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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 27.1883

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Nr. 2
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Claretie, Jules: Léon Gambetta: amateur d'art
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https://doi.org/10.11588/diglit.24259#0137

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

12U

« Gambetta, me disait M. Antonin Proust, n’a jamais, à ma connais-
sance, écrit de Salon, mais il les a presque tous parlés depuis vingt ans.
Et, ajoutait l’ancien ministre des arts, dans ces dernières années, c’était,
à chaque printemps, une joie d’aller, quelques jours avant l’ouverture de
l’exposition des artistes vivants, parcourir les galeries du palais de l’In-
dustrie. Dans ces visites, ses jugements rapides, saisissants, curieux
et instructifs, étaient précieusement recueillis par les artistes; et c’était
chose naturelle, car ils révélaient une connaissance profonde de l’art
dans toutes ses manifestations, et parce qu’ils étaient formulés avec
cette vigueur d’expression qui, dans les paroles de Gambetta, s’alliait
toujours à l’urbanité de la forme. Il ne dissimulait pas ses préférences
pour les hommes qui, depuis plus de quatre-vingts ans, ont, à différentes
reprises, ramené l’Ecole française au respect de la vérité. A ce titre,
Chardin, Houdon, Géricault, Rude, Courbet, Rude surtout, le vieux Rude,
l'homme du groupe de l’Arc de Triomphe, la France jetant le cri d'alarme,
que Gambetta regardait toujours lorsqu’il passait là, Rude était l’objet
d’une admiration sans réserve de sa part. « M. Castagnary lui avait
montré Courbet et M. Ph. Burty Delacroix, mais il avait deviné, admiré
spontanément Millet, et il se vantait d’avoir, au Salon de 1866, ameuté
devant l'Angelus. Aux Salons, il allait droit aux paysagistes, puis aux sujets
militaires. Il se plaisait aux rêves de Corot, professait un culte pour le
génie inventif de Delacroix et tenait Meissonier pour le plus complet
des artistes de notre temps. » Il a souvent manifesté le désir d’avoir son
portrait peint par Meissonier, mais le temps lui a toujours manqué pour
pouvoir s’assurer le loisir des séances nécessaires. Raudry, Donnât, Caro-
lus Duran, Falguière, Merciô, qui étaient de son intimité, auraient voulu
qu’il posât devant eux. Il s’y serait prêté volontiers, car il tenait leur
talent en grande estime, mais il reculait toujours le moment où il pourrait,
se donner ce loisir, et ce n’est qu’à grand’peine que je pus obtenir de lui
qu’il donnât à Chaplain, pendant qu’il était au palais Bourbon, quelques
heures hâtives et forcément distraites par les visites, pour le médaillon
qui a été exposé l’année dernière au Salon des Arts décoratifs, médaillon
qui restera comme son image la plus fidèle et en même temps comme
Tune des œuvres magistrales de la sculpture contemporaine. »

Si Léon Gambetta ne consentait point d’ailleurs à dérober une par-
celle de son temps pour donner une séance aux artistes qui le sollicitaient,
dès qu’il entrevoyait une éclaircie dans sa vie harassée de labeurs, il
n’avait pas de plus cher plaisir que d’aller visiter les collections publiques
ou privées. M. Barbet de Jouy n’a certainement pas oublié la journée
que Gambetta passa dans son cabinet à feuilleter le merveilleux album de
 
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