30 h
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
Pherès, qu’on leur donnait aussi, ne veut pas seulement dire animaux,
bêtes farouches, mais se rattache à pharoô} féconder.
Cette petite digression m’est suggérée par l’intérêt qu’offre dans
l’histoire du dessin la réalisation définitive du type des Centaures après
les tâtonnements les plus naïfs. Je parlerai plus loin de cette curieuse
réalisation.
J’oubliais d’ajouter que lolas, le violet, le crépuscule, a auprès d’Her-
cule un caractère funèbre qui le rattache aux idées de destruction évoquées
par toutes ces divinités.
On voit donc et, je l’avoue, le résultat de mes recherches à ce sujet
m’a beaucoup surpris, que l’art grec a d’abord réservé la tête de face pour
un certain ordre de divinités. Je ne croyais pas à une influence très déci-
sive du symbolisme et des idées hiératiques sur l’art égyptien, si fixe, si
raide, et voilà que je dois la constater bien nette dans l’art grec,, qui sem-
blait infiniment plus libre que l’égyptien.
Les divinités dont je parle ont un caractère hostile, secondaire,
fâcheux et pénible pour l'esprit antique ; si donc on leur attribue le des-
sin de face, est-ce parce qu’il y avait une certaine défaveur contre ce sys-
tème de dessin? Est-ce plutôt parce qu’il paraissait difficile, défectueux,
laid, tranchons le mot, et presque grotesque à cause même de la peine
qu’y prenaient des artistes encore inhabiles, qu’on se plut à s’en servir
pour marquer d’un sceau inférieur, ironique peut-être, ces êtres pour qui
l’on éprouvait de l’antipathie et qu’on se sentait disposé à bafouer, puis-
qu'ils n’étaient pas les plus forts et que les dieux aimables et bienveillants
en venaient toujours à bout dans leurs combats avec eux.
On est porté à adopter cette façon de voir quand on regarde les
démons de l’art chrétien. Ceux-ci sont des reproductions de la Gorgone,
des Satyres, des Géants. Le caractère satirique des figurations du diable
au moyen âge est parfois évident. On se moque de lui encore plus volon-
tiers dans les contes et les légendes. Les mots satyres et satire parlent
d’eux-mêmes. Je ne veux pas dire que les figures de vases qui m’occupent
soient des caricatures, mais on peut y voir une certaine tendance ironique
et dédaigneuse existant dans l’esprit général de l’antiquité grecque et que
les peintres traduisent presque à leur insu, sans avoir l’intention bien
arrêtée de livrer le personnage à la risée du spectateur, mais dans le but
de le livrer bel et bien à son mépris.
La caricature a jailli, dans les vases, vers l’époque d’Alexandre ou
celle des successeurs, et, pour s’épanouir ainsi, elle devait être contenue
dans un germe antérieur ; le Ridicule suit bien vite le Mépris et l’Aversion,
pour employer une de ces images qui furent chères à l’esprit des Grecs.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
Pherès, qu’on leur donnait aussi, ne veut pas seulement dire animaux,
bêtes farouches, mais se rattache à pharoô} féconder.
Cette petite digression m’est suggérée par l’intérêt qu’offre dans
l’histoire du dessin la réalisation définitive du type des Centaures après
les tâtonnements les plus naïfs. Je parlerai plus loin de cette curieuse
réalisation.
J’oubliais d’ajouter que lolas, le violet, le crépuscule, a auprès d’Her-
cule un caractère funèbre qui le rattache aux idées de destruction évoquées
par toutes ces divinités.
On voit donc et, je l’avoue, le résultat de mes recherches à ce sujet
m’a beaucoup surpris, que l’art grec a d’abord réservé la tête de face pour
un certain ordre de divinités. Je ne croyais pas à une influence très déci-
sive du symbolisme et des idées hiératiques sur l’art égyptien, si fixe, si
raide, et voilà que je dois la constater bien nette dans l’art grec,, qui sem-
blait infiniment plus libre que l’égyptien.
Les divinités dont je parle ont un caractère hostile, secondaire,
fâcheux et pénible pour l'esprit antique ; si donc on leur attribue le des-
sin de face, est-ce parce qu’il y avait une certaine défaveur contre ce sys-
tème de dessin? Est-ce plutôt parce qu’il paraissait difficile, défectueux,
laid, tranchons le mot, et presque grotesque à cause même de la peine
qu’y prenaient des artistes encore inhabiles, qu’on se plut à s’en servir
pour marquer d’un sceau inférieur, ironique peut-être, ces êtres pour qui
l’on éprouvait de l’antipathie et qu’on se sentait disposé à bafouer, puis-
qu'ils n’étaient pas les plus forts et que les dieux aimables et bienveillants
en venaient toujours à bout dans leurs combats avec eux.
On est porté à adopter cette façon de voir quand on regarde les
démons de l’art chrétien. Ceux-ci sont des reproductions de la Gorgone,
des Satyres, des Géants. Le caractère satirique des figurations du diable
au moyen âge est parfois évident. On se moque de lui encore plus volon-
tiers dans les contes et les légendes. Les mots satyres et satire parlent
d’eux-mêmes. Je ne veux pas dire que les figures de vases qui m’occupent
soient des caricatures, mais on peut y voir une certaine tendance ironique
et dédaigneuse existant dans l’esprit général de l’antiquité grecque et que
les peintres traduisent presque à leur insu, sans avoir l’intention bien
arrêtée de livrer le personnage à la risée du spectateur, mais dans le but
de le livrer bel et bien à son mépris.
La caricature a jailli, dans les vases, vers l’époque d’Alexandre ou
celle des successeurs, et, pour s’épanouir ainsi, elle devait être contenue
dans un germe antérieur ; le Ridicule suit bien vite le Mépris et l’Aversion,
pour employer une de ces images qui furent chères à l’esprit des Grecs.