DOI Heft:
Nr. 2
DOI Artikel:Saglio, Edmond: De nos relations avec l'art allemand
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DE NOS RELATIONS AVEC L'ART ALLEMANM)
La Gazette des Beaux-Arts doit être le courrier européen de l'art et
de la curiosité. Déjà elle a mieux fait que de l'annoncer sur son titre et
dans son introduction. Les nouvelles des départements, les correspon-
dances étrangères contenues dans sa première livraison, ont témoigné
qu'elle portait au loin ses regards. Ce premier numéro n'a offert toutefois
qu'un spécimen encore incomplet du tableau qu'elle veut présenter à ses
lecteurs et renouveler périodiquement sous leurs yeux, en explorant pour
eux tous les pays, en cherchant l'art partout où il se produit, vit et se
développe partout où les efforts se multiplient, plus actifs aujourd'hui que
jamais, pour constituer son histoire, partout enfin où il a laissé debout
des monuments glorieux ou seulement imprimé sa marque divine dans
quelque humble objet façonné pour les usages domestiques.
Assurément elle ne peut oublier l'Allemagne. La nation savante, poé-
tique, originale, qui s'est montrée si hardie et si puissante dans la décou-
verte et l'analyse des lois théoriques de l'art, et qui met tant de persévé-
rance à en poursuivre actuellement l'applicatiomdans la pratique, a bien
des titres à être mieux connue en France qu'elle ne l'a été jusqu'ici. Dans
son passé, pour nous si obscur, quelques noms tels que ceux des Durer
ou des Holbein brillent, il est vrai, aussi éclatants que les plus illustres
de l'Italie ou de la Flandre; mais, sans que nous sachions exactement ni
la place qu'ils occupent dans l'histoire de l'art de leur patrie, ni quelle place
cette histoire elle-même doit tenir dans celle de l'art moderne; ce sont des
astres isolés, comme les étoiles d'une nuit claire. Des nombreux hommes
de talent, groupés autour de ces grands maîtres, peintres, sculpteurs,
graveurs, orfèvres, artisans de toutes les industries voisines de l'art,
qui en renouvelèrent les modèles pendant un demi-siècle et les répandirent
dans l'Europe entière, les noms et les œuvres nous sont à peu près étran-
gers. Nous ne connaissons pas mieux les artistes qui les ont précédés au
moyen âge, ni ceux qui vinrent chercher en France l'art gothique que nos
architectes y avaient créé, ni les contemporains de ces empereurs gibelins
dont les palais et les cathédrales ne se peuvent comparer, pour la noblesse
La Gazette des Beaux-Arts doit être le courrier européen de l'art et
de la curiosité. Déjà elle a mieux fait que de l'annoncer sur son titre et
dans son introduction. Les nouvelles des départements, les correspon-
dances étrangères contenues dans sa première livraison, ont témoigné
qu'elle portait au loin ses regards. Ce premier numéro n'a offert toutefois
qu'un spécimen encore incomplet du tableau qu'elle veut présenter à ses
lecteurs et renouveler périodiquement sous leurs yeux, en explorant pour
eux tous les pays, en cherchant l'art partout où il se produit, vit et se
développe partout où les efforts se multiplient, plus actifs aujourd'hui que
jamais, pour constituer son histoire, partout enfin où il a laissé debout
des monuments glorieux ou seulement imprimé sa marque divine dans
quelque humble objet façonné pour les usages domestiques.
Assurément elle ne peut oublier l'Allemagne. La nation savante, poé-
tique, originale, qui s'est montrée si hardie et si puissante dans la décou-
verte et l'analyse des lois théoriques de l'art, et qui met tant de persévé-
rance à en poursuivre actuellement l'applicatiomdans la pratique, a bien
des titres à être mieux connue en France qu'elle ne l'a été jusqu'ici. Dans
son passé, pour nous si obscur, quelques noms tels que ceux des Durer
ou des Holbein brillent, il est vrai, aussi éclatants que les plus illustres
de l'Italie ou de la Flandre; mais, sans que nous sachions exactement ni
la place qu'ils occupent dans l'histoire de l'art de leur patrie, ni quelle place
cette histoire elle-même doit tenir dans celle de l'art moderne; ce sont des
astres isolés, comme les étoiles d'une nuit claire. Des nombreux hommes
de talent, groupés autour de ces grands maîtres, peintres, sculpteurs,
graveurs, orfèvres, artisans de toutes les industries voisines de l'art,
qui en renouvelèrent les modèles pendant un demi-siècle et les répandirent
dans l'Europe entière, les noms et les œuvres nous sont à peu près étran-
gers. Nous ne connaissons pas mieux les artistes qui les ont précédés au
moyen âge, ni ceux qui vinrent chercher en France l'art gothique que nos
architectes y avaient créé, ni les contemporains de ces empereurs gibelins
dont les palais et les cathédrales ne se peuvent comparer, pour la noblesse