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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
Incisif, ému, toujours indépendant et fantasque, l’écrivain
marie, comme le graveur, le contour et l’enveloppe, la tendresse et
le trait. Le voici, mentor malicieux sous son pseudonyme : « Que
tous ces messieurs, peintres, dessinateurs, compositeurs, créateurs
en un mot, se mettant à l’œuvre, reprennent bravement en mains,
arrachés à celles des graveurs défaillants, la pointe, le burin et le
flacon d’acide; sans oublier le vernis, le flambeau, le tampon, la
cuvette à mordre, le pèse-acide et la manière de s’en servir, la
science de mordre au bouillon ou à la minute ; plus, le vernis blanc
et le vernis au rouleau, à remordre ; le rouleau lui-même, le marteau
et le tas, pour remonter les creux, baisser les valeurs trop mordues,
enlever les accidents, ramener les fraîcheurs, enfin, le brunissoir
périlleux et le grattoir triangulaire : car l’eau-forte, chacun le sait,
est un art d’improvisation, et ce n’est pas plus compliqué que
cela... »
Mais le Normand moqueur avait un projet grandiose : ennemi
de la photogravure, il rêvait d’initier la foule aux chefs-d’œuvre de
l'art popularisés par la vraie gravure, de répandre le goût du beau,
de « décentraliser la Chalcographie ». Celui qui réclamait, avec une
si spirituelle conviction d’artiste éclairé, les salles d'estampes dans
les musées de province entre au Luxembourg, enfin !
H A Y M 0 N D B O U Y E R
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
Incisif, ému, toujours indépendant et fantasque, l’écrivain
marie, comme le graveur, le contour et l’enveloppe, la tendresse et
le trait. Le voici, mentor malicieux sous son pseudonyme : « Que
tous ces messieurs, peintres, dessinateurs, compositeurs, créateurs
en un mot, se mettant à l’œuvre, reprennent bravement en mains,
arrachés à celles des graveurs défaillants, la pointe, le burin et le
flacon d’acide; sans oublier le vernis, le flambeau, le tampon, la
cuvette à mordre, le pèse-acide et la manière de s’en servir, la
science de mordre au bouillon ou à la minute ; plus, le vernis blanc
et le vernis au rouleau, à remordre ; le rouleau lui-même, le marteau
et le tas, pour remonter les creux, baisser les valeurs trop mordues,
enlever les accidents, ramener les fraîcheurs, enfin, le brunissoir
périlleux et le grattoir triangulaire : car l’eau-forte, chacun le sait,
est un art d’improvisation, et ce n’est pas plus compliqué que
cela... »
Mais le Normand moqueur avait un projet grandiose : ennemi
de la photogravure, il rêvait d’initier la foule aux chefs-d’œuvre de
l'art popularisés par la vraie gravure, de répandre le goût du beau,
de « décentraliser la Chalcographie ». Celui qui réclamait, avec une
si spirituelle conviction d’artiste éclairé, les salles d'estampes dans
les musées de province entre au Luxembourg, enfin !
H A Y M 0 N D B O U Y E R