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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 15.1863

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Blanc, Charles: Grammaire des arts du dessin, 1, Architecture, 24: architecture, sculpture, peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.17334#0035

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GRAMMAIRE UES ARTS U U DESSIN.

31

On le voit, les ordres n’étaient à Rome qu’un luxe d’emprunt, un
habillement sans rapport avec la chose habillée. Gela est si vrai, que les
membres de la construction grecque qui rappelaient la charpente sont
reproduits par les Romains là où il n’y a que des voûtes.

Dans un monument circulaire et voûté, comme le théâtre de Mar-
cellus, que signifient les entablements grecs? Que représentent les tri—
glyphes, les gouttes, les denticules, là où il ne put jamais y avoir ni
poutres, ni chevilles, ni solives? Pourquoi conserver les images com-
mémoratives d’une construction en bois qui n’a jamais existé dans le
système des arcs?

Une chose pourtant recommande les artistes romains : c’est la nou-
veauté et le caractère ingénieux de leurs plans. Us remplissent avec
bonheur, avec aisance, les programmes les plus compliqués. Théâtres,
amphithéâtres, thermes, camps, prétoires, hippodromes, basiliques, ils
savent disposer tous les bâtiments d’utilité publique avec une habileté
rare. S’agit-il, par exemple, de construire des bains pour une popula-
tion nombreuse ? Tous les besoins sont prévus, étudiés et satisfaits.
Larges abords, facilité de la circulation, transitions hygiéniques ména-
gées entre l’air intérieur et la température du dehors, gymnases, jardins,
promenoirs, salles de conversation, rien n’est oublié de ce que deman-
dent le corps et l’esprit d’un homme civilisé. Et l’architecte ne perd pas
un pouce de son terrain; il utilise tous les vides : pour la convenance, en
y distribuant les petits services; pour la solidité, en les couvrant par de
petits arcs, qui, adossés aux grandes voûtes, leur servent de contre-forts.

L’architecture romaine est essentiellement pratique et pour ainsi dire
administrative; elle traduit en pierre les décrets du sénat, les édits du
prince, les ordres du consul, et sous ce rapport elle est un modèle...
Mais, il importe de s’en souvenir, l’utile n’est pas le beau, et la conve-
nance n’est qu’une partie de l’art. Ce n’est donc pas à l’école des Romains
que nous devons apprendre T architecture, si nous ne voulons pas nous
borner à être des constructeurs, des ingénieurs. Les maîtres, les vrais
maîtres de ce grand art, ce sont les Grecs. Ceux-là nous enseigneront,
non-seulement une architecture admirable, mais les principes en vertu
desquels on pourra la changer, la transformer, en inventer une autre.
Par eux la convenance et la beauté ont été soudées si merveilleusement,
quelles sont devenues inséparables. De l’étude approfondie de leurs
monuments se dégage cette vérité lumineuse : que l’architecture n’est pas
une construction que l’on décore, mais une décoration qui se construit.

CHARLES BLANC.
 
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