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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 19.1879

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Nr. 3
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Lechevallier-Chevignard, Edmond: La chapelle des Portinari à Saint-Eustorge de Milan
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https://doi.org/10.11588/diglit.22839#0239

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228

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Dans l’état présent, la partie la plus ancienne consiste en une triple
abside que les archéologues s’accordent à classer entre le vit® et le
ix.® siècle, c’est-à-dire en pleine période lombarde. Un très beau cam-
panile, commencé vers 1297 par Uberto Viscotlti, montre le premier
emploi de l’arc ogival, que l’on retrouve dès lors à l’intérieur du temple,
tantôt alternant avec l’arc rond, tantôt régnant sans partage, notamment
à l’entrée de la nef. Du reste, le principal mérite de Saint-Eustorge ne
réside pas précisément dans l’accord de* toutes ses parties, d’âges et de
styles trop différents. A ce défaut d’unité sont venues se joindre l’action
du temps et les variations du goût, car en Italie ainsi qu’en France les
deux derniers siècles ont été parfois désastreux pour les productions
des époques antérieures. — Nous le verrons bientôt. — Enfin il n’est
pas jusqu’aux passions politiques qui n’aient mutilé l’ancien édifice, et
cela dans un pays conservateur par tempérament, où d’ordinaire per-
sonne ne s’est avisé d’inaugurer chaque changement de régime par la
destruction de quelque monument public. Les patriotes cisalpins ont
donc épargné les objets du culte et respecté la cendre des morts, tout en
effaçant des insignes nobiliaires qui froissaient les idées nouvelles et leur
civisme de fraîche date. Restreint à cette inepte besogne, le marteau de
la révolution avait encore de quoi fatiguer ceux qui le maniaient. Saint-
Eustorge, en effet, forme un véritable musée de sculpture, et serait
presque, aux yeux des Milanais, ce que sont pour les habitants de Flo-
rence Santa-Croce et le couvent de Saint-Marc, à la fois une nécropole
privilégiée et un lieu de tragiques souvenirs. Si, à partir du xmc siècle,
les grandes familles lombardes tiennent à honneur d’y avoir leur sépul-
ture, si les Yisconti, les délia Torre, les Stampa, les Caimi, les Busca, les
Brivii, d’autres encore, éventrent les parois de l’église pour y disposer
leurs somptueuses chapelles et leurs urnes funéraires, est-ce seulement
une conséquence de l’esprit d’imitation, un nouvel exemple de cet em-
pire de la mode, qui régit jusqu’aux choses du trépas? Non. Cette
enceinte est révérée pour ses tombes patriciennes, mais plus encore en
mémoire d’un énergique défenseur de la foi. Deux cents ans avant Flo-
rence, Milan eut aussi son orateur populaire, son dominicain ardent et
convaincu; il s’appelle Pierre de Vérone. L’Eglise l’a mis au rang des
saints; peintres et sculpteurs ont àl’envi reproduit ses actes. —L’his-
toire seule recueille et honore le nom de Savonarole.

Les frères prêcheurs de Saint-Dominique, institués spécialement par
Innocent III en vue de combattre la secte des cathares, étaient venus
s’établir à Milan vers 1227. Leur cloître commençait de s’étendre sur le
côté septentrional de Saint-Eustorge lorsque, poursuivant dans la haute
 
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