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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 28.1902

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Nr. 2
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Müntz, Eugène: L' école de Fontainebleau et le Primatice, 1: à propos d'un livre récent
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https://doi.org/10.11588/diglit.24810#0168

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152

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Il m’est doux de rendre hommage à l’ardeur déployée par le jeune érudit
et de signaler la richesse de ses informations, la sagacité de ses rapprochements.
M. Dimier n’a reculé devant aucune fatigue, devant aucun sacrifice pour remonter
directement aux sources ; il a exploré, à cet effet, les musées de l’Europe entière,
depuis ceux de l’Angleterre, de la Hollande, de l’Allemagne et de l’Autriche,
jusqu’au Musée national de Stockholm, jusqu’à l’Ermitage de Saint-Pétersbourg.
Grâce à une telle accumulation de documents graphiques, grâce aussi à la
vigueur de sa critique, — parfois un peu autoritaire, — il a pu éclaircir et vivi-
fier les pièces comptables publiées par le marquis de Laborde et qui étaient
comme restées à l’état de lettre morte. Pour la seule voûte de la galerie d’Ulysse,
il a réussi à reconstituer plus d’un tiers des quatre-vingt-quatorze sujets dont
elle se composait primitivement, non compris les arabesques formant le fond de
toute une travée.

II

Qu’est-ce, au juste, que l’école de Fontainebleau? Je ne saurais mieux la
définir qu’en la comparant à l’école de Dijon h Si l’une et l’autre ont pour berceau
une ville française, tous leurs représentants, en échange, ont vu le jour à l’étran-
ger. A peine quelques comparses sont originaires de notre pays, et encore
n'ont-ils jamais réussi à s’assimiler la manière de leurs initiateurs italiens.

Représentons-nous une troupe d’acteurs, assoiffés d’applaudissements et
crevant de jalousie, employant le meilleur de leurs forces à soutenir des rivalités
mesquines et ne reculant devant aucune intrigue pour jouer un mauvais tour à
un camarade : nous aurons l’image fidèle de la colonie italienne. Au lieu de se
tenir les coudes parmi les étrangers, ils donnaient en spectacle leurs dissensions
perpétuelles ; tout au plus y avait-il parfois des alliances entre les enfants d’une
même ville; mais entre Florentins et Bolonais, entre les compatriotes du Rosso
et ceux du Primatice, ce furent des escarmouches sans nombre, alternant avec
mille et mille intrigues de coulisse.

M. Dimier va jusqu’à contester l’exactitude du terme : école de Fontaine-
bleau. A ses yeux il n’y eut qu’un atelier improvisé, où des hommes d’éducation
diverse, rassemblés par hasard, mêlaient leurs travaux. Toutefois, ce qu’il rap-
porte ailleurs de l’influence exercée par le Primatice sur le style des artistes
français ou flamands contredit cette première assertion et prouve qu’une véri-
table cohésion finit par se produire.

Ce ne fut pas un pur effet du hasard si François Ier assigna pour lice à la colo-
nie recrutée de l’autre côté des monts2 un domaine où le passé ne s’imposait
pas, où tout était à créer. Il adorait Fontainebleau, et s’y plaisait tant que,
voulant y aller, il disait « qu’il allait chez soi » (Du Cerceau). Quoi de plus
naturel que d’en faire le berceau de la nouvelle école ! Mais écoutons ses lettres

1. Il est superflu de rappeler ici la démonstration faite par Mgr Dehaisnes au sujet de
la nationalité des artistes fixés à Dijon. Tous, sans exception notable, avaient pour
patrie les Flandres (V. la Chronique des Arts du 27 août 1892).

2. Les Italiens fixés en France, à la suite des campagnes de Charles VIII et de
Louis XII, le Boccador, le Modanino, se trouvaient en retard, comme M. Dimier le
remarque avec raison, vis-à-vis de leurs compatriotes du règne de Léon X, restés en
Italie, autant que les Français eux-mêmes l’avaient été vis-à-vis des Italiens de la pre-
mière fournée.
 
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