DOI Heft:
Nr. 6
DOI Artikel:Galichon, Émile: Paul Mantz, Les chefs-d'œuvre de la peinture italienne: [Rezension]
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.21405#0564
548
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
couvrait la terre, le progrès fut lent et pénible. Bien souvent un obstacle
arrêta pendant des siècles les hommes attendant qu’un génie vînt dis-
sipet les ténèbres et qu’un chef, emporté par l’ardeur de ses convictions,
osât franchir la barrière et entraîner à sa suite une vaillante phalange,
heureuse d’explorer la contrée nouvelle.
Toutes les étapes de cette marche laborieuse ont été marquées, dans
les chefs-d’œuvre de la peinture italienne, par la plume d’un écrivain
distingué, M. Paul Mantz, par le burin d’artistes renommés et par des
chromolithographies dues à M. Kellerhoven. Étalé sur une table, ce
magnifique ouvrage entretient ou ravive les souvenirs agréables d’un
voyage en Italie, et apprend à ceux qui ne l'ont pas entrepris quelles
sont les merveilles qu’il importe à tous de connaître. Les vierges étranges
de Gimabué, les premières tentatives de Giotto pour se rapprocher de la
nature, les progrès accomplis par les Lippi et les Bellin, par Mantegna
et Verroccliio, par Signorelli et Pérugin, par Botticelli et tant d’autres,
pour amener l’art aux éclatantes manifestations de Léonard, de Michel-
Ange, de Raphaël, du Titien et de Corrége, se retrouvent là classés de
manière à faire comprendre le développement entier de la peinture ita-
lienne, depuis les premiers bégayements de l’enfance jusqu’aux émou-
vantes péroraisons du xvie siècle, si vite étouffées par les emphatiques
déclamations de la décadence.
Mais les chefs-d’œuvre de la peinture italienne ne devaient pas seu-
lement former un album somptueux, agréable pour tous à feuilleter et
propre uniquement à initier le public aux beautés de l’art par la vue; il
fallait les accompagner d’un texte aussi clair qu’exact, qui résumât pour
tout le monde la biographie des peintres éminents, et qui caractérisât les
diverses phases par lesquelles la peinture a dû passer pour arriver à son
apogée en Italie. Cette tâche délicate a été confiée à M. Paul Mantz, et
nos lecteurs savent quels soins consciencieux notre ami et collaborateur
apporte dans ses travaux, et de quelle forme attrayante il sait
envelopper les documents, pour dissimuler sa science et se faire lire sans
fatigue. Écrivain très au courant de toutes les sources où il convient de
puiser, très au fait du mouvement scientifique, on peut sans crainte s’en
rapporter à ses renseignements, toujours sûrs. Esprit philosophique et
indépendant, critique assez audacieux pour prononcer des jugements
nouveaux, et assez sage pour ne jamais s’aventurer sans écouter les
conseils de la raison, il est de ceux qui, sans témérité, peuvent oser for-
muler une nouvelle synthèse de l’art. Aussi, pour nous, et on le com-
prendra aisément, cette partie du livre est-elle celle qui a le plus vive-
ment piqué notre curiosité. Mais avant de lire un volume, nous aimons à
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
couvrait la terre, le progrès fut lent et pénible. Bien souvent un obstacle
arrêta pendant des siècles les hommes attendant qu’un génie vînt dis-
sipet les ténèbres et qu’un chef, emporté par l’ardeur de ses convictions,
osât franchir la barrière et entraîner à sa suite une vaillante phalange,
heureuse d’explorer la contrée nouvelle.
Toutes les étapes de cette marche laborieuse ont été marquées, dans
les chefs-d’œuvre de la peinture italienne, par la plume d’un écrivain
distingué, M. Paul Mantz, par le burin d’artistes renommés et par des
chromolithographies dues à M. Kellerhoven. Étalé sur une table, ce
magnifique ouvrage entretient ou ravive les souvenirs agréables d’un
voyage en Italie, et apprend à ceux qui ne l'ont pas entrepris quelles
sont les merveilles qu’il importe à tous de connaître. Les vierges étranges
de Gimabué, les premières tentatives de Giotto pour se rapprocher de la
nature, les progrès accomplis par les Lippi et les Bellin, par Mantegna
et Verroccliio, par Signorelli et Pérugin, par Botticelli et tant d’autres,
pour amener l’art aux éclatantes manifestations de Léonard, de Michel-
Ange, de Raphaël, du Titien et de Corrége, se retrouvent là classés de
manière à faire comprendre le développement entier de la peinture ita-
lienne, depuis les premiers bégayements de l’enfance jusqu’aux émou-
vantes péroraisons du xvie siècle, si vite étouffées par les emphatiques
déclamations de la décadence.
Mais les chefs-d’œuvre de la peinture italienne ne devaient pas seu-
lement former un album somptueux, agréable pour tous à feuilleter et
propre uniquement à initier le public aux beautés de l’art par la vue; il
fallait les accompagner d’un texte aussi clair qu’exact, qui résumât pour
tout le monde la biographie des peintres éminents, et qui caractérisât les
diverses phases par lesquelles la peinture a dû passer pour arriver à son
apogée en Italie. Cette tâche délicate a été confiée à M. Paul Mantz, et
nos lecteurs savent quels soins consciencieux notre ami et collaborateur
apporte dans ses travaux, et de quelle forme attrayante il sait
envelopper les documents, pour dissimuler sa science et se faire lire sans
fatigue. Écrivain très au courant de toutes les sources où il convient de
puiser, très au fait du mouvement scientifique, on peut sans crainte s’en
rapporter à ses renseignements, toujours sûrs. Esprit philosophique et
indépendant, critique assez audacieux pour prononcer des jugements
nouveaux, et assez sage pour ne jamais s’aventurer sans écouter les
conseils de la raison, il est de ceux qui, sans témérité, peuvent oser for-
muler une nouvelle synthèse de l’art. Aussi, pour nous, et on le com-
prendra aisément, cette partie du livre est-elle celle qui a le plus vive-
ment piqué notre curiosité. Mais avant de lire un volume, nous aimons à