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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 12.1875

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Nr. 6
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Bonnaffé, Edmond: Le pour et le contre
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https://doi.org/10.11588/diglit.21841#0523

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LE POIL ET LE CONTRE.

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« En doutez-vous? Doutez-vous que nous traversions une de ces
crises si fréquentes dans notre histoire et qui sont le propre de notre
race? Doutez-vous que ces phénomènes soient le présage assuré d'une
renaissance prochaine? Interrogez le passé : le génie national, impatient
des longues prospérités, a besoin de ces secousses périodiques pour
reprendre son élan; jamais il ne se montre plus souple et plus ingénieux
pour venir au secours de l'école et organiser une renaissance.

« C'est lui qui, aux approches de l'ouragan barbare dans les Gaules,
ouvrait les portes des monastères et faisait rentrer dans ces silos choisis
par Dieu la première récolte de l'art national; — c'est lui qui plus tard,
prenant l'habit de saint Benoît, arrachait une dernière fois aux envahis-
seurs la civilisation naissante et répandait l'enseignement de la grande
famille clunisienne. — C'est lui qui, au réveil menaçant de l'indépen-
dance communale, abandonnait le froc pour se faire laïque, organisait
les corporations, instituait l'apprentissage et, de la tombe où la tradition
romane venait de se coucher dans sa gloire, faisait jaillir un art neuf,
libre et personnel, l'art ogival, impérissable honneur de l'École française.
— Et quand le colosse gothique tombait à son tour, cà bout de combi-
naisons et d'audaces, c'est le génie national toujours indomptable qui
s'emparait de la jeune antiquité pour la greffer sur le vieux tronc gau-
lois et ouvrait la première fleur de la Renaissance au printemps des
siècles modernes. — C'est lui qui, réfugié en province, tenait tète à l'in-
vasion italienne patronnée par les "Valois et sauvait encore une fois le
dépôt des traditions nationales. C'est lui enfin qui conspirait naguère
avec Géricault contre la dictature académique et, entraînant l'école dans
la révolte du romantisme, assurait l'affranchissement et les triomphes
de l'art contemporain.

« C'est lui qui nous sauvera encore, je l'atteste au lendemain de
nos désastres, quand le prodigieux réveil de la patrie étonne déjà le
monde et consterne ses ennemis; je l'atteste devant l'histoire de notre
race féconde en rebondissements superbes. Le génie de la France court
à travers les siècles, emporté comme Mazeppa sur son cheval; quand
il tombe, dit le poëte,

11 se relève roi. »

EDMOND BONNAFFÉ.

MI. — 2e PÉRIODE

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