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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
est-il bien sûr qu’ils en eussent pris la peine? Quelle importance pou-
vait-elle avoir à leurs yeux? Dans les livrets de nos Salons actuels les
dimensions des tableaux ne sont pas même indiquées ; mais si elles
l'étaient, qui remarquerait une faute de ce genre, et surtout qui s’avi-
serait de la proclamer à la face de l’univers? On peut toutefois regretter
que quelque Saint-Aubin n’ait pas illustré ce catalogue de 1781; la
forme de ses petits dessins eût tranché la question tout de suite.
Puisque même ce petit moyen de contrôle nous manque, repre-
nons notre raisonnement. Les dimensions données par le catalogue
paraissant inadmissibles, intervertissons-les. Supposons nos tableaux
en hauteur et lisons : « ces deux morceaux de six pieds de haut sur
quatre et demi de large ». Aussitôt les descriptions fragmentaires
que nous en connaissons s’y appliquent sans difficulté; tout devient
clair et concordant : dans le tableau du jour l’encadrure noire se
forme d’elle-même et le feu n’est plus réduit à des dimensions ridi-
cules; la fumée du second ne prend plus des proportions exagérées,
et les pompiers, placés aux différents étages, ont toute facilité pour
inonder la salle.
Eh bien ! les tableaux ainsi compris existent. Ils appartiennent à
MM. de B***, dans la famille desquels ils sont depuis près d'un siècle.
J’ajouterai même qu’ils ont été traités sans beaucoup de ménage-
ments, les Hubert Robert n’ayant pas autrefois la valeur qu’on leur
reconnaît aujourd’hui. On les a relégués dans des couloirs ou des
pièces de service; ils se sont encrassés et ont dû subir un léger net-
toyage. Je ne les connais que depuis une dizaine d’années. Ils ne
sont donc pas indiqués dans mon ouvrage Hubert Robert et son
temps. Aujourd’hui je crois devoir les signaler aux amateurs, parce
qu’une récente acquisition faite par le Musée Carnavalet vient de
redonner un peu d’actualité à cet incendie de l’Opéra.
Leurs dimensions se rapprochent très sensiblement de celles du
catalogue, lesquelles, je le répète, ne sont qu’approximatives. Ces
dimensions, mesurées sur les bordures anciennes, sont, pour la
hauteur six pieds environ, et pour la largeur quatre pieds et demi
moins quelques centimètres. Elles correspondent encore mieux à
celles des bois de l’Opéra : en multipliant ces dernières par 6,66
nous obtenons presque rigoureusement celles des tableaux. Il est de
toute évidence que ces toiles de MM. de B*** ont été exécutées
d’après les études de l’Opéra1; elles en sont des reproductions
1. Nous adressons ici nos vifs remerciements àia Société d’iconographie pari-
sienne qui, très obligeamment, a mis à notre disposition les photographies des
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
est-il bien sûr qu’ils en eussent pris la peine? Quelle importance pou-
vait-elle avoir à leurs yeux? Dans les livrets de nos Salons actuels les
dimensions des tableaux ne sont pas même indiquées ; mais si elles
l'étaient, qui remarquerait une faute de ce genre, et surtout qui s’avi-
serait de la proclamer à la face de l’univers? On peut toutefois regretter
que quelque Saint-Aubin n’ait pas illustré ce catalogue de 1781; la
forme de ses petits dessins eût tranché la question tout de suite.
Puisque même ce petit moyen de contrôle nous manque, repre-
nons notre raisonnement. Les dimensions données par le catalogue
paraissant inadmissibles, intervertissons-les. Supposons nos tableaux
en hauteur et lisons : « ces deux morceaux de six pieds de haut sur
quatre et demi de large ». Aussitôt les descriptions fragmentaires
que nous en connaissons s’y appliquent sans difficulté; tout devient
clair et concordant : dans le tableau du jour l’encadrure noire se
forme d’elle-même et le feu n’est plus réduit à des dimensions ridi-
cules; la fumée du second ne prend plus des proportions exagérées,
et les pompiers, placés aux différents étages, ont toute facilité pour
inonder la salle.
Eh bien ! les tableaux ainsi compris existent. Ils appartiennent à
MM. de B***, dans la famille desquels ils sont depuis près d'un siècle.
J’ajouterai même qu’ils ont été traités sans beaucoup de ménage-
ments, les Hubert Robert n’ayant pas autrefois la valeur qu’on leur
reconnaît aujourd’hui. On les a relégués dans des couloirs ou des
pièces de service; ils se sont encrassés et ont dû subir un léger net-
toyage. Je ne les connais que depuis une dizaine d’années. Ils ne
sont donc pas indiqués dans mon ouvrage Hubert Robert et son
temps. Aujourd’hui je crois devoir les signaler aux amateurs, parce
qu’une récente acquisition faite par le Musée Carnavalet vient de
redonner un peu d’actualité à cet incendie de l’Opéra.
Leurs dimensions se rapprochent très sensiblement de celles du
catalogue, lesquelles, je le répète, ne sont qu’approximatives. Ces
dimensions, mesurées sur les bordures anciennes, sont, pour la
hauteur six pieds environ, et pour la largeur quatre pieds et demi
moins quelques centimètres. Elles correspondent encore mieux à
celles des bois de l’Opéra : en multipliant ces dernières par 6,66
nous obtenons presque rigoureusement celles des tableaux. Il est de
toute évidence que ces toiles de MM. de B*** ont été exécutées
d’après les études de l’Opéra1; elles en sont des reproductions
1. Nous adressons ici nos vifs remerciements àia Société d’iconographie pari-
sienne qui, très obligeamment, a mis à notre disposition les photographies des