L'HELLÉNISME D'EUGENE FROMENTIN
n pourrait arriver à la définition d’Eugène
Fromentin en le dédoublant, comme il a
procédé, dans les Maîtres d’autrefois, à
l’égard de Rubens et de Rembrandt, et faire
de lui, dès ses années de collège à La
Rochelle, ces deux parts bien distinctes : le
sensitif, l’intellectuel.
Chez le premier, la lecture de livres qui
étaient alors comme les compagnons et les
confidents de la jeunesse littéraire, les Con-
fessions de Jean-Jacques, Werther, René,
Obermann, Volupté, entretiennent le goût de la rêverie et de la promenade
solitaire, et de l’entretien muet avec les choses de la nature. De ce sensitif
épris de paysages de silence, et à l’œil, l’oreille, l’odorat exercés duquel une
heure de promenade dans la campagne ne dérobera rien de ses délices,
Sainte-Reuve a pu écrire : « Il n’a pas trop de tous ses sens pour rendre son
impression totale et harmonieuse. »
L’intellectuel, docile aux enseignements d’un maître de valeur (qui a
laissé un nom dans les lettres charenlaises, Léopold Délayant), leur réserve
une autorité qui le rendra vite au sentiment des classiques. Il s’est à ce point
pénétré du génie des écrivains de l’antiquité, qu’il ne cessera jamais d être
en contact avec eux. C’est ainsi qu’un jour, en face du désert, la plaine
aride qu’il voit s’étendre du faîte des remparts d’Aïn-Mahdy, où se lisent
encore les meurtriers combats des premiers temps de l’occupation, lui
rappelle la plaine d’Ilion ou celle aussi que dominent les murailles de la ville
dans les Sept contre Thèbes ; et son commentaire d’artiste nous fait admira-
blement ressortir toute la valeur plastique de ces figures d’Andromaque ou
n pourrait arriver à la définition d’Eugène
Fromentin en le dédoublant, comme il a
procédé, dans les Maîtres d’autrefois, à
l’égard de Rubens et de Rembrandt, et faire
de lui, dès ses années de collège à La
Rochelle, ces deux parts bien distinctes : le
sensitif, l’intellectuel.
Chez le premier, la lecture de livres qui
étaient alors comme les compagnons et les
confidents de la jeunesse littéraire, les Con-
fessions de Jean-Jacques, Werther, René,
Obermann, Volupté, entretiennent le goût de la rêverie et de la promenade
solitaire, et de l’entretien muet avec les choses de la nature. De ce sensitif
épris de paysages de silence, et à l’œil, l’oreille, l’odorat exercés duquel une
heure de promenade dans la campagne ne dérobera rien de ses délices,
Sainte-Reuve a pu écrire : « Il n’a pas trop de tous ses sens pour rendre son
impression totale et harmonieuse. »
L’intellectuel, docile aux enseignements d’un maître de valeur (qui a
laissé un nom dans les lettres charenlaises, Léopold Délayant), leur réserve
une autorité qui le rendra vite au sentiment des classiques. Il s’est à ce point
pénétré du génie des écrivains de l’antiquité, qu’il ne cessera jamais d être
en contact avec eux. C’est ainsi qu’un jour, en face du désert, la plaine
aride qu’il voit s’étendre du faîte des remparts d’Aïn-Mahdy, où se lisent
encore les meurtriers combats des premiers temps de l’occupation, lui
rappelle la plaine d’Ilion ou celle aussi que dominent les murailles de la ville
dans les Sept contre Thèbes ; et son commentaire d’artiste nous fait admira-
blement ressortir toute la valeur plastique de ces figures d’Andromaque ou