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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 1.1889

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Nr. 1
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Molinier, Émile: Le trésor de Saint-Marc à Venise, 4
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https://doi.org/10.11588/diglit.24445#0058

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LE TRÉSOR DE SAINT-MARC.

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repoussé c’est que je ne suis pas absolument fixé sur sa nationalité :
Le Christ de Majesté qui la décore a l’ampleur des sculptures fran-
çaises du xme siècle et je ne serais pas très étonné qu’il fût l’œuvre
de quelqu’un de nos compatriotes, peut-être d’un Flamand travaillant
pour la cour latine de Constantinople, comme ce Gérard qui a signé
le reliquaire de la vraie croix appartenant à l’empereur Henri de
Flandre (1206-1216).

J’avoue que le grand devant d’autel de Saint-Marc, en argent
repoussé et doré, me laisse absolument froid. Il appartient ou du
moins il appartenait à l’art vénitien du xme siècle, mais ses figures
d’apôtres et les scènes empruntées à la vie du saint patron de Venise
ne m’inspirent qu’une confiance limitée : je craindrais de m’appe-
santir sur quelque détail sorti du cerveau d’un orfèvre moderne,
car, là aussi, la manie de la restauration a fait son œuvre. J’en dirai
autant du reliquaire du bras de saint Georges. Ce récipient, en
forme de cornet, porté sur un trépied formé de tiges végétales, est
d’un galbe original; les émaux translucides sur relief qui le décorent
méritent confiance, mais je ne saurais admettre que la statuette du
saint qui surmonte le reliquaire soit du xive siècle : les artistes
gothiques ne faisaient point cabrer les chevaux de la sorte et je crois
bien que celui-ci sort d'une écurie toute moderne.

Beaucoup plus intéressant est le devant d’autel d’argent doré qui,
de la cathédrale de Venise, est passé à Saint-Marc. Offert en 1408
par un pape vénitien, Grégoire XII (Angelo Correr), il est tout à fait
vénitien aussi de style et d’ornementation. Cette pièce me paraît très
proche parente des objets d’orfèvrerie exécutés par une famille d’or-
fèvres vénitiens, les da Sesto, qui ont travaillé pendant une grande
partie du xve siècle 1. D’architecture un peu compliquée, cet autel
offre sur deux rangs une série d’apôtres et de saints présidés par
le Christ et par saint Pierre. C’est brutal de faire, vulgaire de phy-
sionomie et l’on y sent une influence allemande qui se prolonge à
Venise bien tard dans le xv° siècle : les candélabres en argent doré,
que la stupidité des guides continue à décorer du nom de Benvenuto
Cellini, appartiennent au même courant artistique, et nous offrent
un gothique vénitien, je ne dis pas italien, complètement épanoui.
Pour ces flambeaux nous avons encore une date approximative : ils
ont été offerts par le doge Cristoforo Moro (-f- 1471).

Parmi les autres pièces d’orfèvrerie italiennes, je ne vois en fait

1 Urbani de Gheltof, Les Arts industriels à Venise, p. 21 et suiv.
 
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