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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 15.1863

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Nr. 6
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Goncourt, Edmond de; Goncourt, Jules de: Chardin, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.17334#0539

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CHARDIN

i.

orsqu’on entreprend de parler de l’art du
xvine siècle, de toucher à la mémoire
de ses artistes, il vous prend au seuil de
cette étude un grand sentiment de tristesse,
une sorte de mélancolique colère. Devant
ce prodigieux exemple d’oubli, devant l’excès
d’ingratitude et l’insolence de mépris d’une
première postérité pour le grand siècle d’art
de Louis XV, on se prend à douter des jus-
tices de la France. On se demande si la mode est tout notre goût, et si
notre orgueil national lui-même ne relève pas de la mode avec la consciencè
de nos jugements. Quoi! se dit-on, c’est la France, la France si jalouse
de ses autres gloires, qui a négligé celles-là, sorties pourtant toutes vives
de son tempérament, de son caractère, de ses entrailles, frappées à l’image
de tous ses traits! C’est la France qui, pendant tout un demi-siècle, a
refusé de reconnaître les artistes vraiment nés d’elle, ses maîtres français,
les vrais fils de son esprit et de son génie !

Et cela pendant qu’autour de nous les nations voisines entouraient de
leur admiration fervente, de leur culte pieux, leurs plus petites célébrités
d’art; pendant qu’à l’étranger, la popularité, la publicité, l’éloge, la
biographie, le bruit des ventes, l’argent du grand seigneur et du ban-
quier descendaient aux moindres artistes, aux plus humbles décadents na-
tionaux! Là, point de retour, point de changement, point de révolution
de doctrine enterrant un genre ou un homme : nulle immortalité n’y
vieillit; et le temps, en passant sur les œuvres et sur les noms, ne fait
 
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