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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 9.1913

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Nr. 6
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Reymond, Marcel; Marcel-Reymond, Charles: Léonard de Vinci: architecte du château de Chambord
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https://doi.org/10.11588/diglit.24886#0486

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LÉONARD DE VINCI ET LE CHATEAU DE CHAMBORD 457

M. Enlart, qui n’ignore rien de l’architecture française, ne cite qu’un
seul escalier de ce genre : celui de l’église des Bernardins de Paris,
qui date du milieu du xive siècle et qui n’est d’ailleurs connu que par
un passage de Sauvai. L’escalier à double révolution de Chambord,
survenant près de deux siècles après cet escalier du Moyen âge,
apparut d’une telle nouveauté que tous les historiens qui ont parlé
de Chambord, entre autres Androuet du Cerceau, l’ont décrit avec un
étonnement admiratif. Palladio lui-même, dans son livre sur l’Archi-
tecture, où il s’occupe surtout des monuments antiques, fait exception
pour l’escalier de Chambord, qu’il cite comme une grande curiosité
et dont il donne un dessin. Il faut d’ailleurs noter que Palladio, qui
n’a pas vu Chambord, décrit un escalier à quatre montées et non à
deux, ce qui provient sans doute d’une description inexacte qu’on
lui en a faite, ou peut-être d’un projet primitif qu’il aurait connu.

Or les manuscrits de Léonard nous fournissent plusieurs exemples
d’études faites par lui pour des escaliers à double ou à multiples révo-
lutions. Je citerai, entre autres, un escalier à vis avec double révo-
lution qui se trouve dans le manuscrit B, au folio 69 recto; un autre,
également double, mais à travées droites, au folio 68 verso; enfin,
un escalier quintuple au folio 47 recto. Ces recherches pourraient
paraître de simples bizarreries, mais Léonard, dans des annotations,
nous indique lui-même leur intérêt. Il dit que, dans un escalier
double, une montée sert pour le châtelain et l’autre pour les gens de
service; et, dans sa description de l’escalier quintuple, il dit : « Il y
a ici cinq escaliers avec cinq entrées : l'un ne voit pas l’autre, et
qui serait dans l’un ne peut entrer dans l’autre. Et c’est un bon
système pour les mercenaires, afin qu’ils ne puissent se mêler, et
qu’ils soient séparés pour la défense de la tour; celle-ci peut être
ronde ou carrée. »

II est particulièrement intéressant de constater que ces formes,
que nous ne rencontrons nulle part à cette époque, ont vivement
préoccupé Léonard. Nous n’en conclurons pas qu’il a construit
l’escalier de Chambord, mais il semble que nous pourrons supposer
que l’artiste qui a modifié les plans primitifs en construisant cet
escalier s’est inspiré, dans sa conception, d’idées que Léonard avait
dû répandre dans son entourage et, peut-être même, de dessins de
ce maître.

Si l’escalier est irrationnel, s’il n’est pas à sa place, personne
néanmoins ne saurait en contester la beauté, et cette beauté pour-
rait être, encore ici, une part revenant au grand Florentin.
 
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