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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 16.1896

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Nr. 2
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Adam, Paul: Les Salons de 1896, 3, La peinture au Salon des Champs-Élysées
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https://doi.org/10.11588/diglit.24682#0122

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

puscule autour de la Nausicaa que voulut évoquer M. Boyé, abîmées
par le plaisir entre les Bacchantes chevauchant le lion de M. Bridg-
mann, ou glorieuses dans le Cortège païen que M. Foréau décrivit
à l’honneur de Bacchus. De plus, à l’occasion d’une Fête antique, près
d’une statue de dieu, M. Buffet les groupa, hiératiques, solennelles,
en marche vers des montagnes jaunes et roses.

La mystique les verdit. De gracieuses victimes, espérant, au
pied du roc, que saint Georges tue le monstre, baignent dans une
lumière verte. Nombreuses sont encore les tètes de femmes laurées,
les porteuses de lyres, les bravoures de héros à auréole, que cette
nuance consacre. Pour la plupart, le vert Véronèse signifie la partici-
pation au mystère.

De pénombres bleuâtres, lunaires, se dégagent les Salammbôs.
Flaubert l’avait dit. On ne pouvait forfaire à son intention. Une tête
d’idole taillée rudement inspira sans doute M. Girardin, lorsqu’il
imagina cette prêtresse de Tanit, parvenue sous la tente de Matho.
L’œuvre merveilleuse de l’écrivain suggéra d’ailleurs bien d’autres
tentatives. Non sans plaisir, on note que les lecteurs du livre admirent
les chapitres développant l’existence des Mercenaires. Pour consacrer
avec l’image cette splendide et première étude de l’âme des foules,
plusieurs artistes composèrent des toiles importantes. Ils y relatent
les angoisses des Barbares enfermés dans le défilé de la Hache, ou la
tactique du Carthaginois faisant piétiner par les éléphants les restes
de l’armée rebelle. Ils comprirent que le bel effort de l’œuvre était
dans la reconstitution de cette âme collective. Là, Flaubert annonçait
un avenir nouveau pour l’art. Malheureusement, les interprètes ne
surent point assembler les individus dans la foule. Des modèles divers
ont posé séparément. Ils ne frissonnent pas de la fièvre totale. L’écri-
vain, lui, conçut une humanité cohésive, et de toutes races en marche
vers cette Carthage, ville de bien-être, de repos, pour l’illusion des
hommes simples.

Avec le même piétinement de barbares à la recherche maladroite
de l’aise, l’humanité marche à la conquête du ciel promis par le
Christ, sans rien trouver de Lui que la douleur. En étalant, aux
regards du monde, le Dieu, bouche ouverte par le dernier râle et
chairs mortes, M. Henner exprime, à son tour, après tant d’artistes
chrétiens, la désolation du sacrifice inutile, de l’effort inutile. C’est
dans la lumière d’aquarium habituellement préférée par l’œil de ce
peintre, que l’aspect du Christ descendu de la croix convie à renoncer.
Et cependant les hommes, forts de l’espoir offert sur les bords du lac de
 
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