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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 16.1896

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Reymond, Marcel: Lorenzo Ghiberti (1378 - 1455)
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https://doi.org/10.11588/diglit.24682#0148

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

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Si Ghiberti avait cherché à imiter l’antique, il eût renoncé à
costumer ses personnages pour représenter surtout des figures nues,
comme on le fit au xvi° siècle. Or, chez lui, il n’y a presque pas de nus,
et on ne les rencontre que là où ils sont indispensables : dans les
scènes de la Création, du Baptême, de la Flagellation, du Crucifie-
ment. Dans les parties décorant la bordure des portes, là où il était
libre d’agir à sa fantaisie, une seule figure est nue, celle de Samson,
et cela a d’autant plus lieu de surprendre que, quelques années
auparavant, Niccolo d’Arezzo avait fait un grand usage de figures
nues dans la décoration de la porte de la Mandorla.

Si Ghiberti avait été un disciple de l’art antique, il eût imité
les formes du bas-relief romain ; or, aucun maître moderne ne s’est
plus éloigné que lui, sur ce point, de l’art antique et n’a créé une
forme en plus complète opposition avec cet art.

De même, il n’emprunte jamais le moindre motif de décoration
à l’antiquité, et renonce même à ces arabesques que la tradition
du moyen âge avait conservées, pour adopter dans toutes leups con-
séquences les doctrines du gothique du Nord. Cette ornementa-
tion de Ghiberti, exclusivement empruntée à la nature, aux diverses
formes du règne animal et du règne végétal, est d’autant plus remar-
quable que, déjà dans la première moitié du xv° siècle, les formes
décoratives romaines devenaient en honneur à Florence, sous l'ac-
tion de Brunelleschi, de Michelozzo, d’AIberti et de Donatello1.

Ajoutons enfin que jamais le sculpteur ne demande à l’antiquité
le sujet de ses compositions. D’un bout à l’autre de sa carrière, il
conserve la pure tradition chrétienne, et dans toute son œuvre on ne
pourrait citer, je ne dis pas une composition, mais même une seule
figure appartenant à l’histoire de la mythologie antique.

Et si l’on vient nous dire que, malgré tout, sa grandeur et
celle des maîtres du xve siècle tiennent à l’étude de l’antiquité,
que, sans elle, ils n’eussent jamais possédé au même degré la grâce,
l’élégance, la pureté des sentiments, l’amour de la beauté des formes
en môme temps que le spiritualisme de la pensée, je ne puis m'em-
pêcher de songer que ces qualités sont les qualités dominantes du
xmc et du xiv° siècle, de ces siècles où l’influence de l’antiquité était

1. « L’exemple des Ghiberti, des délia Robbia, des sculpteurs du temple des
Malatesta, qui se sont tous hardiment attaqués soit à la faune ou à la flore de
leur région, soit à l’art héraldique, était de nature à encourager les réalistes et
à les faire persévérer dans une donnée qui, seule, eût sauvé l’art de la stérilité
et de l’ennui. » (Münlz, Histoire de l'Art pendant la Renaissance, t. Ier, p. 398.)
 
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