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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 22.1880

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Nr. 3
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Lenormant, François: L' art du Moyen Âge dans la Pouille, 1, Notes archéologiques sur le littoral de l'Adriatique
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https://doi.org/10.11588/diglit.22842#0224

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206

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

l'est la mer étend à perte de vue sa nappe qui brille au soleil, à l'ouest,
au delà de la plaine nue dont on embrasse l'ensemble d'un seul coup
d'œil, le regard suit avec admiration les grandioses dentelures de la
chaîne des Apennins, depuis le Matese jusque bien par delà l'endroit où
le Vultur dresse son cône volcanique éteint dès avant le commencement
de l'histoire; au sud, droit devant soi, on voit au delà du cours de
l'Ofanto la Pouille s'étendre entre la mer et les montagnes comme un
immense et plantureux verger. On suit toute la ligne de la côte jusqu'à
Bari : d'abord, de Manfredonia à l'embouchure de l'Olànlo, déserte et
bordée de lagunes stagnantes ; puis au delà, parsemée de ces villes si
rapprochées les unes des autres dont la série commence à Barletta et qui
dans le lointain apparaissent comme autant de taches d'un blanc écla-
tant entre l'azur de la mer et la verdure du continent.

Monte Sant'Angelo, outie le sanctuaire de l'Archange, qui en est
la cathédrale, renferme une belle église d'architecture normande, du
xue siècle, en forme de rotonde, dédiée à saint Pierre. Mais je ne m'y
arrêterai pas, car tout cède ici en intérêt à l'église principale. Une cour
fermée par une grille sur la rue y donne accès. A droite est un haut
campanile de style angevin, bâti dans la première moitié du xive siècle
par le roi Robert le Sage. Au fond, sous un portique, se trouve l'entrée
de l'escalier de 55 marches taillées dans le roc, qui descend à un petit
atrium quadrangulaire, entouré de deux étages de galeries, en avant de
la paroi de rochers où s'ouvre la grotte sainte. Une nef ogivale prolonge
extérieurement la caverne et en fait une église assez vaste, dont le
chœur, exhaussé de quatre marches, et l'autel sont placés clans la cavité
naturelle de la montagne, où se manifesta, dit-on, saint Michel sous une
forme visible. Cette nef a probablement été construite lors des travaux
que Charles d'Anjou fit exécuter en 1273 pour augmenter la magni-
ficence du sanctuaire. 11 règne à l'intérieur une obscurité profonde et
une grande humidité; l'eau suinte constamment goutte à goutte avec
un bruit monotone du sommet de la voûte de rocher, et une source,
aux eaux de laquelle on prête des vertus miraculeuses, jaillit à la
gauche de l'autel. Le pavé de la nef et du chœur est de marbre blanc
et rouge. Au fond de la profonde caverne, l'autel, surchargé de cierges
que tient constamment allumés la piété des fidèles, resplendit au milieu
des ténèbres. Les lumières se reflètent sur le métal des ex-voto sus-
pendus à la paroi du fond, et la statue de l'Archange, s'enlevant en
sombre sur ce champ d'or brillant, semble une apparition entourée
d'une auréole éclatante. L'impression qui en résulte est des plus saisis-
santes.
 
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