LES DENTELLES ANCIENNES A L’UNION CENTRALE.
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On peut aisément saisir la transition qui eut lieu entre le point de
Venise et le point de France dans un superbe volant au point de rose sur
lequel la barrette jetée çà et là se réunit en donnant naissance à un réseau
de forme hexagonale. Ce beau spécimen provient de la vente de MmeBlanc;
il appartient actuellement à M. bornent. Un autre échantillon du même
point, exposé par Mme Mayer de Hambourg, nous montre la couronne
royale de France au milieu de fleurs. Le point de France ne tarda pas à
être le plus estimé de tous en Europe; il dut sa réputation autant à la
manière dont il était fabriqué qu’à la distinction de ses dessins, où l’on
retrouve souvent l’influence du style de Bérain. Une autre manufacture
de points de France avait été établie par Colbert au château de Madrid,
près Paris. Le comte de Marsan fonda une fabrique de dentelles à Paris
même, vers la fin du xvne siècle. Il avait obtenu un privilège pour sa
nourrice, Mrae Dumont, qui dirigea d’abord l’établissement ; puis, étant
allée s’établir en Portugal, elle le laissa à Mlle de Marsan.
Une pièce curieuse de 1661, La Révolte des passements, nous fournit
des renseignements sur les fabriques de dentelles qui existaient à cette
époque.
Nous avons mentionné la création de divers établissements dans plu-
sieurs villes de France ; les points qui s’v fabriquaient prirent leur nom
de ces villes. Il en fut ainsi pour les points d’Alençon, d’Argentan, de
Sedan, etc. •— On sait que le plus estimé de tous est celui d’Alençon. Les
quelques écrivains qui se sont occupés de la dentelle ont parlé de la créa-
tion d’un atelier établi par Colbert dans son château de Lonrai, près
d’Alençon ; d’après eux, le point qui porte ce nom aurait été introduit dans
cette ville par Mme Gilbert d’Alençon. Tous ces auteurs, à part AL J. Séguin,
qui a combattu cette opinion, avaient puisé ce renseignement dans les
Mémoires historiques de la ville cl’Alençon, publiés en 1787 par Odolant
Desnos. Il nous paraît résulter de la lettre de Duboulay Favier, citée pré-
cédemment, que ce fut Mme Laperrière qui introduisit à Alençon le point
qui porte ce nom. Voici du reste le passage de cette lettre adressée à Col-
bert : «Une femme nommée Laperrière, fort habile à ces ouvrages, trouva
il y a quelques années le moyen d’imiter le point de Venise, en sorte
qu’elle y vint à telle perfection, que ceux qu’elle faisait ne dévoient rien
aux étrangers. C’est qu’elle vendoit chaque collet 1,500 et 2,000 livres.
Pour faire ces ouvrages, il luy falloit enseigner plusieurs petites filles aux-
quelles elle montrait à faire ce point. »
Dans une notice publiée tout récemment par M'"e G. Despierres sur
l’origine du point d’Alençon, nous voyons que ce fut Catherine de Marcq,
la préposée directrice des manufactures de points de France, qui établit
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On peut aisément saisir la transition qui eut lieu entre le point de
Venise et le point de France dans un superbe volant au point de rose sur
lequel la barrette jetée çà et là se réunit en donnant naissance à un réseau
de forme hexagonale. Ce beau spécimen provient de la vente de MmeBlanc;
il appartient actuellement à M. bornent. Un autre échantillon du même
point, exposé par Mme Mayer de Hambourg, nous montre la couronne
royale de France au milieu de fleurs. Le point de France ne tarda pas à
être le plus estimé de tous en Europe; il dut sa réputation autant à la
manière dont il était fabriqué qu’à la distinction de ses dessins, où l’on
retrouve souvent l’influence du style de Bérain. Une autre manufacture
de points de France avait été établie par Colbert au château de Madrid,
près Paris. Le comte de Marsan fonda une fabrique de dentelles à Paris
même, vers la fin du xvne siècle. Il avait obtenu un privilège pour sa
nourrice, Mrae Dumont, qui dirigea d’abord l’établissement ; puis, étant
allée s’établir en Portugal, elle le laissa à Mlle de Marsan.
Une pièce curieuse de 1661, La Révolte des passements, nous fournit
des renseignements sur les fabriques de dentelles qui existaient à cette
époque.
Nous avons mentionné la création de divers établissements dans plu-
sieurs villes de France ; les points qui s’v fabriquaient prirent leur nom
de ces villes. Il en fut ainsi pour les points d’Alençon, d’Argentan, de
Sedan, etc. •— On sait que le plus estimé de tous est celui d’Alençon. Les
quelques écrivains qui se sont occupés de la dentelle ont parlé de la créa-
tion d’un atelier établi par Colbert dans son château de Lonrai, près
d’Alençon ; d’après eux, le point qui porte ce nom aurait été introduit dans
cette ville par Mme Gilbert d’Alençon. Tous ces auteurs, à part AL J. Séguin,
qui a combattu cette opinion, avaient puisé ce renseignement dans les
Mémoires historiques de la ville cl’Alençon, publiés en 1787 par Odolant
Desnos. Il nous paraît résulter de la lettre de Duboulay Favier, citée pré-
cédemment, que ce fut Mme Laperrière qui introduisit à Alençon le point
qui porte ce nom. Voici du reste le passage de cette lettre adressée à Col-
bert : «Une femme nommée Laperrière, fort habile à ces ouvrages, trouva
il y a quelques années le moyen d’imiter le point de Venise, en sorte
qu’elle y vint à telle perfection, que ceux qu’elle faisait ne dévoient rien
aux étrangers. C’est qu’elle vendoit chaque collet 1,500 et 2,000 livres.
Pour faire ces ouvrages, il luy falloit enseigner plusieurs petites filles aux-
quelles elle montrait à faire ce point. »
Dans une notice publiée tout récemment par M'"e G. Despierres sur
l’origine du point d’Alençon, nous voyons que ce fut Catherine de Marcq,
la préposée directrice des manufactures de points de France, qui établit