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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 16.1864

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Nr. 1
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Blanc, Charles: Eugène Delacroix, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.18739#0030

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26

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

sous quelques rapports, une censure accablante et un enseignement inu-
tile. Que dis-je ? un enseignement dangereux, parce qu’il eût certaine-
ment compromis ses qualités en voulant s’approprier celles des grands
dessinateurs.

Le seul voyage un peu lointain que fit Delacroix, après une courte
excursion en Angleterre, ce fut le voyage du Maroc, en 1831. Attaché à
une ambassade extraordinaire que le roi Louis-Philippe envoyait à l’em-
pereur du Maroc, il eut occasion de voir un nouveau soleil, d’étudier des
mœurs et des costumes qui n’étaient pas connus en France, et de vivre
quelque temps au milieu d’une race qui devait lui plaire par son intelli-
gence de la couleur et par son amour des chevaux. Le cheval a été une
des passions d’Eugène Delacroix; mais il l’aimait pour le peindre, non
pour le monter. Il l’aimait surtout lorsqu’il est lancé à fond de train,
lorsqu’il bondit de fureur, écume de rage. Au Maroc, il vit souvent les
chevaux arabes renverser leur cavalier pour se ruer l’un sur l’autre, se
déchirer, se mordre, et ce spectacle lui avait plu par son côté violent,
héroïque. Jamais il ne s’attacha, comme Géricault, au cheval de ca-
mion, à la robuste monture du peuple; il peignit presque toujours des
chevaux de sang. Une chose à remarquer chez lui, c’est qu’il a beau-
coup mieux dessiné les animaux que la figure humaine. L’animal sans
doute est plus facile à dessiner que l’homme, parce que ses formes,
offusquées par des poils, cachés par des plumes, enveloppés de fourrures,
n’ont de précision que dans les attaches. Mais encore faut-il en bien
saisir le caractère, car si les formes des animaux nous sont moins fami-
lières que celles de l’homme, tous du moins nous connaissons les traits
généraux du lion, du tigre, du cheval, du chien, de l’âne, assez bien
pour être choqués par une invraisemblance d’allure ou de construction.
La construction et l’allure du cheval, Eugène Delacroix les a très-bien
connues, quoiqu’il ait parfois outré le mouvement au profit de l’expres-
sion. Quant aux lions et aux tigres, il les a compris et dessinés comme
personne ne l'avait fait avant lui, si ce n’est Rembrandt. Sur les pierres
lithographiques où il a crayonné ses étranges illustrations de Faust: par-
fois si faibles ou si extravagantes, on trouve des croquis de lions qui ont
une Hère tournure, des têtes de chevaux qui ont à la fois du feu et du
style, parce qu’il en abrège les formes, en indique la charpente par
quelques accents décisifs, et qu’alors l’imagination du spectateur achève
à plaisir ce que l’artiste lui-même eût peut-être mal achevé. Parmi ses
lithographies, le Lion de VAtlas, couché dans son antre et dévorant un
lièvre, est un morceau tout à fait de maître. Celles qui représentent le
jeune tigre jouant avec sa mère et le Tigre royal expriment avec infini-
 
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