Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 1.1889

DOI Heft:
Nr. 2
DOI Artikel:
Humbert, Edouard: Jean-Étienne Liotard et ses oeuvres, 2
DOI Seite / Zitierlink:
https://doi.org/10.11588/diglit.24445#0111

DWork-Logo
Überblick
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
JEAN-ÉTIENNE LIOTARD.

95

Le projet d’excursion caressé par le peintre se trouva ainsi ren-
voyé au mois d’octobre; et bientôt après la curieuse lettre qu’on vient
de lire, le malheureux Jean-Jacques était chassé de Motiers, chassé
de l’Ile Saint-Pierre, en sorte que le portrait n’a pas été fait, — à
cette époque-là du moins, — car l’existence d’un portrait est incon-
testable dès 1770. Deux lettres de Rousseau à Rey, des 26 juillet et
9 septembre 1770, ne laissent pas la moindre incertitude à cet
égard1. Que pris de violents accès d’humeur noire, Rousseau ait
changé de langage et maltraité celui dont il louait cinq ans aupa-
ravant les grands talents, peu importe; l’essentiel est la constatation
du fait : « Je ne suis nullement de l’avis de ceux qui vous ont
marqué que mon portrait fait par M. Liotard était parfaitement
ressemblant. » Et plus loin : « Puisque vous vouliez me graver,
projet qui, du reste, n’a jamais été de mon goût, j’ai pensé qu’il
valait mieux que vous m’eussiez ressemblant que défiguré; c’est
pour cela que j’ai préféré M. de la Tour comme incapable de se
prêter aux manœuvres qui ont guidé le pinceau de Ramsay et les
crayons de Liotard. » Le savant Albert Jansen, à qui l’on doit tant
de recherches nouvelles sur Rousseau 2, reconnaît que le pastel de
la famille de Girardin 3 est peut-être le plus beau Rousseau, et il
est tenté d'attribuer cet excellent travail au maître génevois Lio-
tard. Rousseau est représenté, — dit-il, — avec un caftan, une
veste rouge et un bonnet.

Et maintenant, si Liotard a reproduit les traits de Jean-Jacques,
n’a-t-il pas eü l’occasion facile de représenter l’incarnation du
xviii6 siècle, le polygraphe de Ferney? Je n’en saurais douter. Que
divers catalogues d’estampes indiquent un portrait de Voltaire,
gravé par Balechou, et signé J .-M. Loitard, avec une correction du
graveur qui a paru évidente à un connaisseur de nos amis; qu’on
veuille reconnaître le même type que celui du célèbre portrait de la
Tour, plusieurs fois gravé avec une devise latine bien connue, en
faut-il conclure qu’il n’existe aucun pastel ou dessin de Voltaire dû
à Liotard? Non pas. A Paris d’abord, où, par deux fois, Liotard a pu
rencontrer Voltaire; ensuite dans le voisinage de Genève, à Ferney.
Pourquoi le spirituel artiste, Jean Huber, l’un des familiers du cercle
voltairien, aurait-il donné « une caricature fort plaisante représen-

1. Lettres inédites de Jean-Jacques Rousseau à Marc-Michel Rey, publiées par
.1. Bossclia. Amsterdam, Muller, et Paris, Didot, 1858.

2. Tome LU des Preussischen Iahrbücher.

3. Voy. à ce sujet la Revue politique et littéraire, li juillet 1883, pi 55.
 
Annotationen