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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 27.1883

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Mantz, Paul: Rubens, 5
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https://doi.org/10.11588/diglit.24259#0020

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

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lui chercha d’autres destinées. Le 2 février 1608, il offrait de le vendre au
duc de Mantoue, dont le budget, alors assez mal en point, exigeait des
ménagements. La proposition de l’artiste ne fut pas agréée. Lorsqu’il
revint en Flandre, Rubens rapporta avec lui le Saint Grégoire : il le garda
longtemps dans son atelier ; en 1626, il le fitplacer à l’église Saint-Michel
d’Anvers, où Mariette signale encore sa présence au xvme siècle1. A l’heure
qu’il est,> nous l’avons dit, le tableau est à Grenoble, où il a été envoyé
en 1811 par l’administration des musées, qui voyait dans le Saint Grégoire
un Saint Ambroise. L’idée de s’informer, d’ouvrir un livre ou de regarder
une estampe ne serait jamais venue aux gens de cette époque candide, et
l’on sait combien leur ignorance a coûté cher au Louvre appauvri.

La composition de ce grand morceau est fort italienne, avec des à peu
près de symétrie, des balancements de formes équilibrées qui révèlent
une intelligente étude des maîtres du siècle antérieur. Au fond, un porti-
que ouvert que flanquent des colonnes et dont l’arcature à plein cintre
laisse voir un ciel très bleu. Au-dessus de cette porte s’agrafe un cadre où
sont représentés la Vierge et l’Enfant qui tient la boule du monde. C’est
une allusion à une peinture miraculeuse qu’on vénérait à Santa-Maria in
Vallicella. Des anges, porteurs de guirlandes, voltigent autour de l’image
sainte. Us sont potelés et dodus, et, çà et là, ils sont comme fouettés de
lumières blanches. On sent poindre, dans les corps de ces enfants robustes,
le commencement d’une des religions de Rubens, l’amour de la chair
fraîche; mais ces anges ne sont pas encore flamands, en ce sens qu’ils
sont modelés à l’italienne.

Le fond du tableau étant occupé par la décoration architecturale que
nous venons de dire, le premier et le second plan sont meublés de six
figures debout, de proportion extra naturelle. Presque toutes sont conçues
dans un sentiment sculptural qui, à cette époque du moins, est une des
plus constantes recherches de Rubens. Au centre, le pape saint Grégoire,
levant vers le ciel sa tête inspirée, écoute les mystérieuses leçons que lui
donne le Saint-Esprit, colombe blanche qui vole au-dessus de lui et dont
l’aile caresse son front chauve. A droite, une grande jeune femme vêtue
comme une princesse. C’est sainte Domitille, dont la Chiesa Nuova possé-
dait les reliques. Derrière la sainte, deux martyrs, Achillée et Nérée : on
ne voit guère que leurs têtes ascétiques et austères, car dans ces temps de
sérieuse jeunesse, Rubens n’est pas indifférent aux inquiétudes de
l’expression et il a parfois l’air de croire à la pensée. De l’autre côté, fai-

4. L’histoire du tableau de Rubens est fort bien racontée dans un livre excellent:
Étude sur le musée de Grenoble, par M. Marcel Reymond, 4 879. L’auteur rappelle
avec raison que le Saint- Grégoire a été gravé par Rombaut Eynhoudts.
 
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