LA CARICATURE DANS L’ANTIQUITÉ.
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qu’un autre il eût été à même d’élucider. On lui doit beaucoup pourtant ;
sa brochure a fait comprendre l’importance de la matière.
Dans une thèse latine soutenue en Sorbonne par M. Charles Lenor-
mant pour obtenir le grade de docteur ès lettres1, le jeune érudit, qui
devait arriver à l’Institut, joignait à son commentaire sur le Banquet de
Platon de précieuses notes relatives au comique antique. Qu’on ne partage
pas toutes les vues de-M. Lenormant, qu’on combatte son système de
rattacher tout monument de l’art antique à un symbolisme religieux enve-
loppé de mystères, il faut lui rendre cette justice qu’il a cherché, étu-
dié, un peu trop songé peut-être vers la fin de sa vie; mais l’érudition
lui est redevable de nombreuses trouvailles.
II.
CE qu’il faut penser de la caricature d’un potier.
De la raillerie de Socrate et d’Aristophane, M. Lenormant en arrive à
la raillerie plastique, et, pour la mieux prouver, il a fait graver divers
monuments auxquels j’emprunte le dessin d’une lampe de la plus
grande curiosité.
La lampe « en terre d’une grandeur remarquable, dit M. Lenormant
que je traduis d’après le latin, a près de deux pieds de long et atteste une
forme de navire. Cette poterie dont l’authenticité est incontestable, quoi
qu’on ait dit2, est recommandable à beaucoup d’égards. Elle est de la
plus haute antiquité, comme le prouvent suffisamment les madrépores
qu’un long séjour sous les eaux y fixa. Elle vient, dit-on, de Pouzzoles,
où le culte de Sérapis était en grand honneur. Le simulacre de ce dieu
fait partie des ciselures de la lampe. »
Tout d’abord on est frappé par le mélange singulier d’art sacré et
d’art profane. Deux compartiments sont réservés aux divinités peintes
dans leur noblesse, et le troisième à un être comique, un potier se livrant
à des fonctions manuelles. Etrange assemblage de noble et de trivial, de
grand et de grotesque. Les dieux en haut, en bas un ouvrier contrefait.
\. Quœstionem cur Plato Aristophanem in convivium induxerit, par Charles
Lenormant. Paris, in-4°, Firmin Didot, '1838.
2. R semble, d’après ce quoi quJon ait dit, que des doutes s’étaient élevés parmi
les archéologues sur l’authenticité de cette lampe, que malheureusement la France s’est
laissé enlever par l’Angleterre.
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qu’un autre il eût été à même d’élucider. On lui doit beaucoup pourtant ;
sa brochure a fait comprendre l’importance de la matière.
Dans une thèse latine soutenue en Sorbonne par M. Charles Lenor-
mant pour obtenir le grade de docteur ès lettres1, le jeune érudit, qui
devait arriver à l’Institut, joignait à son commentaire sur le Banquet de
Platon de précieuses notes relatives au comique antique. Qu’on ne partage
pas toutes les vues de-M. Lenormant, qu’on combatte son système de
rattacher tout monument de l’art antique à un symbolisme religieux enve-
loppé de mystères, il faut lui rendre cette justice qu’il a cherché, étu-
dié, un peu trop songé peut-être vers la fin de sa vie; mais l’érudition
lui est redevable de nombreuses trouvailles.
II.
CE qu’il faut penser de la caricature d’un potier.
De la raillerie de Socrate et d’Aristophane, M. Lenormant en arrive à
la raillerie plastique, et, pour la mieux prouver, il a fait graver divers
monuments auxquels j’emprunte le dessin d’une lampe de la plus
grande curiosité.
La lampe « en terre d’une grandeur remarquable, dit M. Lenormant
que je traduis d’après le latin, a près de deux pieds de long et atteste une
forme de navire. Cette poterie dont l’authenticité est incontestable, quoi
qu’on ait dit2, est recommandable à beaucoup d’égards. Elle est de la
plus haute antiquité, comme le prouvent suffisamment les madrépores
qu’un long séjour sous les eaux y fixa. Elle vient, dit-on, de Pouzzoles,
où le culte de Sérapis était en grand honneur. Le simulacre de ce dieu
fait partie des ciselures de la lampe. »
Tout d’abord on est frappé par le mélange singulier d’art sacré et
d’art profane. Deux compartiments sont réservés aux divinités peintes
dans leur noblesse, et le troisième à un être comique, un potier se livrant
à des fonctions manuelles. Etrange assemblage de noble et de trivial, de
grand et de grotesque. Les dieux en haut, en bas un ouvrier contrefait.
\. Quœstionem cur Plato Aristophanem in convivium induxerit, par Charles
Lenormant. Paris, in-4°, Firmin Didot, '1838.
2. R semble, d’après ce quoi quJon ait dit, que des doutes s’étaient élevés parmi
les archéologues sur l’authenticité de cette lampe, que malheureusement la France s’est
laissé enlever par l’Angleterre.