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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 28.1902

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Nr. 3
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Hymans, Henri: L' exposition des primitifs flamands à Bruges, 2
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https://doi.org/10.11588/diglit.24810#0207

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

sol. L’Espagne, ainsi que l'Italie et le Nord, fut de très bonne heure
renseignée sur ses maîtres. Dès l’année 144o, le souvenir très évident
de Y Adoration de l’Agneau se retrouve à Barcelone, dans un retable
de Louis Dalmau. C’est chose digne d’être notée, à ce point de vue,
que, précisément, parmi les continuateurs de van Eyck, nul n’est
plus rapproché de lui en valeur qu’Antonello de Messine, venu peut-
être en Flandre, mais non point, comme l’a voulu prétendre Vasari,
son élève direct. Et sans vouloir ici rechercher l’auteur du fameux
Saint Jérôme du musée de Naples, on ne peut y méconnaître l’in-
fluence de l’illustre peintre de Philippe le Bon.

Aucun lien très apparent ne relie à l'œuvre de van Eyck une
remarquable peinture attribuée à Antonello par le catalogue de
l’exposition de Bruges : Le Christ pleuré par la Vierge et les Saintes
Femmes, œuvre ayant naguère appartenu à Jules Benouvier et, par
héritage, devenue la propriété du baron d’Albenas, à Montpellier.
(De la même source provient la Résurrection de Lazare, dite d’Albert
van Ouwater, récemment entrée au Louvre).

Empreinte d'un profond sentiment dramatique, cette petite page
se range, par le style autant que par le coloris, dans les écoles méri-
dionales. Sa gamme de colorations fait songer à Piero délia Fran-
cesca. Quant à la forme, elle est anguleuse, quelque peu brutale.
On rencontre en Espagne des tableaux de cette physionomie tra-
gique. Le Christ repose inerte sur les genoux de la Vierge, sa
tète imberbe rejetée en arrière. La jambe gauche, repliée sous la
droite, fait voir la plante du pied. Ce mouvement peu gracieux
s’explique par la raideur cadavérique. Les extrémités inférieures,
superposées pendant le supplice, ont gardé la trace de cette disposition
contrainte. Les bras, de même, sont pendants le long du corps. Rien
ici n’évoque le souvenir d’Antonello aperçu dans les œuvres authen-
tiques d’Anvers et de Londres. D’excellents connaisseurs pourtant
attribuent cette peinture à l’impeccable artiste. Le type de la Vierge,
amplement drapée de bleu, est franchement vulgaire. Ce qui surtout
impressionne ici, c’est l’intensité de douleur qui se reflète sur le
visage de la mère du Christ et agite ses compagnes. Ensevelies en
quelque sorte dans des draperies rouges ou nuancées d’orange aux
plis rigides, les Saintes Femmes s’isolent dans un désespoir muet.
Elles se dérobent au regard et elles en paraissent plus émouvantes.
Non loin du groupe principal, à la droite du tableau, s’agenouille
un donateur, gentilhomme au front dégarni, au profil aigu. Il tient
entre ses mains jointes un chapelet. Sur le velours de sa longue
 
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