Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (4. Pér. 9.1913)

ROME AU SALON

ans la verdure élyséenne dont le Grand-
Palais est la serre démesurée, des bustes
et des statues par centaines promettent
mélancoliquement l’immortalité à des
morts plus ou moins illustres ou aux gens
qui viennent contempler leur propre
effigie autour de la corbeille d’honneur.
La plupart de ces sculptures sont des plâ-
tres qui attendent leur durée du marbre
ou du bronze. Cette année, un terrain
neutre qui sépare la sculpture des « Artistes Français » du domaine
de la « Nationale » a donné asile, derrière un mur de toile, à un
plâtre très grand et très précieux. Ce plâtre ressuscite le plus auguste
visage de l’histoire : la face de Rome, telle qu’elle apparut aux bar-
bares, dans la plénitude de sa maturité et dans l’achèvement de sa
parure séculaire.

Le sculpteur est un architecte. Quand M. Paul Bigot descendit de
le Villa Médicis en quête d’un « envoi de Rome », —c’était en 1902,
— il passa devant les colonnades et les chapiteaux que tant de ses
prédécesseurs avaient couchés sur le papier pour les remettre à neuf
par un brillant lavis. Ni le Mars Ultor et son ordre colossal, ni le
Forum et sa voie triomphale ne le retinrent d’abord. Il alla se terrer
dans un vallon où personne ne passe, entre les noires coupoles des
gazomètres et les ifs du petit cimetière israélite, perdu au milieu de
vagues cultures comme une entrée de catacombe. C’est là qu’il entre-
prit sa (( restauration ».

Le vallon du Grand Cirque, ce premier lieu des fêtes romaines,
où une journée de joyeuse mêlée se termina, dit-on, par l’enlève-
ment des Sabines, avait peu à peu envahi et dominé les pentes de
l’Aventin et du Palatin par l’ascension de ses gradins, dont la masse