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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 22.1880

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Nr. 5
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Lafenestre, Georges: Le château de Chantilly et ses collections, [1]: une demeure seigneuriale au XIXe siècle
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https://doi.org/10.11588/diglit.22842#0412

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382

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

cette pénétrante finesse que le rusé compère réservait toujours pour les
têtes et, suivant le prix, pour les mains de ses figures. Ce tableau pro-
vient de la collection de lord Northwick.

VAnnonciation par Francisco Francia est un des meilleurs spéci-
mens de ce maître consciencieux. Waagen, qui l'admira en Angleterre
chez le môme lord Northwick et MM. Crowe et Cavalcaselle qui l'exami-
nèrent en France, chez M. Reiset, croient pouvoir lui assigner, comme
date, la meilleure période de Francia, celle qui va de l/i90 à 1500, pen-
dant laquelle, débarrassé des timidités de l'orfèvre, animé par les succès
de Pérugin, il sut unir, dans ses pieux ouvrages, à la plus grande pureté
d'imagination la plus chaleureuse clarté de coloris. Il serait intéressant
de savoir pour quel couvent fut exécutée cette composition, dans laquelle
un carme, saint Albert le Grand, tient à gauche une place aussi impor-
tante que la Vierge à droite. Chacun des deux personnages reste
d'ailleurs étranger l'un à l'autre; le saint, les yeux de face, une croix à
la main, écrase d'un air paisible un petit démon femelle à queue velue
et à griffes qui se tord sous ses pieds, tandis que la Vierge, un livre à
la main, sous une magnifique colonnade, lève chastement ses yeux
attendris vers un ange qui descend du ciel, au dessus de la tête du saint.
L'ange messager est lui-même suivi, de loin.par un petit Père Éternel
entouré de nuages. Toutes les figures, surtout les deux principales, sont
menées d'un bout à l'autre avec une merveilleuse sûreté de main et une
grande intensité d'émotion contenue. Elles se modèlent d'ailleurs harmo-
nieusement dans l'air vif et frais d'un paysage tranquille où cheminent
au loin quelques moines, le long des tertres herbus, entre des arbres
minces au lé'ger feuillage.

Jules Romain, Perino del Vaga, Francesco Penni, Pellegrino da Mo-
rt en a représentent l'école de Raphaël. On peut, ce semble, attribuer har-
diment au premier un magnifique Portrait de Dame romaine, d'une
vigueur de style et d'une ardeur d'accent tout à fait remarquables. La
dame est très brune, charnue et robuste, haute en couleur, avec de
grands yeux h la Fornaiïna, hardis et enflammés, des lèvres épaisses
et sanguines, coiffée superbement d'une façon cle turban emplumé.
Richement vêtue, elle laisse voir sa chemisette brodée d'or et passe-
mentée de noir, décolletée en carré, et se drape dans un ample manteau
verdâtre à revers mordoré. Elle s'appuie sur une balustrade de pierre
et, de sa main forte et grasse, joue d'un éventail de plumes suspendu à
son cou par une double chaîne d'orfèvrerie. La peinture, épaisse et solide,
s'empâte dans les fermes contours avec une résolution un peu brutale,
qui ne messied pas au caractère masculin de cette figure dominatrice.
 
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