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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 22.1880

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Nr. 1
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Chennevières-Pointel, Charles Philippe de: Le Salon de 1880, 3
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https://doi.org/10.11588/diglit.22842#0066

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58

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

et de genêts en fleur? Il est de Mme Cazin, la femme du peintre à'Ismaël
et de Tobie. L'œuvre est charmante, d'une naïveté et d'une harmonie
exquises; tout au plus pècherait-elle par quelques menues lourdeurs
dans le ciel. Mais ce n'est point là l'observation qu'éveille tout d'abord
le tableau. Certes il est bien naturel qu'une femme doive son respect et
sa piété admirative aux ouvrages de son mari, surtout quand celui-ci se
révèle à nous par des qualités aussi singulières et qui promettent à notre
école un décorateur de si haut sentiment dans la lignée de Puvis de Gha-
vannes ; mais, pour le coup, cette religion de la jeune artiste pour la
manière de son mari l'a conduite de prime abord à une exécution qui
tromperait l'œil le mieux exercé, et, encore une fois, nous ne pouvons
lui en faire un reproche. Voilà un atelier où l'on ne vit point dans les
bas-fonds de l'art. Et si vous voulez juger de ce que peut, par un
autre côté, la même M'ne Cazin, allez aux dessins, et voyez cette tête de
femme crayonnée puissamment, cette nuque nerveuse, avec ses cheveux
rabattus sur son morne profil, et que le livret intitule la Tristesse. Je ne
crois pas que, parmi nos plus grands artistes aujourd'hui vivants, il s'en
trouve un capable de nous retraduire avec une telle vigueur profonde la
terrible mélancolie de Michel-Ange. Et pendant que vous serez dans ces
salles des dessins, cherchez un autre cadre, celui-là signé du nom de
M. Cazin, et qu'il a tout bonnement appelé la Terre. C'est Adam et Eve
chassés par l'ange du jardin de délices, et commençant à gravir les dunes
âpres et stériles qui leur donneront le pain à la sueur de leur front. Ce
simple dessin, colorié à la cire et au pastel dans les tons doux et calmes
de Y-Ismaël) porte en lui-même une telle grandeur, qu'il semble le carton
d'une fresque immense. Et maintenant, heureux monsieur Cazin, heureuse
madame Cazin, souvenez-vous de ce à quoi vous voilà engagés par le Salon
de 1880. Nous ne voulons plus de vous que des œuvres de haute portée,
et vous n'avez plus le droit de déchoir. L'enseignement de M. deBoisbau-
dran a eu pour vous d'excellents résultats, comme il en a eu pour Alph.
Legros et pour Régamey. Mais ne perdez pas de vue le perpétuel danger
de cet enseignement précieux; nourrissez-vous à cette heure, nourrissez-
vous toujours de la nature ! Le sentiment, vous en avez de reste, et du
plus élevé. La nature est le pain des forts.

Une autre femme, dont l'étude persévérante des côtes bretonnes avait
fait une artiste à l'œil juste, W"e Lavillette, n'a pas gagné, dans son Effet
de brouillard à Yport, à se rapprocher d'Eug. Ciceri ; on la retrouve,
heureusement, dans son [Anse des Kourigans, près Lorient • et cette
même mer de Bretagne, avec ses vagues mousseuses déferlant bruyamment
sur les noirs écueils, a porté bonheur égal à M. Paul Roux et à M. Iwil.
 
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