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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 28.1902

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https://doi.org/10.11588/diglit.24810#0463

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

juger sans parti pris et sans haine. D’autres causes encore ont pu agir efficace-
ment et hâter ce retour d’équité. L’histoire — l’histoire de l’art plus que nulle
autre — est semblable à un procès, toujours pendant, qui sans cesse se plaide
et se revise. Or, depuis la mort d’Édouard Manet, les pièces de son procès ont été
placées coup sur coup sousles yeux du public, comme pour l’amener à casser
lui-même ses premiers arrêts. Réuni presque dans son entier à l’École des
Beaux-Arts en 1884, l’œuvre reparut fragmentairement lors des Expositions
centennales de 1889 et de 1900; la dévotion fidèle de Henri Guérard révéla, au
Salon des Peintres-Graveurs de 1893, la suite ignorée des lithographies, des
eaux-fortes, et il n’est guère d’année où M. Durand-Ruel ne se plaise à consti-
tuer dans ses galeries, en manière d’hommage, quelque ensemble de peintures
de Manet.

Chacune de ces manifestations a pris, au regard de l’opinion, le sens et la
portée d'une démonstration nouvelle, singulièrement convaincante; peu à peu
l’hostilité de la veille s’est éteinte pour faire place à une sympathie toujours plus
décidée, bientôt admirative. Cette lente mais sûre conquête delà faveur, Manet
la doit à la remise en lumière persistante de ses ouvrages; il la doit aussi à la
vertu des commentaires dont ils n'ont pas cessé d’être l’objet. Au moment de
l’exposition posthume, Edmond Bazire faisait paraître son plaidoyer ému pour
un ami mort; de”son côté, M. Jacques de Biez conservait, par la brochure, le
souvenir d’une éloquente conférence prononcée à la salle des Capucines; plus
tard, la Revue blanche s’honorait à publier des notes sur Manet, qui abondent
en souvenirs curieux, en menus faits caractéristiques, et dont l’auteur n’est
autre que M. Antonin Proust, le condisciple du peintre chez Couture, puis,
dans la suite, son protecteur politique; il y a quelques mois, M. H. von Tschudi
prouvait, par une étude sagace et renseignée, la grande place que la critique
étrangère accorde au peintre d’Olympia; enfin, c’est l’histoire même de la vie
et de l'œuvre de Manet que nous offre, dans un livre définitif, M. Théodore Duret.
Exécuteur testamentaire de l’artiste, instigateur de l’exposition du quai Malaquais,
M. Théodore Duret était mieux préparé que quiconque pour mener à terme
une pareille tâche. Il a raconté joliment l’aventure de sa première rencontre
avec Manet, hors de France, en 186o, et comment prit date, dès cette époque
lointaine, une affection dont rien ne vint troubler la douceur. M. Théodore
Duret, collectionneur et écrivain à ses heures, ne ménagea point à Manet les
témoignages d’assistance et de réconfort; on en trouve l’expression vibrante
dans le Salon de l'Électeur libre (1870), au cours de la brochure sur les Peintres
impressionnistes (1878) et surtout dans la préface qui ouvre le catalogue de la
vente posthume (1884) h Cependant, pour élever à Manet le monument que
réclamaient son admiration et son amitié, M. Théodore Duret a voulu attendre
1 heure de la justice et des consécrations officielles. Aujourd’hui, le don de
l’Olympia (1889) et le legs Caillebolte (1897) ont ouvert à Manet les portes du
musée du Luxembourg; dans les collections publiques et privées des deux mondes,
ses peintures sont installées en bonne place, et on les recherche avec d’autant
plus d’avidité que sans elles l’évolution de l’art moderne demeurerait inintelli-

1. Ce Salon, cette brochure et cette préface ont été réimprimés (p. 1, p. 53 et p. 117)
dans Critique d'avant-garde (Paris, Charpentier, 1883). Le volume est dédié par l’au-
teur : A la mémoire de mon ami Manet.
 
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