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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 28.1902

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Nr. 6
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Cain, Georges: Le legs Dutuit
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https://doi.org/10.11588/diglit.24810#0487

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

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L’art byzantin et l’art des Limosin et des Pénicaud triomphe dans ces
vitrines. Les ivoires, les bois sculptés, les bijoux Renaissance, les
orfèvreries religieuses, mettent leur note exquise dans ce merveilleux
ensemble.

Non pas, je le répète, que tout soit chef-d’œuvre ; mais dans
chaque section les objets de premier choix et de haute valeur
abondent.

La recherche de ces belles choses nous fit passer de bien douces
heures dans le vieux logis du quai du Havre où elles étaient entas-
sées, et dans quelle stupéfiante confusion! Mais chaque jour amenait
sa découverte.

M. Dutuit, n’ayant pas constitué sa collection en vue de sa propre
satisfaction, ne se donnait pas la peine de la classer; — que dis-je?
il n’en prenait même pas livraison, et la plupart du temps les objets
une fois acquis restaient emmagasinés chez les marchands qui les
avaient vendus — ou étaient remisés chez l’emballeur Chenue, dans
les magasins de qui nous avons retrouvé des caisses remplies de
merveilles, et non ouvertes depuis vingt-cinq ans. C’est que
M. Dutuit, poursuivant la plus noble des tâches, travaillait pour
l'avenir. Il destinait ses collections à la Ville de Paris; il savait
qu après lui des mains pieuses en prendraient possession, et jusqu’à
la fin il consacra son temps, son activité et son argent à préparer
cet ensemble remarquable de belles œuvres que nous admirons
aujourd’hui.

Jaloux de ses affections, un peu misanthrope, original même,
insoucieux du monde, méprisant les usages reçus, il vivait solitaire
et modeste. Ceux qui le connaissaient bien l’estimaient infiniment;
ils se plaisent à vanter la sûreté de son cœur, l’exquise bonté de son
âme, et nous tous, qui aujourd’hui goûtons la plus rare des joies à
admirer les trésors que nous lègue sa générosité, ne ressentons-nous
pas une véritable émotion à penser que c’est pour nous que ce brave
homme a peiné, a dépensé sa fortune et s’est dépensé lui-même?
Aussi est-ce avec un respect profond et une reconnaissance infinie
que Paris saluera le souvenir des deux frères au cœur généreux qui
lui firent ce don royal

GEORGES CAIN
 
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