LA STATUE DE LOUIS XV
EXÉCUTÉE PAR J. - B. L E M 0 Y N E
POUR LA VILLE DE ROUEN
u milieu du xvme siècle la ville de
Rouen s'ennuyait de la charmante
et pittoresque physionomie que lui
avaient léguée le moyen âge et la
Renaissance. Elle ne trouvait pas
que le temps rongeât assez vite les
monuments de son histoire; elle son-
geait déjà à se démolir et rêvait de
transporter sur les bords déblayés
de la Seine les plus lourdes construc-
tions de la décadence italienne. Je lais-
serai un contemporain, et qui plus est un architecte, nous exposer l'im-
périeux besoin d'embellissement éprouvé par la capitale de la Normandie
et nous affirmer, de la meilleure foi du monde, que « Rouen ne possé-
dait, en 1757, aucun édifice remarquable à l'exception de la Cathédrale,
de Saint-Ouen, du Pont de bateaux et de l'Hôtel de ville », construction
alors récente. Ce qui m'étonne c'est que, de 1757 à 1765 \ deux monu-
ments du moyen âge aient trouvé grâce devant un savant professeur d'ar-
chitecture. Mais le pédant se dédommageait bien vite de cette coupable
condescendance et, pour sauver les principes, déclarait en même temps,
par son omission, que le Palais de Justice, l'église Saint-Maclou et l'hôtel
de Bourgthéroulde n'étaient pas des édifices remarquables. On prévoit
aisément les conséquences de cette condamnation tacite. Vienne quelque
projet bien académique et Rouen serait bientôt débarrassé de ces insup-
portables témoins de la « gothique barbarie ». Fort heureusement ces cri-
minelles espérances ne purent triompher des vieux souvenirs rouennais.
\. C'est la date où fut publié le livre de Patte sur les Monuments érigés en France
à la gloire de Louis XV.
EXÉCUTÉE PAR J. - B. L E M 0 Y N E
POUR LA VILLE DE ROUEN
u milieu du xvme siècle la ville de
Rouen s'ennuyait de la charmante
et pittoresque physionomie que lui
avaient léguée le moyen âge et la
Renaissance. Elle ne trouvait pas
que le temps rongeât assez vite les
monuments de son histoire; elle son-
geait déjà à se démolir et rêvait de
transporter sur les bords déblayés
de la Seine les plus lourdes construc-
tions de la décadence italienne. Je lais-
serai un contemporain, et qui plus est un architecte, nous exposer l'im-
périeux besoin d'embellissement éprouvé par la capitale de la Normandie
et nous affirmer, de la meilleure foi du monde, que « Rouen ne possé-
dait, en 1757, aucun édifice remarquable à l'exception de la Cathédrale,
de Saint-Ouen, du Pont de bateaux et de l'Hôtel de ville », construction
alors récente. Ce qui m'étonne c'est que, de 1757 à 1765 \ deux monu-
ments du moyen âge aient trouvé grâce devant un savant professeur d'ar-
chitecture. Mais le pédant se dédommageait bien vite de cette coupable
condescendance et, pour sauver les principes, déclarait en même temps,
par son omission, que le Palais de Justice, l'église Saint-Maclou et l'hôtel
de Bourgthéroulde n'étaient pas des édifices remarquables. On prévoit
aisément les conséquences de cette condamnation tacite. Vienne quelque
projet bien académique et Rouen serait bientôt débarrassé de ces insup-
portables témoins de la « gothique barbarie ». Fort heureusement ces cri-
minelles espérances ne purent triompher des vieux souvenirs rouennais.
\. C'est la date où fut publié le livre de Patte sur les Monuments érigés en France
à la gloire de Louis XV.