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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 28.1902

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Nr. 4
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Müntz, Eugène: L' école de Fontainebleau et le Primatice, 2: à propos d'un livre récent
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https://doi.org/10.11588/diglit.24810#0377

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L’ÉCOLE DE FONTAINEBLEAU ET LE PRIMATICE 347

de Théodore van Thulden (1653), toutes médiocres qu’elles soient, nous ont con-
servé le souvenir du moins des compositions principales.

On s’accorde à attribuer au Primatice l’invention des esquisses, à Niccolô
dell’Abbate leur traduction en peinture.

C’est le moment d’élucider les rapports des deux maîtres, et d’aborder la
question qui est comme la moralité de notre enquête.

Vasari (et après lui M. Dimier) fait honneur au Primatice de tous les dessins
destinés à la décoration de Fontainebleau ; il lui subordonne expressément
Niccolô dell’ Abbate ! Mais cela ne viendrait-il pas de ce que le brave biographe
connaissait personnellement le Primatice et, partant, qu’il inclinait à exagérer
son omnipotence ?

Pour mettre les choses au point, rappelons-nous ce qui s’était passé à Rome,
au Vatican, une trentaine d'années auparavant, à l’époque où Raphaël dirigeait
pour le pape Léon X les décorations des Stances et des Loges. Qui oserait soutenir
qu’il exécuta de sa main tous les cartons ou simplement toutes les esquisses des
salles de Charlemagne ou de Constantin ! Pour les Loges, le Sanzio se montra
moins jaloux encore de son autorité ; à peine s’il composa les esquisses des pre-
mières arcades, s’en remettant à ses élèves du soin d’orner les autres à leur
guise. Eh bien, il en fut de même du Primatice. Comment admettre qu’il ne
se soit pas reposé sur ses collaborateurs pour l’invention d'une foule de scènes
secondaires !

M. Dimier s’est montré dur pour le plus éminent de ces collaborateurs :
Niccolô dell’Abbate ; il n’a pas hésité à l'immoler sur l’autel du Primatice.
Niccolô, dit-il, « fut de cette espèce d’artistes qui font beaucoup pour la gloire
d’une école, parce que, avec des pensées communes, ils ont un tour de main
aisé et spirituel, propre à multiplier sans fin les échantillons d’un même style et
à donner comme la monnaie des maîtres. Tout ce qui, dans le Primatice, est
invention rare, prend sous sa plume un tour populaire et banal, mais où se lit
comme la promesse d’une extraordinaire fécondité. C’est comme une essence
fine dont il tire cent mélanges. » Ajoutons que M. Dimier reconnaît cependant à
Niccolô le mérite d’avoir porté à Fontainebleau un art que le Primatice ne con-
naissait pas, celui de peindre le paysage.

Nous objecterons que Niccolô avait fait ses preuves quand il s’établit à Fontai-
nebleau (en 1552, au plus tard). Son superbe tableau de la Galerie de Dresde, le
Martyre de saint Pierre, dans le goût d’Andrea del Sarto, mais plus chaud, ses
décorations de Modène, de Reggio, de Sassuolo, de Scandiano, de Bologne, le
palais Torfanini, le palais Poggi, transformé en Institut des Beaux-Arts, etc.,
avaient répandu son nom au loin. Lorsqu’il vint se fixer à la cour de France, il
eut l’honneur si envié de faire le portrait du roi et de la reine et reçut une
pension brillante L

Est-il admissible qu’un-maître si célèbre n’ait joué qu’un rôle secondaire
dans la décoration du château de Fontainebleau?

Je ne suis pas seul à rompre une lance en faveur de cette victime de la cri-
tique moderne. M. Reiset aussi a trouvé peu probable qu'un peintre si renommé
par ses travaux antérieurs ait complètement renoncé à inventer de son chef. Il

1. En 1567, Charles IX écrivit au duc de Ferrare pour lui recommander un frère de
Niccolô dell’Abbate. (Venturi: Archivio storico dell'Arte, 1889, p. 160).
 
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