LA DONATION ADOLPHE DE ROTHSCHILD AU LOUVRE 279
connaître son histoire; la devise : Le Souvenir fait soupirer, inscrite
sur son anneau de suspension, est insuffisante à nous la dévoiler,
mais elle peut nous donner à penser que la dévotion ne fut peut-
être pas le seul sentiment de celle qui Légrena.
L’on pourrait s’étonner de rencontrer aussi des scènes de la
Passion sur un collier dont la destination ne paraît avoir aucun
caractère pieux, si l'on ne savait combien, à cette époque, le religieux
pénétrait communément le profane. Celui-ci est allemand de la
seconde moitié du xvie siècle. Onze médaillons d’or de forme ovale,
bordés de rinceaux découpés à jour et émaillés, enrichis de perles,
de rubis et de diamants en tables, déroulent en autant de scènes
l’histoire de la Passion en bas-reliefs ciselés et émaillés. Dix agrafes
de décor les réunissent entre eux. Un grand médaillon de lapis, en
forme de cœur, est suspendu en son milieu et porte le Christ en croix,
entre les instruments de son supplice. Bien que d’un type moins
rare, ce précieux joyau peut aller de pair avec le précédent et ne
lui cède en rien pour la dextérité de l’exécution.
Nous avons réservé, pour clore cette rapide revue et pour
associer aussi deux noms dans l’expression de notre gratitude, deux
pièces que Mmc la baronne Adolphe de Rothschild a voulu offrir
au Louvre et joindre à la donation faite par son mari. La première
est une belle et haute monstrance en argent doré et émaillé de l’art
vénitien du xvc siècle, toute gothique encore par son architecture et
les éléments décoratifs mis en œuvre, et sur laquelle nous insiste-
rions davantage, si la seconde n’avait des droits supérieurs à solli-
citer notre attention. Haute de 0ni20 à peine, cette petite croix-
reliquaire d’or ciselé et repoussé est une œuvre de grand style. Sur
la base, qui affecte la forme de l’M onciale et que décorent cinq
petits bas-reliefs, monte le fût octogonal, sur lequel se superposent
deux étages de huit niches occupées par des figures d’apôtres. Une
courte tige en sort, pour supporter la croix proprement dite et pour
donner naissance à deux branches latérales portant les figures de la
\ ierge et de saint Jean. Le détail de l’ornementation révèle la fin
du xive ou le commencement du xve siècle ; la tenue et la distinction
de 1 ensemble doivent faire reconnaître dans cette croix un travail
français. Cette extraordinaire petite pièce, aussi précieuse par sa
matière que par son exécution, est venue enrichir d’une merveille
de plus une collection qui comptait déjà tant de merveilles.
P. FR ANTZ MARCOÜ
connaître son histoire; la devise : Le Souvenir fait soupirer, inscrite
sur son anneau de suspension, est insuffisante à nous la dévoiler,
mais elle peut nous donner à penser que la dévotion ne fut peut-
être pas le seul sentiment de celle qui Légrena.
L’on pourrait s’étonner de rencontrer aussi des scènes de la
Passion sur un collier dont la destination ne paraît avoir aucun
caractère pieux, si l'on ne savait combien, à cette époque, le religieux
pénétrait communément le profane. Celui-ci est allemand de la
seconde moitié du xvie siècle. Onze médaillons d’or de forme ovale,
bordés de rinceaux découpés à jour et émaillés, enrichis de perles,
de rubis et de diamants en tables, déroulent en autant de scènes
l’histoire de la Passion en bas-reliefs ciselés et émaillés. Dix agrafes
de décor les réunissent entre eux. Un grand médaillon de lapis, en
forme de cœur, est suspendu en son milieu et porte le Christ en croix,
entre les instruments de son supplice. Bien que d’un type moins
rare, ce précieux joyau peut aller de pair avec le précédent et ne
lui cède en rien pour la dextérité de l’exécution.
Nous avons réservé, pour clore cette rapide revue et pour
associer aussi deux noms dans l’expression de notre gratitude, deux
pièces que Mmc la baronne Adolphe de Rothschild a voulu offrir
au Louvre et joindre à la donation faite par son mari. La première
est une belle et haute monstrance en argent doré et émaillé de l’art
vénitien du xvc siècle, toute gothique encore par son architecture et
les éléments décoratifs mis en œuvre, et sur laquelle nous insiste-
rions davantage, si la seconde n’avait des droits supérieurs à solli-
citer notre attention. Haute de 0ni20 à peine, cette petite croix-
reliquaire d’or ciselé et repoussé est une œuvre de grand style. Sur
la base, qui affecte la forme de l’M onciale et que décorent cinq
petits bas-reliefs, monte le fût octogonal, sur lequel se superposent
deux étages de huit niches occupées par des figures d’apôtres. Une
courte tige en sort, pour supporter la croix proprement dite et pour
donner naissance à deux branches latérales portant les figures de la
\ ierge et de saint Jean. Le détail de l’ornementation révèle la fin
du xive ou le commencement du xve siècle ; la tenue et la distinction
de 1 ensemble doivent faire reconnaître dans cette croix un travail
français. Cette extraordinaire petite pièce, aussi précieuse par sa
matière que par son exécution, est venue enrichir d’une merveille
de plus une collection qui comptait déjà tant de merveilles.
P. FR ANTZ MARCOÜ