Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (4. Pér. 9.1913)

PEINTRES-GRAVEURS CONTEMPORAINS

M. ERNEST LABORDE

De Meryon et Hervier à Eélix Ruhot, à Auguste Repère et à
Eugène Béjot, Paris n’a pas cessé d’ètre, pour les aquafor-
tistes modernes, une source d’inspiration riche à miracle et
jamais tarie. Dans la grand’ville, aux cent physionomies diverses,
chacun a cherché de quoi assurer l’accord des spectacles extérieurs
avec la personnalité foncière; chacun s’est taillé, à sa fantaisie, un
domaine peuplé ou désert, luxueux ou pauvre, neuf ou vétuste.

Par un effet naturel, les esprits enclins à la méditation tiennent
plus volontiers commerce avec le passé. Ils y découvrent un écho à
leur propre état d’àme. Quelle mélancolie n’offrent pas les con-
structions édifiées le long des siècles et qui retournent au néant,
de façon soudaine ou lente, ruinées par le temps, saccagées par les
hommes! L’artiste aux aguets devance et conjure le terme de leur
destin ; il les empêche de disparaître tout entières; l’image qu’il trace
en sauvegarde le souvenir et le perpétue.

A côté du vieux Paris officiel, monumental, aux édifices et aux
sites classés, classiques, désignés par les guides, il en est un autre
dont le pittoresque revêt une beauté plus intime, plus secrète, non
moins touchante. C’est à ces aspects familiers et peu connus, que vont
les préférences de M. Ernest Laborde. Selon l’exemple des Japonais,
dans ses représentations, il donne le pas au fragment sur l’ensemble.
S’il étudie les vestiges de notre architecture, aux derniers siècles,
s’il dégage le caractère et le style des anciennes façades, c’est rarement
avec le souci de les reproduire intégralement; plutôt que de s’élever
jusqu’au faite, son regard s’arrête à la partie qui avoisine le sol
et que le passant inattentif longe et frôle dans sa course pressée.
M. Ernest Laborde s’est institué le graveur des appartements à rez-