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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 5. Pér. 12.1925

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Nr. 4
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Vitry, Paul: André Michel (1853 - 1925)
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https://doi.org/10.11588/diglit.24946#0352

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

d'esprit et de cette faculté d’attention sympathique qui devait lui faire
jusqu’au bout une place éminente parmi ses confrères. Bientôt les expositions
Millet (1887), Puvis de Chavannes (1888), Delacroix (1889) allaient lui
donner matière à quelques unes de ces solides études qu’il a réunies plus
tard dans ses Notes sur l’art moderne.

En 1886 il était entré au Journal des Débats, appelé par Jules Dietz pour
remplacer Charles Clément momentanément éloigné de Paris au moment du
Salon. Il allait y lier des amitiés durables et sa collaboration dont on sait
l’abondance et l’éclat devait se continuer près de quarante ans : actualités,
« au jour le jour », comptes-rendus de livres, feuilletons, causeries, prome-
nades aux Salons, il y donna tous les genres d’articles qu’un journaliste
d’art peut être amené à aborder, mais en gardant à la moindre de ses notes
cette tenue el cet accent où se révélaient à la fois sa haute culture et sa
conscience d’homme. Il ignorait la complaisance et la partialité. S'il eut
parmi les artistes vivants, parmi les plus grands et les plus nobles, un Cazin,
un Chaplain, un Roll, un Puvis de Chavannes, des relations et même des
amitiés sincères, il sut garder une rare indépendance, une hauteur intan-
gible qui honorait singulièrement la profession qu’il aimait et qui rendait
particulièrement valables et respectés ses enquêtes et ses jugements.

Aucune allure dogmatique du reste dans celte critique qui abordait par-
fois les plus hauts sujets d’érudition et savait les mettre à la portée des
lecteurs du journal, aucune pédanterie dans ces revues de la production
contemporaine menées au hasard des rencontres et des attractions senti-
mentales, un souci seulement de faire le départ entre l’artificiel et le vrai,
de « découvrir l’empreinte que la nuance particulière et la qualité de la
volonté de l’artiste et de ses préférences, de sa sensibilité et de son amour,
ont laissée sur son œuvre», un souci permanent de sincérité, de santé et de
gravité morale.

Voyez plutôt le début du Salon de 1898.

« Nous irons nous promener et non pas travailler aux Salons; nous nous donne-
rons rendez-vous devant les œuvres,— tableau ou statue, gravure ou bibelot, monu-
ment ou bijou, — qui nous inviteront au passage et nous avertiront par un je ne
sais quoi d’intime et de secret qu’elles ont reçu la confidence et le dépôt d’une
volonté, d'un amour ou d’un rêve, — et nous essayerons de dire ce qui nous touche
en elles... ou ce qui nous déroute. Et si, chemin faisant, nous nous apercevons que
nous aimons des choses très différentes, (pie nous nous laissons émouvoir ou per-
suader par des manières de chercher le bonheur, comme disait Stendhal, ou des
façons de peindre et d'« ouvrer » qui semblent contradictoires, nous nous expli-
querons, si nous pouvons, ces apparentes incohérentes, — et, si nous ne le pouvons
pas, nous en prendrons humblement notre parti; car l’essentiel en ce pauvre monde
n'est pas de raisonner, c’est d’aimer, — et d’être sincère envers soi-même d’abord et
les autres ensuite. »
 
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