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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3.1859

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Nr. 5
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La Fizelier̀e, Albert de: L' art et les femmes en France, [3]: Madame de Pompadour
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https://doi.org/10.11588/diglit.16988#0311

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306

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Kilo voulait bien que son théâtre particulier fût le théâtre de la fan-
taisie, mais elle exigeait pour la scène française des visées plus hautes et
un retour au grand art de Molière.

« Je n'aime point du tout votre Gouvernantedu bonhomme La Chaussée,
parce que cette comédie n'est pas une comédie, puisqu'elle fait pleurer au
lieu de faire rire.

« Ce faux genre larmoyant est ridicule et choque la vraisemblance ;
cependant il devient à la mode parce qu'il est plus facile de se guinder sur
de grands sentiments de tragédie, que de plaisanter avec grâce : le génie
comique est mort avec Molière. »

a Un autre vice de la scène française, dit-elle ailleurs, c'est qu'on n'y
voit que de grands seigneurs, comme si tous les hommes étaient des mar-
quis. Un auteur se croirait déshonoré s'il mettait sur le théâtre des bour-
geois et des marchands : les Anglais y mettent même des savetiers, et en
cela je les approuve. La comédie est une peintnre de la vie humaine et
un savetier est un homme comme un autre.

a Nos comiques ont le grand défaut cle n'attaquer jamais que des ridi-
cules : il faudrait plutôt attaquer les vices. Un homme ridicule ne fait pas
de mal et il fait rire, mais un homme vicieux est nuisible à la société et
il l'afflige. »

Entourée d'une cour jeune, aimable, folâtre, insatiable de plaisirs,
Mme de Pompadour était placée à ravir pour donner l'essor à ses aspirations
scéniques. Depuis plus de trois ans le roi raffolait d'elle sans que cette
passion l'eût jamais soustrait à un goût très-prononcé pour le vin, la chasse
et le jeu. La marquise aurait voulu faire succéder à une dissipation dont
les suites l'effrayaient pour la durée de sa faveur, l'amour des lettres,
des arts et des plaisirs de l'esprit; vers 17M, elle entreprit de mettre à
profit les éléments qu'elle avait à sa discrétion pour organiser les spec-
tacles de la cour.

L'agrément que Louis XV prit aux premières tentatives de ce genre,
et le succès que Mme de Pompadour obtint, à ses débuts, comme actrice et
comme chanteuse, décidèrent du sort de ce nouvel amusement, et le théâtre
des petits appartements ou des petits cabinets, comme on l'appela familiè-
rement, fut créé.

La troupe se recruta immédiatement parmi les seigneurs et les dames
qui avaient déjà joué la comédie de société, et fut composée comme il suit.
Pour la comédie : MM. le duc d'Orléans, le duc de Duras, le duc d'Ayen, le
duc de Nivernois, lç comte de Maillebois, le marquis de Courtenvaux, le
duc de Coigny, le marquis d'Entraigues, le comte de Meuse, le prince de
Soubise; M"'cs la duchesse de Brancas, la marquise de Pompadour, la
 
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