Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 16.1896)

LES

PORTRAITS DANS L’ŒUVRE DE WATTEAU

Tout ceci n’cst peut-être qu’imaginations pures, suppositions sans
fondement, affirmations hasardeuses. Rien n’est prouvé et rien ne
peut l'être. Chercher des portraits dans Watteau, trouver des hommes
dans ce petit peuple de masques! L’entreprise paraît bien chimé-
rique, puisqu’elle s’appuie sur quelques notes d’un contemporain et
sur l'impression fugitive de l’œil qui discerne le même individu sous
de multiples déguisements, mais ne peut fournir les raisons de cette
impression. Et puis, n’est-ce pas profaner les exquises rêveries de
Watteau, quede rechercher des ressemblances humaines dans les ado-
rables figurines nées de la fantaisie éphémère de ce magicien et dont
on n’imagine pas qu’elles puissent ressembler à quelqu’un ? N’est-ce
pas faire évanouir ces êtres si légers, que de vouloir les saisir pour
les interroger sur le mystère de leur existence? Assurément non. Le
peintre de cette féerie, Watteau, n’a rien à perdre à notre enquête,.
Au contraire, il en devient plus grand parce qu’il en devient plus
humain. Ses personnages restent toujours baignés dans la même
poésie, mais ils s’animent d’une vie plus intense, étant plus réels.
Lui-même nous apparaît plus attachant encore, en se découvrant à

XVI. — U* PÉRIODE.

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