Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 1.1859

DOI Heft:
Nr. 3
DOI Artikel:
Viardot, Louis: Ary Scheffer
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.16986#0134

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
L30 G ÎZETTE DES BEAI V MiïS.

Il était l'aîné des trois fils d'un peintre qui n'ont pas le temps de mûrir
son talenl naturel, et qui, mort jeune, les laissa de bonne heure orphelins.
Leur mère, femme forte par l'intelligence et le sentiment, prit en main
l'éducation de ses fils, et sut en faire des hommes. Elle les laissa suivre
chacun sa vocation, se bornant à les accompagner d'un œil clairvoyant, à
les diriger de solides conseils dans la voie qu'ils s'étaient ouverte. Tandis
que l'un d'eux, Arnold, travaillait à se faire un nom comme historien et
publiciste, les deux autres, Ary et Henri, prirent la carrière où leur père
était tombé dès les premiers pas. Ary n'y entrait point par une de ces déci-
sions de parents, qui, s'aveuglant sur de fausses aptitudes, envoient leur
fils dans un atelier comme ils l'enverraient à l'école de Saint-Gvr ou au
séminaire, et, lui faisant manier malgré Minerve la brosse ou l'ébauchoir,
le condamnent à une vie manquée, stérile et pénible, qui s'usera dans
l'obscurité, dans le besoin, dans le dégoût et la haine d'un état pris à
contre-cœur. Né artiste, il se montra tel dès l'enfance. Amsterdam ren-
ferme encore quelques vieux amateurs qui n'ont point oublié que , vers
l'année 1807, au début du règne de Louis Bonaparte, un tableau reçut les
honneurs de l'exposition publique, qui était l'ouvrage d'un enfant de
douze ans. Cet enfant était Ary Scheffer.

Une telle précocité pouvait devenir dangereuse, et bien des petits pro-
diges n'ont plus donné que de la fumée après la trop prompte explosion
d'un premier feu. Mais certainement la précocité clans la culture des arts
est la condition nécessaire d'une supériorité future et le gage le plus
assuré du succès. On peut voir, dans les autres carrières, même les lettres,
même la poésie, l'exemple de talents, de génies peut-être, qui longtemps
s'ignorent et ne se révèlent que tardivement. Témoin Montaigne, Jean-
Jacques, Walter Scott et bien d'autres. Le mot du Francaleu de la ML-
tr ornante i

Ce talent dans ma tête un beau jour se trouva,
Et j'avais cinquante ans quand cela m'arriva,

peut à la rigueur trouver ses applications. Mais, dans tous les arts, il faut
que le goût inné, l'aptitude naturelle paraissent, éclatent aux premières
lueurs de l'intelligence ; il faut que ce goût, cette aptitude prennent et fa-
çonnent à leur service, dès le premier âge, les organes qui doivent leur obéir
tout le reste de la vie. « Pas de Raphaël sans des doigts de fée, dit M. Vitet,
tandis qu'on peut si bien écrire en tenant si mal sa plume ! » Cette règle est
tellement générale , tellement inhérente à la nature humaine, qu'on cher-
cherait en vain, dans l'histoire des arts, l'exemple du génie sans préco-
cité, même parmi ceux qui ont grandi avec l'âge par l'expérience, par la
 
Annotationen