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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 16.1896

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Nr. 1
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Nolhac, Pierre de: La décoration de Versailles au XVIIIe siècle, 3
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https://doi.org/10.11588/diglit.24682#0056

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46

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Cependant Marie-Antoinette perdait patience ; dès cette époque
apparaît en elle ce caractère emporté qui n’admettait pas qu’on résis-
tât à son désir. La Dauphine voulait occuper « sa chambre » ; elle
avait accepte le plafond blanc, mais elle exigeait qu’il fût fini sur-le-
champ. Elle en faisait écrire au Directeur général, sur un ton qui
n’admettait point de réplique, par Mme de Noailles1; le Directeur
donnait aussitôt à Gabriel l’ordre formel de commencer, avec le
moins de dépense possible, le plafond blanc; mais il répondait en
même temps à la dame d’honneur, pour excuser auprès de la Dau-
phine les retards de son service, une lettre émue et d’un grand accent
de sincérité, où il faisait connaître que la caisse des Bâtiments était
vide et que les entrepreneurs étaient entravés dans leur travail par les
dettes et la misère : « .l’ose espérer, ajoutait-il, que quand Mmo la Dau-
phine sera informée de cette situation des Bâtiments du Roi, elle voudra
bien ne me point imputer un retardement qui a été uniquement
l'effet de circonstances qu’il n’est pas en mon pouvoir de faire
cesser2. » Le document n’est pas à l’honneur du régime financier de
Louis XV, mais M. de Marigny n’exagérait pas la détresse de ses
entrepreneurs qui, à plusieurs reprises, l’hiver suivant, menaçaient
d’arrêter tout travail chez la Dauphine.

Que devenaient, en cette affaire, les intérêts de l’art? Placé
entre sa conscience d’architecte du Roi et les ordres de son chef
appuyés sur la volonté de la Dauphine, Gabriel pouvait être embar-
rassé. Il n’hésita pas et envoya au Directeur général, alors à Ménars,
la lettre suivante, que je crois utile de donner intégralement, car elle
fait bien connaître, avec son ton moitié officiel, moitié familier, le
caractère du vieil architecte :

26 septembre 1770. — Monsieur, j’ay reçu la seconde lettre que vous
m’avez fait l’honneur de m’écrire du 20 de ce mois, au sujet du plafond à
restaurer dans la chambre de la Reyne, destinée à Mme la Dauphine.
Vous y paroissez surpris que, dans une presse telle que celle où sont les
Bâtiments du Roy, je m'occupe de projets qui tendent à en augmenter la
dépense. Gela n’a pas été mon idée ny mon but, j’en suis bien éloigné,
puisque je suis une des parties soutirantes de la disette de fonds. Mais
j'aurois cru être coupable envers vous de ne vous pas proposer, sur une

1. Cette lettre, signée « Arpajon deNoailles, du 17 septembre 1770 », est, avec
la réponse en minute, dans le carton O1 1800.

2. O1 1800, Cf. unrapport du 16 novembre 1770, qui fait prévoir que les sculp-
teurs de la chambre de la Dauphine devront s’en retourner à Paris, s’ils ne
sont payés.
 
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