bouche, fortement
arquée, exprime la colère et le dédain. Le regard, fixement arrêté sur les
personnages qui peuplent les eaux, est d'un éclat surprenant : il attire,
fascine et effraye en même temps. C'est là une de ces créations char-
mantes et presque terribles, exclusivement personnelles à Raphaël et
spontanément sorties de son génie.

Tel est ce tableau, si simple dans son ordonnance et si clair dans son
esprit, n'ayant d'ailleurs d'autre horizon lointain que la vaste mer avec
ses blondes vapeurs et les sourires innombrables de ses flots, et l'azur
du ciel avec cette transparence magique et cette limpidité qu'on ne sau-
rait accorder même à la nature, quand on n'a vu ni l'Italie ni la Grèce3.
C'est un fragment du cercle olympique soumis au pouvoir de Neptune ;
c'est une perspective lumineuse sur le monde mythologique. Mais c'est
en même temps une interprétation souverainement originale et empreinte
dans sa partie principale de l'élévation du sentiment chrétien. Galatée
apparaît là comme une étoile qui sort du sein des eaux pour remonter au
ciel, et qui, dans sa trajectoire lumineuse, rencontre les passions vul-
gaires et les appétits grossiers.

En présence de cette radieuse figure, il faut faire effort pour penser
à la Fable. Est-ce bien là, en effet, la nymphe qui raconte ainsi les déchi-
rements de son cœur? « Cachée sous les fleurs d'un rocher, je reposais
« sur le sein de mon Acis, et de loin mon oreille recueillait les paroles
a dont le cyclope faisait retentir les montagnes et les mers : « 0 Galatée,
« tu es plus blanche qu'un beau lis, plus fraîche que la fleur de la prai-
« rie, plus élancée que l'aune, plus brillante que le cristal, plus folâtre
« qu'un jeune chevreau..., plus agréable que les rayons du soleil
« en hiver et que l'ombre en été, plus exquise que les fruits les plus
« exquis..., plus suave qu'un raisin mûr, plus douce que le duvet du
u cygne..., plus trompeuse que l'onde, plus impétueuse que le torrent...,

1. Au côté gauche de la fresque.

2. Au côté droit de la fresque.

3. Le ciel a conservé sa couleur bleue primitive; mais il est lézardé par de nom-
breuses crevasses.

4. Neptune avait un Olympe au milieu duquel il vivait, comme Bacchus, au milieu
des satyres et des ménades.
 
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